Le Roland-Garros le plus fou de l'histoire? Pourquoi le tableau masculin s’annonce plus ouvert que jamais

Va-t-on assister au Roland-Garros le plus indécis de ces dernières années? Pendant que l’ambiance monte dans les allées Porte d’Auteuil à l’occasion de l’Opening Week, les paris pour désigner le vainqueur du deuxième Grand Chelem de la saison vont bon train. Si chez les femmes, la numéro une mondiale et double tenante du titre Iga Swiatek fait figure d'immense favorite après ses titres à Madrid et Rome, les maux de tête s’enchaînent pour tenter de sortir un nom dans le tableau messieurs, qui pourrait être l’un des plus ouverts depuis le début de la domination de Rafael Nadal il y a 19 ans.

Des monuments en méforme

Absent la saison dernière pour la première fois depuis 2005, année du premier de ses 14 titres sur la terre battue parisienne, Rafael Nadal s’avance dans l’inconnu au moment de revenir “chez lui”. Depuis son sacre en 2022, l’Espagnol enchaîne les blessures et les interrogations subsistent quant à son état physique. Depuis le début de saison sur terre, il a enchaîné deux matchs à Barcelone, quatre à Madrid et deux à Rome, où il a été sèchement battu par le Polonais Hubert Hurkacz (n°8 à l’ATP).

Mais à bientôt 38 ans, Rafael Nadal sera-t-il encore dans le tableau en huitièmes de finale le 3 juin pour fêter, comme à son habitude, son anniversaire du côté de la Porte d'Auteuil?

"Cela va de mieux en mieux, sur le plan physique comme sur le plan du tennis", avait assuré le Majorquin avant son entrée en lice à Rome.

"Je n'ai pas assez joué ces trois dernières années, il y a beaucoup de doutes, beaucoup de questions", expliquait-il après sa défaite au Foro Italico la semaine passée.

Des doutes, Novak Djokovic en a aussi plein la tête. Vainqueur de la Coupe des Mousquetaires l’an dernier, le Serbe connaît son pire début de saison depuis 2018, puisqu’il n’a remporté aucun tournoi cette année. L’homme aux 24 Majeurs, qui a fait un grand ménage dans son staff ces dernières semaines, s’est dit “complètement à côté de la plaque” après sa défaite dès le 2e tour à Rome. La faute, sans doute, à la gourde qu’il a reçue accidentellement sur la tête la veille de son élimination. Preuve de son manque de confiance, le numéro un mondial s’est inscrit à la dernière minute au tournoi de Genève (ATP 250) pour prendre un maximum de repères avant de défendre sa couronne.

La Next Gen touchée par les blessures

Vainqueur de son premier Grand Chelem à Melbourne en janvier dans un début de saison parfait qui l’a fait grimper à la deuxième place mondiale, Jannik Sinner a été coupé dans son élan à Madrid en raison d’une blessure à la hanche. Après son abandon avant son quart de finale dans la capitale espagnole, il a renoncé au Masters 1000 romain où il a prévenu: "Je disputerai Roland-Garros si et seulement si je suis à 100%." Depuis, il a repris l'entraînement à Monaco, comme en attestent des photos publiées sur les réseaux sociaux qui ne présument pas de son état de forme.

Double vainqueur de Grand Chelem (US Open 2022 et Wimbledon 2023), Carlos Alcaraz se bat avec une douleur à l’avant-bras depuis son succès au Masters 1000 d’Indian Wells. Forfait à Monte-Carlo et Barcelone, l’ancien numéro un mondial a rejoué à Madrid (battu en quart par le futur gagnant Andrey Rublev) mais a préféré zapper Rome pour favoriser le repos “et bien récupérer pour pouvoir jouer sans aucune douleur”.

Une porte ouverte pour les outsiders?

Le tableau s’annonce d’autant plus ouvert que les cinq Masters 1000 disputés depuis le début de l’année ont livré cinq vainqueurs différents (Alcaraz à Indian Wells, Sinner à Miami, Tsitsipas à Monte-Carlo, Rublev à Madrid et Zverev à Rome).

Finaliste malheureux face à Djokovic en 2021 Porte d’Auteuil, Stefanos Tsitsipas avait bien débuté la saison sur terre battue, avec son sacre à Monte-Carlo et une finale à Barcelone. Mais au milieu de ses problèmes sentimentaux, le Grec a été moins en réussite le mois dernier (2e tour à Madrid, quart à Rome). Un parcours sensiblement égal à celui de Casper Ruud, titré à Barcelone, finaliste à Monaco et disparu des radars dès le 2e tour dans la capitale italienne. Double finaliste en titre Porte d’Auteuil, le Norvégien peut enfin passer un cap cette année, tout comme Alexander Zverev.

Deux ans après sa terrible blessure à la cheville en demi-finale face à Nadal, l’Allemand a retrouvé des couleurs et les hauteurs du classement ATP (n°4) après son titre à Rome, où il s’est déjà projeté sur le Grand Chelem parisien. "Je peux rêver à nouveau. Quand je joue bien, je peux battre n'importe qui. J'espère juste qu'à Roland-Garros je serai dans la même forme qu'ici", a-t-il confié après sa victoire face à Nicolas Jarry.

Quel état de forme pour les Russes?

Jamais très à l’aise sur la terre battue, même s’il ressent des progrès dans son jeu, Daniil Medvedev devra surpasser sa haine de la saleté pour enfin réussir dans un tournoi où il n’a passé que deux fois le premier tour en sept participations. Capable de triompher sur la surface, comme il l’a fait à Rome l’an dernier, le joueur de 28 ans n’a pas encore gagné de titre en 2024, malgré deux finales à Melbourne et Indian Wells.

Au contraire de son grand ami Andrey Rublev. Sacré à Madrid à la surprise générale après une terrible série d’une seule victoire entre Miami et Barcelone, le 6e joueur mondial a vécu un tournoi galère en Espagne malgré la victoire, à cause de soucis de santé. “Je dirais que c’est le titre dont je suis le plus fier de ma carrière. J’étais presque mort tous les jours, je ne dormais pas la nuit. Les trois ou quatre derniers jours, je n’ai pas dormi. Je n’étais pas loin de me retirer du tournoi, parce qu’il y a eu quelques problèmes que je ne pouvais pas régler. Je dois féliciter les médecins, ils sont magiques. Ce sont les meilleurs du circuit. Et j’ai gagné le tournoi grâce aux anti-inflammatoires pendant le match qui m’ont permis de tenir trois heures”, avouait-il. Éliminé par la surprise Alexandre Müller dès le 3e tour à Rome, Rublev est en quête de confirmation dans un tournoi où il n'a jamais dépassé les quarts de finale (2020, 2022).

Et si c'était l'année des Français?

41 ans que la France attend un vainqueur dans le tableau messieurs. Depuis le 5 juin 1983 et le triomphe de Yannick Noah, beaucoup s'y sont essayés, tous se sont cassés les dents. Alors que la terre battue de Roland-Garros se refuse aux Tricolores, la tendance semble difficilement inversable.

Titré sur le Challenger de Bordeaux le week-end dernier, Arthur Fils va aborder pour la première fois un tournoi du Grand Chelem dans la peau d'une tête de série. L'occasion parfaite pour passer quelques tours? Meilleur Français au classement ATP (et meilleure chance française), Ugo Humbert (n°17) tentera de retrouver des sensations à Lyon après avoir déclaré forfait à Rome à cause d'un genou douloureux.

Derrière, les autres Français partent de loin. Pendant qu'Adrian Mannarino continue de clamer son désamour pour la surface, Gaël Monfils reste sur deux éliminations au premier tour à Madrid et Rome, tandis qu'Arthur Cazaux a repris l'entraînement après sa blessure à une cheville.

Article original publié sur RMC Sport