Qu’est-ce que la matière et l’énergie noires, ces mystères de l’Univers que doit percer le satellite Euclid ?

ESPACE - Lorsque l’on pense à notre univers, on voit surtout les planètes, les étoiles, les galaxies et ce qui les composent, nous compris. Mais tout ceci, ce que les scientifiques appellent « matière ordinaire », ne représente en réalité que 5% de notre univers. Le reste se compose de ce que l’on nomme mystérieusement la « matière noire » et « l’énergie noire ». On ignore presque tout à propos de ces deux obscures composantes, c’est pour cette raison que l’Agence spatiale européenne (ESA) envoie le satellite Euclid dans l’espace, ce samedi 1er juillet. Sa mission consistera à percer les secrets entourant la matière et l’énergie noires, comme vous pouvez les voir dans la vidéo en tête de l’article.

Qu’est-ce que la matière noire ?

Avant d’aller plus loin dans la mission d’Euclid, il faut comprendre ce que sont la matière et l’énergie noire. Pour cela, il faut se pencher à nouveau sur ses cours de physique-chimie de 3e et revenir aux règles de bases de la gravitation : à partir du moment où un objet a une masse, il influence le mouvement des autres objets.

Mais dans les années 1930, l’astronome suisse Fritz Zwicky, observe l’amas de galaxies de Coma et émet l’hypothèse qu’une partie importante de sa masse est invisible. « Il a observé les vitesses des galaxies les unes par rapport aux autres et il a calculé la masse qu’il fallait pour contenir cet amas de galaxies entier» étant donnée leur vitesse de mouvement. « Il a alors trouvé qu’une très grande masse était nécessaire pour les retenir. Une masse bien plus importante que celle de la matière ordinaire observée », détaille au HuffPost, l’astrophysicienne Françoise Combes.

Cette matière invisible qui agit sur la vitesse des galaxies, Fritz Zwicky la nomme « matière noire », car elle n’émet ni ne reflète de lumière. À l’époque, cette théorie ne convainc pas ses confrères. Elle est alors mise de côté jusque dans les années 1970, lorsque d’autres astronomes, notamment Vera Rubin, affinent ses observations et parviennent à la même conclusion. Bien que nous ne sachions toujours pas ce qui constitue cette matière noire, cette théorie fait aujourd’hui consensus parmi les scientifiques qui considèrent qu’elle composerait environ 25% de notre univers.

Qu’est-ce que l’énergie noire ?

Attention, comme son nom ne l’indique pas, l’énergie noire n’a rien à voir avec la matière noire, hormis le mystère qui les entoure. À la fin des années 1990, les astronomes ont détecté une nouvelle anomalie, à l’échelle cette fois de l’Univers tout entier. On le savait depuis longtemps, les galaxies s’éloignent les uns des autres, ce qui a débouché sur l’idée d’un « big bang » originel.

Mais l’on s’est aperçu, à rebours de toute les prévisions, que les galaxies s’éloignent les unes des autres de plus en plus rapidement ! L’univers « gonfle », et de plus en plus vite sans que l’on sache quelle force le repousse. C’est cette force répulsive que l’on appelle énergie sombre, ou énergie noire.

L’accélération de l’expansion de l’Univers aurait démarré il y a six milliards d’années. En remontant à 10 milliards d’années, Euclid pourrait observer les premiers effets de l’énergie sombre et mieux l’identifier, espèrent ses concepteurs.

Comment Euclid va-t-il les détecter ?

La caractéristique partagée de la matière comme de l’énergie noire reste que ce sont des composants agissant dans l’univers, mais totalement invisible pour nos instruments de mesure. Alors comment Euclid va-t-il les détecter ? En ce qui concerne la matière noire, cela va être effectué par ce qu’on appelle un effet de lentille gravitationnelle.

« Lorsqu’on met par exemple, un tesson de bouteille entre un paysage et nous, on voit que le paysage est déformé. Et bien là c’est pareil : entre les galaxies lointaines et nous, vous avez beaucoup de matière noire, or la lumière est déviée par la gravité de cette matière. On ne la voit pas à proprement parler mais on voit la déviation. Ces galaxies sont alors déformées », explique Françoise Combes.

Quant à l’énergie noire, la mission principale d’Euclid étant de cartographier un tiers du ciel sur 10 milliards d’années d’histoire cosmique, elle pourrait bien finir par se montrer. Le satellite pourra analyser d’une part les distorsions provoquées par la matière noire à travers le temps ; mais aussi à quelle vitesse l’Univers s’est étendu et ainsi déterminer les effets de l’énergie noire sur les variations de l’accélération cosmique.

Il faudra cependant au moins six ans pour que le satellite effectue sa mission. Pendant ce temps, les données seront traitées par le Consortium Euclid, composé de plus de 2000 scientifiques internationaux.

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