"S’il dit ça, c’est qu’il sait, il n’a pas inventé", juge Pineau après les attaques de Lefevere sur les excès d'Alaphilippe

De la maladresse mais pas du harcèlement. Jérôme Pineau tempère les accusations de Pascal Chanteur, président du syndicat des coureurs professionnels, contre Patrick Lefevere après ses propos très durs contre Julian Alaphilippe. "Julian est un bon gars", a-t-il lancé dans le magazine flamand Humo. "Mais après avoir signé son méga contrat, on ne l’a plus vu. Je pense que chez lui, il y a eu trop de fêtes et trop d’alcool. Julian est sous la coupe de Marion (Rousse, sa compagne, ndlr)."

"L’Australie en été après la course, c’est souvent la fête, ce n’est peut-être pas le meilleur endroit pour envoyer Julian"

"Je n'irais pas dire que c'est du harcèlement, c'est de la maladresse", explique Pineau à RMC Sport. "C'est du Patrick Lefevere dans le texte, un management à l'ancienne. Il a tendance à piquer, à secouer ses coureurs par voie de presse interposée, ça a toujours été le cas avec Boonen, Devolder ou Bettini, tous ces champions passés par son équipe. Je pense que Julian n'a été surpris qu'il tienne ses propos-là, je suis à peu près sûr qu’il les lui avait déjà dits." L’ancien coureur désormais membre de la Dream Team RMC voit cette sortie comme "un excès de mauvaise humeur" d’un dirigeant un peu "soupe au lait".

"Il va un peu trop loin quand il parle de Marion et de leur vie de couple", estime-t-il. "Il a donné des consignes, il attend beaucoup de son coureur et a eu de nombreuses discussions." Pour Pineau, les attaques de Lefevere sur les excès d’Alaphilippe ne sont pas le fruit du hasard. "Voir des coureurs faire des soirées, ça arrive", témoigne-t-il. "Je pense que Patrick était surtout excédé de ne plus avoir les résultats d’avant avec Julian qui est un coureur qui lui coûte cher. (…) Il a peut-être eu des échos du début de saison de Julian. Quand on est manager d’une grande équipe et qu’on se plaint que son leader est un peu festif, on évite de l’envoyer dans une compétition à l’autre bout du monde en début de saison (le Tour Down Under en Australie, NDLR) où c’est beaucoup la fête. L’Australie en été après la course, c’est souvent la fête, ce n’est peut-être pas le meilleur endroit pour envoyer Julian."

Jérôme Pineau connaît bien la manière de fonctionner de Patrick Lefevere pour lequel il a couru pendant cinq ans sous les couleurs de Quick Step (2009-2013). "C’est le meilleur manager que j’ai eu et je pense qu’il sera inégalé", ajoute l’ancien manager de la formation B&B Hotels. A ce titre, il imagine bien les dessous d’une telle prise de parole de la part de ce dinosaure du monde du cyclisme.

"S’il dit ça, c’est qu’il sait, il a eu écho, il a vu", explique-t-il. "Il n’a pas inventé."

"Il ne doit pas attaquer par voie de presse son coureur là-dessus et sur sa vie de couple. Mais tout ce qu’il a dit, il ne l’a pas sorti du chapeau, il sait de quoi il parle. Quand il a accusé Tom (Boonen) de trop faire la fête et d’avoir de mauvaises fréquentations - ce qui l’a amené à avoir des contrôles positifs à la cocaïne - il savait de quoi il parlait. Il connaît tout le monde, il sait tout. Quand il parle de ça, il sait de quoi il parle mais il n’a pas le droit de le dire par voie de presse, ça choque. Lui, il n’en a plus rien à foutre de choquer, ça l’amuse beaucoup. Je dirais juste à Julian: ‘montre-lui qu’il se trompe, que tu n’es pas fini, que tu sais faire le métier’. Il n’a pas le choix que d’être à 100%."

Croit-il à un électrochoc pour Alaphilippe après cette nouvelle salve de critiques? "Je ne sais pas", répond-il. "Je connais aussi l’animal, il fait partie de la caste des supers exceptionnels. N’allons pas croire que Julian ne roule pas, se bourre la gueule à la maison et gagne les championnats du monde, ce n’est pas possible. Il est très pro 95% de l’année. Mais les 5% restants quand ça se passe en compétition ou quand il ne faut pas, ça choque son patron. Julian sait ce qu’il a à faire: s’il veut rester dans l’équipe, il doit gagner des courses. S’il veut rester une idole du monde dans les yeux de son épouse, de son fils et de ses supporteurs, il doit continuer à faire le métier. Marion a une vie très saine et c’est très bien pour Julian. S’il veut rester à ce niveau sportif et salarial, il n’a pas le choix que d’être un champion."

Article original publié sur RMC Sport