Incidents Ajaccio-Bordeaux: que s'est-il vraiment passé dans les tribunes?

Incidents Ajaccio-Bordeaux: que s'est-il vraiment passé dans les tribunes?

Le football français à une nouvelle fois montré son côté sombre ce lundi. Lors du dernier match de la troisième journée de Ligue 2 entre Ajaccio et Bordeaux (0-0), des incidents ont eu lieu dans les travées du stade François-Coty.

Pourtant interdits de déplacement, une soixantaine de supporters des Girondins se sont mis à chanter à la gloire de leur club, ce qui a entraîné des échauffourées avec des fans ajacciens. Durant les débordements, du mobilier et une échelle ont été utilisés par les belligérants, qui ont dégradé une tribune. La rencontre a été interrompue pendant près d'une heure.

>> Suivez l'actualité de la Ligue 1 et de la Ligue 2 en direct

Dix blessés légers, dont deux stadiers

La rencontre de lundi soir était classée à un niveau 3 sur 5 par la Division nationale de lutte contre le hooliganisme. Treize effectifs de la sécurité publique d'Ajaccio ont été mobilisés à l'occasion de cette rencontre. Au total, 123 policiers étaient mobilisés dont 110 des unités des forces mobiles. Selon des sources policières, une soixantaine de supporters bordelais ont quand même réussi à s'introduire au sein de l'enceinte de l'AC Ajaccio. D'après les informations de RMC Sport, ils ont utilisé totalement normalement la billetterie du club corse.

Le premier décompte effectué sur place lundi soir faisait état de dix blessés légers, huit supporters bordelais et deux stadiers. Quand la rencontre a repris à 21h55, la situation était stabilisée, selon les forces de l'ordre. C'est ensuite à 22h10 que les supporters bordelais ont été évacués de l'environnement du stade, raccompagnés à leurs véhicules et escortés vers leurs lieux de résidence. Lundi soir, après les incidents, une enquête a été ouverte par le Parquet d'Ajaccio du chef de violences aggravées au sein d’une enceinte sportive.

Les dirigeants ajacciens pointent une action "préméditée" des Bordelais

Dans l'entourage des dirigeants de l'AC Ajaccio ont laisse entendre ce mardi matin que l'action des supporters des Girondins de Bordeaux était "préméditée". On pointe surtout du doigt la gestion par les forces de l'ordre de cette séquence autour de la rencontre entre Ajaccio et Bordeaux.

Pour certains dirigeants corses, les services de police étaient "parfaitement au courant" de la présence avant la rencontre des supporters bordelais et n'ont "réalisé aucune action" pour mettre de côté, ou sécuriser, ces supporters interdits de déplacement. Côté ajaccien, on affirme que les fans bordelais ont utilisé la billetterie de l'ACA totalement normalement et qu'il est "impossible" de distinguer un supporter de Bordeaux, d'un supporter lambda ou de l'ACA.

Certains dirigeants de l'ACA laissent aussi entendre que des supporters bordelais avaient des maillots du club corse pour entrer dans les tribunes. Selon nos informations, deux réunions préparatoires au sujet de la sécurité de la rencontre avaient été organisées avant le match. Dans les rangs de la police ajaccienne, la présence des fans bordelais hier à Ajaccio n'était un secret pour personne.

Les dirigeants bordelais ont réagi rapidement et avec fermeté aux incidents qui ont éclaté en tribunes ce lundi soir entre les Girondins et Ajaccio. Les évènements répétés commencent à agacer en interne. Le timing de ces évènements est notamment en cause. "Le contexte fait qu'ils auraient pu protester de manière différente, confie une source proche du club. Quelques mois après Rodez, ça fait beaucoup."

Les ultras bordelais ont bravé plusieurs fois des interdictions de déplacement

Dès l'interruption du match, le board bordelais a échangé pour dégainer rapidement un communiqué de presse et se montrer ferme. Bordeaux condamne le déplacement de cette "minorité" de supporters. Les ultras présents sur place n'avaient malgré tout aucune velléités violentes. Ils ont d'ailleurs plusieurs fois bravé ces interdictions sans aucun acte de violence à Strasbourg en Ligue 1 ou Sochaux le 11 mars dernier. Ils souhaitaient, avec leur présence, protester contre l'interdiction de déplacement émis trois jours avant le coup d'envoi du match.

La plupart des ultras avaient déjà acheté leur billet d'avion et certains étaient même présents en Corse au moment de l'annonce de l'interdiction. Au club, on regrette de ne pas avoir pu organiser un déplacement encadré avec un parcage mais la préfecture de Corse du Sud redoutait un affrontement entre supporters girondins après des tensions survenues lors de la réception de Concarneau il y a une semaine entre les Ultramarines et la North Gate, groupe d'ultras qui s'est installé au virage nord la saison dernière après s'être désolidarisé des UB87. À l'instant où on se parle, il n'y a pas eu d'échange entre la direction bordelaise et ses supporters. À Bordeaux on insiste bien sur l'envie de ne pas se battre, simplement lutter contre l'interdiction de déplacement même si "ce comportement ne reflète en rien la culture des supporters bordelais."

"Notre volonté était claire: assister au match et supporter notre équipe, sans créer de vague"

Ce mardi, le groupe des Ultramarines a publié un long communiqué pour donner sa version des faits sur le déroulé de cette soirée. "En nous rassemblant au stade d'Ajaccio, nous n'avions qu'une volonté: accompagner nos joueurs dans cette rencontre. En France, supporter une équipe de football ne doit pas être un délit. Il y a d'abord eu cet arrêté insensé, pondu quarante-huit heures avant la rencontre", commencent les UB87. Mis sur le fait accompli, nous avions le choix: céder à la peur ou assumer fièrement notre soutien à nos couleurs comme nous l'avions fait par le passé lors de déplacements interdits (Strasbourg, Sochaux...) ou hostiles avec une sécurité minimale (Turquie, Grèce, Kazakhstan...)."

Les supporters l'assurent: ils voulaient "assister au match" et supporter leur équipe, "sans créer de vagues". Mais ils estiment avoir subi des "assauts incessants de supporters corses, essuyé des jets de projectiles nourris ayant provoqué des blessures légères".

S'ils ne veulent pas "pleunicher", les Ultramarines n'ont "agressé ni insulté personne: nous avons pris des coups pour ce que nous sommes: supporters des Girondins, et pour avoir chanté un instant à la gloire de notre club légendaire." Les UB87 ont "amèrement" pris connaissance du communiqué publié par le club, "celui-là même que nous étions venus supporter à grands coûts et pour lequel nous avons pris des coups, qui s'est empressé de nous livrer à la vindicte populaire."

Les deux clubs peuvent-ils être sanctionnés par la Ligue?

En parallèle de la justice, la LFP va ouvrir une procédure après Ajaccio-Bordeaux. Le dossier va être mis en instruction dès mercredi par la commission de discipline de la LFP. Bordeaux risque une fermeture de ses parcages visiteurs pour ses rencontres à l'extérieur. Les deux clubs ne sont pas aidés par leurs précédents cas disciplinaires. L'AC Ajaccio sort d'un huis clos et les Girondins d'un match perdu en fin de saison dernière contre Rodez.

La LFP attend de voir comment Bordeaux va réagir auprès des Ultramarines et quelles mesures vont être prises. Enfin, les identifications des individus impliqués dans cette bagarre seront décisives dans ce dossier.

Article original publié sur RMC Sport