Shinzo Abe, les énigmes d'un meurtre en direct

L’assassinat de l’ancien Premier ministre japonais suscite une immense émotion dans un pays où le taux d’homicide est l’un des plus bas du monde.

Tout le week-end, à Nara, ancienne cité impériale et cœur du Japon ancestral, des milliers de quidams éplorés sont venus déposer qui des lys blancs, qui de la bonite séchée, qui de la pastèque sur les lieux où Shinzo Abe , Premier ministre du Japon de 2006 à 2007 et de 2012 à 2020, a été assassiné, à 67 ans. Des offrandes pour aider l’âme du défunt à se défaire de son corps, comme un serpent de sa mue, et à rejoindre ses ancêtres dans l’autre monde. Et, peut-être, qui sait, à atteindre le Takama-ga-hara, la «haute plaine du paradis», résidence des dieux immortels dans le shintoïsme, la religion dominante au Japon.

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La stupeur et une immense tristesse se sont emparées de l’archipel après le meurtre de celui qui, avec les empereurs Akihito et Naruhito, a incarné le pays pendant une décennie. À Nagoya, où se tient en ce moment l’un des six «honbasho» – tournois de sumo – de l’année, on a aperçu des demi-dieux d’un quintal et demi à deux quintaux écraser une larme. À Tokyo, où le masque trois plis est encore porté par tous, difficile de voir poindre une émotion pourtant bien réelle. «Nous sommes tous bouleversés», reconnaît Aya Takahashi, jeune cheffe de cuisine dans le quartier d’Iidabashi. «C’était, dit-elle, un personnage clivant, très conservateur. Mais il faisait partie de nos vies depuis si longtemps…» Dans un pays marqué par une instabilité politique chronique, des scandales de mœurs et de concussion, des jeux d’ombres alambiqués provoquant démissions fracassantes et crises de leadership, il avait réussi à imposer la stabilité et la longévité politiques.

Souvent aperçu se promenant en compagnie de sa femme, Akie, avec qui(...)


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