Le sexisme de Berlusconi avait fait se lever les femmes italiennes bien avant #MeToo

ITALIE - « Il Cavaliere » savait faire se lever les troupes, même à son encontre. Silvio Berlusconi, mort ce lundi 12 juin des suites d’une maladie, était connu pour sa carrière de Premier ministre, son empire médiatique mais aussi pour son machisme. Et ses comportements sexistes avaient déclenché une vague de protestation féministe en Italie bien avant l’ère #MeToo.

L’un des premiers événements marquants qui a valu à l’homme d’État la colère des Italiennes remonte au 7 octobre 2009. Invité par téléphone à l’émission télévisée Porta a Porta sur la chaîne publique Reina 1, Berlusconi avait fait une remarque sexiste à une députée, comme on l’entend dans la vidéo en tête d’article.

Parlant de Rosy Bindi, présente sur le plateau, il avait dit en direct : « elle est toujours plus belle qu’intelligente » Le présentateur, visiblement surpris, avait tenté de calmer le jeu « Je vous en prie, Monsieur le Premier ministre ».

Une phrase devenue célèbre

Mais ce dernier a poursuivi « Je suis fatigué d’être courtois avec des personnes qui sont toujours discourtoises à mon égard », interrompant Rosy Bindi qui répétait « Monsieur le Premier ministre ». Lorsqu’elle a enfin pu parler, la députée de gauche a répondu du tac au tac : « Je suis une femme qui n’est pas à votre disposition ».

Sa réponse est devenue un slogan pour des milliers de femmes, et Rosy Bindi une icône des féministes. La phrase a été imprimée sur des pancartes, des t-shirts, et même sur un dessin de Quino, qui l’a fait dire à son héroïne Mafalda dans les pages du journal La Repubblica.

Quelques jours après la sortie sexiste de Berlusconi à la télé, le quotidien de gauche a publié une pétition signée par près de 100 000 femmes, titrée « Cet homme nous offense, arrêtons-le ».

Défendre « la dignité de la femme »

L’année suivante, le « Rubygate » provoquait un soulèvement des femmes encore plus important. L’affaire de prostitution de mineure de Berlusconi lors de ses soirées « bunga-bunga » avait choqué le pays et abîmé l’image de la femme italienne selon une partie de la population.

En 2010 et 2011, des manifestations avaient pris place aux quatre coins de l’Italie pour « défendre la dignité des femmes » et s’opposer au chef d’État. Des messages avaient été lus pendant ces rassemblements, comme le rapportait l’AFP à l’époque : « Je ne supporte plus d’avoir honte de mon pays » ou encore « je vais devenir folle si j’entends encore dire que les femmes servent à détendre les hommes ».

Si le scandale du « Rubygate » a écorné la fin de carrière politique de Berlusconi, les chaînes télé de son groupe Mediaset, dont Canale 5, restent encore aujourd’hui un exemple de sexisme. Les « velines » — des jeunes femmes dont le rôle est de faire monter l’audimat — ouvrent toujours l’émission populaire « Striscia la notizia » en dansant en petite tenue en 2023. #MeToo est pourtant cette fois passé par là.

À voir également sur Le HuffPost :

Quand Berlusconi lançait La Cinq à la télé française, avec Patrick Sébastien et des pubs au milieu des films

Silvio Berlusconi, un pionnier du foot moderne, de l’AC Milan à Monza