Séquestration de Paul Pogba: le footballeur assure aux suspects qu'ils gardent "une place dans son coeur"
L'amitié a ses raisons que la raison ignore? Lors d'une récente confrontation, l'international français Paul Pogba a assuré à ses proches, soupçonnés d'avoir joué un rôle dans sa séquestration en mars 2022, qu'ils auraient "toujours une place dans son coeur". "J'avais énormément d'estime pour toutes les personnes qui sont ici, c'était comme ma famille", déclare le footballeur devant les deux juges d'instruction qui organisaient cette confrontation, le 15 septembre au tribunal de Paris. "La vérité sortira. (...) Malgré tout ce qui s'est passé, ils auront toujours une place dans mon coeur", insiste le champion du monde, d'après des éléments judiciaires dont l'AFP a eu connaissance. Des mots en écho aux déclarations des suspects, amis d'enfance ou vieilles connaissances du joueur: Boubacar C. a "mal au coeur" à l'idée que Pogba puisse "penser (qu'il a) voulu lui faire du mal"; Machikour K. est "blessé au plus profond"; Mamadou M. affirme avoir toujours "voulu le protéger"...
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Depuis septembre 2022, deux magistrates enquêtent sur l'incroyable séquestration de Pogba le 19 mars 2022, en banlieue parisienne, lors de laquelle deux braqueurs non identifiés lui ont réclamé 13 millions d'euros. Cinq de ses proches sont mis en examen pour extorsion commise avec arme et séquestration en bande organisée. Ces hommes, âgés de 29 à 38 ans, sont également poursuivis pour association de malfaiteurs criminelle. Mais tous nient, se présentant comme des "victimes" des braqueurs et affirmant avoir eux mêmes été agressés car Pogba refusait de payer. Le frère de Paul, Mathias, également mis en examen mais absent la nuit de la séquestration, n'était pas convoqué à la confrontation.
"Le retourner contre nous"
Lors de la confrontation, les magistrates cherchent d'abord à clarifier leurs relations financières. Le footballeur explique aider "volontairement" ses proches, mais avoir refusé, en septembre 2021, de donner sept millions d'euros à trois d'entre eux. Ces derniers démentent vigoureusement avoir quémandé une telle somme. "Je leur ai dit que c'était trop", poursuit Pogba, mais que "je pouvais les aider autrement et je leur ai passé du cash": entre 15.000 et 20.000 euros pour chacun.
Le footballeur explique aussi avoir pris "ses distances" avec ses amis, avant la séquestration. Un recul a priori non perçu par ses proches: un seul confirme qu'il "avait coupé les ponts". D'après une synthèse policière dont l'AFP a eu connaissance, rédigée avant la confrontation, les cinq constituent "une équipe criminelle (...) ayant pour objectif de soutirer 13 millions d'euros à Paul, lequel avait coupé les vivres en début d'année". Voulaient-ils profiter de la venue de Pogba en France pour "organiser une rencontre tous ensemble", demandent les juges? Tous assurent que non. Cette nuit-là, après un dîner chez l'un de ses camarades, Pogba raconte qu'un "grand frère" de son quartier, Roushdane K., lui a intimé de les suivre dans un autre appartement. Là, Pogba dit avoir été l'objet d'une salve de critiques de la part de ses proches, qui lui reprochaient de ne plus les soutenir assez financièrement. Puis Roushdane K. aurait demandé à certains de sortir. Seul lui et Adama C., un ami d'enfance de Paul, sont restés. Deux braqueurs, armés de fusils d'assaut, ont alors fait irruption dans le salon. Pogba avait notamment évoqué "des signes de connivence" entre Roushdane K. et ces braqueurs, lors de ses auditions. "En tous cas ils se parlaient", semble-t-il nuancer le 15 septembre.
Roushdane K. nie fermement avoir su quoi que ce soit des braqueurs. Une version qu'Adama C. confirme. Pourquoi alors Roushdane K. leur a-t-il assuré que Pogba paierait les 13 millions d'euros? "Pour ne pas que ça dégénère", estime Adama C, actuellement en détention provisoire. "Paul est très mal conseillé car ce n'est pas la première fois qu'on essaie de le retourner contre nous", considère Adama C. "Avez-vous revu les individus armés?", demandent les juges à Roushdane K. "J'ai vu des gens après, mais je ne peux pas vous dire si ce sont les mêmes. (...) C'est eux qui ont pris contact avec moi", affirme le suspect lui aussi en détention provisoire.