Protéger la vie privée des enfants sur les réseaux sociaux : que prévoit ce texte adopté à l’Assemblée

L’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité un texte qui vise à protéger la « vie privée » des enfants sur les réseaux sociaux.
L’Assemblée nationale a adopté à l’unanimité un texte qui vise à protéger la « vie privée » des enfants sur les réseaux sociaux.

RÉSEAUX SOCIAUX - Un premier pas de fait. Les députés ont adopté ce lundi 6 mars 2023 des mesures pour garantir l’intimité des enfants dans l’univers numérique. Le texte vise à les protéger des dérives de certains parents les exposant sans retenue, en particulier sur les réseaux sociaux. La proposition, portée par le député de Renaissance Bruno Studer, a été votée en première lecture à l’unanimité. Elle doit désormais être examinée par le Sénat.

Concrètement, ce texte introduit la notion de « vie privée » de l’enfant dans la définition de l’autorité parentale du Code civil. Il précise que le droit à l’image des mineurs est exercé en commun par les deux parents. En cas de désaccord, le juge pourra interdire à l’un d’eux de publier des images de l’enfant.

Dans des situations graves, la voie est même ouverte « à une délégation forcée de l’autorité parentale », permettant à un juge de confier à un tiers l’exercice du droit à l’image de l’enfant. Cette loi vise à « responsabiliser les parents », mais aussi à montrer aux mineurs que « les parents ne disposent d’un droit absolu sur leur image », a fait valoir Bruno Studer.

De graves dérives

Selon des chiffres cités par les parlementaires, un enfant apparaît en moyenne « sur 1 300 photographies publiées en ligne avant l’âge de 13 ans » et « 50 % des photographies qui s’échangent sur les forums pédopornographiques avaient été initialement publiées par les parents sur leurs réseaux sociaux ».

Des associations dénoncent des dérives, comme celles des « vlogs » familiaux (blogs vidéo) tenus par des parents faisant la course aux « likes » en exposant leurs enfants, en quête pour certains de revenus publicitaires, avec parfois des mises en scène dégradantes.

Certaines images peuvent mener à du « cyberharcèlement » ou « compromettre leur crédibilité pour des candidatures scolaires ou professionnelles » futures, a souligné le ministre de la Justice Éric Dupond-Moretti qui a soutenu le texte « avec force et conviction ».

Un second texte sur la surexposition aux écrans

Les députés ont aussi commencé dans la soirée du lundi 6 mars l’examen d’un second texte, porté par une autre élue du camp présidentiel, Caroline Janvier, pour sensibiliser les adultes aux risques d’une exposition excessive des plus jeunes (jusqu’à 6 ans) aux écrans. Un « mal du siècle encore largement sous-estimé par l’entourage des jeunes enfants » selon la députée.

Sa proposition de loi prévoit d’inclure dans le code de santé publique une formation aux risques pour les professionnels de santé et de la petite enfance, et l’insertion de messages de prévention sur les emballages d’ordinateurs, tablettes et téléphones. Elle prévoit aussi que les structures de la petite enfance et des écoles intègrent des règles restrictives d’utilisation des écrans pour les encadrants.

Pour les parents, le texte demande l’insertion de recommandations sur une bonne utilisation dans le carnet de grossesse. L’excès d’écran est un « phénomène de grande ampleur », avec des « risques accrus d’obésité », de « troubles du sommeil » et « d’hypertension artérielle », a alerté Caroline Janvier.

Des députés LFI et LR ont déploré que les mesures ne soient ciblées que sur les plus jeunes enfants. Des amendements demandant d’interdire les tablettes dans les lieux d’accueil de jeunes enfants ont été repoussés.

« Un arsenal juridique »

Ce texte « permet de sensibiliser encore plus et encore plus tôt enfants et parents, dans les services de Protection maternelle et infantile (PMI), dans les écoles ou maternelles, mais aussi dans les centres aérés ou pendant les activités périscolaires », a estimé la secrétaire d’État chargée de l’Enfance, Charlotte Caubel.

Jeudi 2 mars dernier, c’est vers les plateformes de réseaux sociaux que s’était tournée l’Assemblée en votant en première lecture l’obligation pour TikTok, Snapchat ou encore Instagram, de vérifier l’âge de leurs utilisateurs ainsi que l’accord parental pour l’inscription des moins de 15 ans.

Ces différentes initiatives « constituent un arsenal juridique qui permettra de compléter les dispositifs de protection des enfants en ligne », s’est-elle réjouie.

À voir également sur Le HuffPost :

Violences et inceste : le retrait automatique de l’autorité parentale adopté à l’Assemblée

Palmade, Poupette Kenza, Noël Le Graët… Comment passe-t-on d’un « signalement » à une enquête ?