Soutenu par Donald Trump aux États-Unis, ce sulfureux footballeur chamboule les midterms

Fervent soutien de Donald Trump, Herschel Walker vise le poste de sénateur en Géorgie, un État qui pourrait être décisif durant les prochaines « midterms ». Mais sa campagne est parasitée par des affaires incessantes ainsi que par le passé pour le moins tortueux de l’ancienne star du football américain (photo d’archive prise durant un meeting en septembre 2021 à Perry).

ÉTATS-UNIS - « Donald Trump a montré que l’on pouvait fixer la barre très bas. Avec Herschel Walker, la question est de savoir s’il reste encore une barre ». Cette phrase, c’est une grande connaisseuse de la vie politique américaine et de l’ancien président des États-Unis qui l’a prononcée : Maggie Haberman, fine plume du New York Times. Le 5 octobre, sur le plateau de la chaîne MSNBC, la journaliste était invitée à se prononcer sur une personnalité qui enflamme la campagne des midterms, un ancien footballeur englué dans les affaires, et malgré tout candidat soutenu par Donald Trump dans un scrutin clé.

Herschel Walker est en lice pour l’un des deux postes de sénateur de Géorgie, opposé au sortant démocrate Raphael Warnock. Or dans un contexte où la majorité de Joe Biden ne tient qu’à un fil au Sénat (les républicains et les démocrates ont 50 élus chacun, et c’est la vice-présidente Kamala Harris qui fait pencher la balance), cette élection est décisive dans un État pouvant basculer d’un côté ou de l’autre le 8 novembre prochain.

Une grande carrière dans le foot US avec déjà Donald Trump

Et c’est bien la raison pour laquelle Herschel Walker fait l’objet d’une telle attention médiatique. Car ne serait-ce que pour son profil et son parcours, l’homme suscite un intérêt certain.

Car au départ, rien ne destinait cet homme d’aujourd’hui 60 ans à se lancer en politique : ce qui lui a permis de se faire un nom, ce sont ses qualités athlétiques. Au début des années 1980, Herschel Walker est effectivement la star de l’équipe de football américain de l’université de Géorgie, l’une des plus réputées du pays. Durant son cursus, il figure parmi les meilleurs joueurs du pays, et est même élu numéro 1 en 1982.

Le point de départ d’une carrière qui le verra notamment défendre les couleurs de Cowboys de Dallas, l’équipe chérie de l’Amérique, ou celles des New Jersey Generals dans un championnat de seconde zone, un club détenu à l’époque par un certain… Donald Trump. En parallèle, il ira aussi aux Jeux olympiques d’hiver d’Albertville en 1992 pour décrocher une septième place en bobsleigh et remportera quelques combats d’arts martiaux.

En 1984, Donald Trump était président des New Jersey Generals, une équipe de football américain dont la star était Herschel Walker.
Bettmann Archive / Getty Images En 1984, Donald Trump était président des New Jersey Generals, une équipe de football américain dont la star était Herschel Walker.

Mais depuis la fin de son parcours sportif, c’est surtout pour ses dérapages et affabulations en tout genre qu’Herschel Walker fait parler de lui. En vrac, ces dernières années, il a par exemple affirmé à tort avoir été un agent du FBI, avoir terminé parmi les meilleurs 1% de sa classe à l’université alors qu’il n’a même pas obtenu son diplôme ou encore assuré détenir un produit approuvé par les autorités sanitaires américaines qui serait à même de détruire le Covid chez une personne infectée.

Et cela sans même évoquer ses différents échecs dans les affaires et autres succès largement surestimés par ses soins. Une accumulation dont s’est récemment amusé le célèbre présentateur télé Stephen Colbert, qui a tweeté : « Dans deux semaines, on va apprendre qu’Herschel Walker n’a en fait jamais été joueur de football. »

Violences conjugales et avortement

Dans sa vie personnelle ensuite, Herschel Walker a été accusé de violences conjugales par la femme dont il a partagé la vie pendant 20 ans, jusqu’à un divorce au début des années 2000. Dans un spot de campagne, l’intéressée le décrit par exemple comme ayant pointé une arme à feu sur sa tempe en lui expliquant être prêt à « lui faire sauter la cervelle ». Des accusations corroborées par leur fils, qui a de son côté relaté des menaces au couteau et un harcèlement répété l’ayant conduit à déménager à de nombreuses reprises avec sa mère. Des événements dont Herschel Walker a fait un argument de campagne, expliquant être un exemple à suivre de personne ayant surmonté des problèmes de santé mentale.

Sauf que l’homme a aussi été épinglé au fur et à mesure des années, notamment par le média The Daily Beast, au sujet d’enfants dont il est le père, mais qu’il n’avait alors pas reconnus. Après avoir menti sur leur existence, sa dernière ligne de défense est de dire qu’il n’avait jamais admis être le père de ces enfants de façon à les protéger de l’attention médiatique.

Ultime épisode en date : une femme explique désormais qu’Herschel Walker, qui se présente comme un conservateur opposé à l’avortement, l’a payée pour qu’elle avorte de leur enfant à naître. Après avoir d’abord crié au mensonge et assuré qu’il ne connaissait pas cette femme, il a fini par se retrouver face à des preuves concrètes parmi lesquelles un chèque signé de sa main. Et dans une nouvelle salve de révélations publiées le 5 octobre au soir, on apprend même que cette femme est tout sauf une inconnue puisqu’elle est la mère d’un des enfants qu’Herschel Walker a finis par reconnaître.

Toujours dans la course pour le Sénat

Un pedigree qui n’empêche pas l’ancien footballeur de demeurer parmi les têtes d’affiche du mouvement réactionnaire sur lequel Donald Trump compte s’appuyer pour faire son retour à la Maison Blanche en 2024. Lorsqu’il était président, c’est effectivement le milliardaire qui a poussé Herschel Walker à franchir le pas pour passer de simple soutien du parti républicain à responsable politique. Et après l’avoir nommé au Conseil des Sports et de la Nutrition, Donald Trump l’a fortement encouragé à concourir pour le poste de sénateur.

Après lui avoir un poste de conseiller aux Sports, Donald Trump a beaucoup insisté auprès d’Herschel Walker pour le pousser à viser le poste de sénateur de Géorgie. Et ne cesse depuis de le défendre (photo d’archive prise en septembre 2021 en Géorgie).

« Donald Trump pense que parce que lui a survécu à un certain nombre de scandales en 2016, il a ouvert la voie à d’autres politiciens et leur a montré qu’ils n’ont plus à s’inquiéter de ces affaires », décrit ainsi Maggie Haberman sur MSNBC. « Avec Herschel Walker, ça va encore plus loin que l’enregistrement (où Trump parlait ’d’attraper les femmes par la chatte’, ndlr) : on a des preuves tangibles. Et on va donc savoir si les règles du jeu ont changé au point que des personnalités politiques survivent désormais à de tels scandales. »

Et pour cause : dans les sondages réalisés juste avant l’affaire de l’avortement payé, Herschel Walker se maintient à un niveau largement concurrentiel pour la course au Sénat. Donné avec entre 4 et 12 points de retard sur son adversaire démocrate selon les enquêtes, il est impossible de l’écarter totalement, surtout si l’on considère le passif compliqué des sondeurs avec l’électorat trumpiste.

Et cela même si « Herschel Walker a plus de squelettes dans son placard qu’il y en a dans un cimetière », comme l’image l’analyste conservateur Rick Wilson. Car la « Géorgie reste un État rouge (républicain, ndlr) », ajoute-t-il. Tant et si bien que dans un parti républicain noyauté par Donald Trump et ses soutiens, Herschel Walker apparaît encore comme un potentiel sénateur. Ce qu’a récemment résumé une polémiste trumpiste, Dana Loesch : « Je me ficherais même qu’il finance des avortements de bébés aigles en voie de disparition. Je veux juste le contrôle du Sénat. » Le ton des midterms est donné.

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