Escrime: Luidgi Midelton, l'or européen à point nommé

Le tireur Luidgi Midelton lors des championnats d'Europe d'escrime, le 20 juin 2024. (OLIVIER CHASSIGNOLE)
Le tireur Luidgi Midelton lors des championnats d'Europe d'escrime, le 20 juin 2024. (OLIVIER CHASSIGNOLE)

L'or est une valeur refuge. Luidgi Midelton en se parant du plus beau métal aux Championnats d'Europe jeudi a conforté une escrime française accablée par les blessures et embourbée dans les polémiques, dans son arme la plus tiraillée, l'épée.

A moins de six semaines des Jeux olympiques de Paris, c'est le moins renommé des trois titulaires de la sélection contestée de l'épée qui a apporté sa première médaille d'or de la semaine au clan français.

Le tireur de 25 ans, qui disputait son premier grand championnat, a changé de dimension au meilleur moment. Pour conquérir sa couronne européenne, il est venu à bout de rien moins que le vice-champion olympique en titre et N.2 mondial hongrois Gergely Siklosi (15-13) en finale dans la Halle Saint-Jacques.

"Il est sur une grosse saison en ce moment, observe le manager général de l'épée Gauthier Grumier. C'est une belle joie pour lui et pour l'ensemble du collectif de l'Insep (le centre fédéral du haut niveau, NDLR)."

Implacable par sa maîtrise tout au long de la journée, Midelton a écoeuré en demi-finale (15-7) le Suisse Ian Hauri. Ce même tireur local tombeur en seizième de finale du champion olympique de Tokyo Romain Cannone, parti de l'Insep depuis sa fronde, aux côtés de Yannick Borel et Alexandre Bardenet, contre la Fédération, déclenchée par un conflit avec Hugues Obry.

Ysaora Thibus étant par ailleurs victime d'une lésion ligamentaire à un genou, Yannick Borel ayant déclaré forfait à la dernière minute en raison d'une gêne musculaire à un ischio-jambier, comme Sara Balzer touchée par une douleur dorsale, le premier titre français n'est pas venu d'un grand nom.

A l'image de ces championnats d'Europe où ce sont les seconds rôles français qui occupent le haut de l'affiche. En témoignent le bronze de Maxime Pauty au fleuret, de Jean-Philippe Patrice au sabre et l'argent d'Auriane Mallo-Breton à l'épée.

Le Guadeloupéen apporte aussi du crédit à sa sélection en tant que titulaire aux JO dans une arme où l'absence d'Alexandre Bardenet a créé la polémique et provoqué un recours de sa part devant la conférence des conciliateurs du comité olympique français (CNOSF).

- "Le profil pour gagner les Jeux" ? -

Midelton, qui a commencé l'escrime par hasard parce que le club de Pointe-à-Pitre faisait face à la salle de fitness que fréquentait sa mère, était un protégé de Hugues Obry.

Sa démission fin février de son poste de manager général de l'épée hommes, à la suite de la fronde du trio Romain Cannone, Yannick Borel et Alexandre Bardenet, a affecté le grand gabarit (1,93 m).

"Lulu" Midelton a signé son premier grand résultat, sa victoire en Coupe du monde à Vancouver en décembre au Canada sous le magister d'Obry.

"Il m'a beaucoup aidé à mieux comprendre mon esprit et à mieux gérer mes matchs sur le plan tactique. Sa vision de l’escrime me parle", lui avait-il rendu hommage le mois dernier devant la presse.

L'éclosion de Midelton est aussi opportune que tardive. "On s'est arrachés les cheveux pour qu'il adhère", décrit Gauthier Grumier.

"Cette patience m'a permis d'atteindre ce niveaux-là, savoure enfin Midelton, et d'être champion d'Europe aujourd'hui."

Avant de devenir champion olympique ? "Je suis un mec des statistiques, analyse Gauthier Grumier. Le dernier épéiste de plus de 30 ans à gagner les Jeux, c'est Pavel Kolobkov en 2000. (...) D'après moi, le profil du gars qui peut gagner les Jeux, il a moins de 30 ans. Il n'est pas forcément dans les radars parce qu'il va être inattendu ce jour-là". Comme Romain Cannone à Tokyo.

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