Propriétaire tué par son rottweiller: comment travaillent les maîtres de chien qui ont capturé l'animal?

C'est un drame pour lequel les maîtres de chiens de la gendarmerie ont dû intervenir. Le 30 décembre 2023, un homme est mort après avoir été attaqué par son chien, un rottweiler, à Tiercé, près d'Angers (Maine-et-Loire), a appris BFMTV.com en début de semaine. L'ami de la victime, présent au moment des faits, a été grièvement blessé.

Attaqués par le rottweiler, les deux hommes se sont réfugiés dans leur véhicule, découvert au petit matin par un habitant de la région. Le propriétaire du chien est décédé des suites de ses blessures et le deuxième homme, mordu au corps et aux jambes, a été grièvement blessé. Mais le promeneur n'a pas pu secourir ce dernier, l'animal, resté à proximité du véhicule, étant menaçant.

"Il a levé brièvement la babine"

Mais avant d'intervenir pour sortir le corps du propriétaire du rottweiler et évacuer le blessé, les forces de l'ordre ont dû faire appel à deux maîtres de chien du Groupement d'intervention cynophile (GIC) de Feneu (Maine-et-Loire), une unité spécialisée qui dépend de la gendarmerie nationale compétente sur plusieurs départements de la région.

Bardés de leur équipement - un lasso pour attraper l'animal, un râteau pour le repousser, ainsi qu'un costume d'homme d'attaque et une manchette pour éviter les morsures -, les deux gendarmes spécialisés se rendent sur les lieux.

"À notre arrivée, le chien était assis à côté du véhicule. On approche d'un pas déterminé, il faut que le chien ait une petite appréhension. En l'occurrence, sur cette intervention, il ne semblait pas agressif à notre vue mais il faut rester extrêmement vigilant", explique l'un des maîtres de chiens.

"L'objectif, c'était de le dégager des abords de la voiture pour que nos collègues puissent intervenir", détaille-t-il. Les deux hommes s'approchent de l'animal et l'isolent d'abord sur un ponton.

"Il a levé brièvement la babine, mais rien de plus, il avait plus une posture de chien apeuré", poursuit le spécialiste.

Une fois sur le ponton, les deux maîtres de chiens passent le lasso pour immobiliser le chien. L'opération s'est déroulée sans accroc et ils ont réussi à l'isoler dans une caisse de transport pour qu’il soit remisé au sein du chenil communal. Il peut être parfois aussi être décidé de faire appel à un vétérinaire, seul personne habilité pour l'administration d'un anesthésiant, si besoin.

Un travail "forcément lié à une procédure judiciaire"

Dans le jargon des maîtres de chiens, on appelle cela une "neutralisation d’un chien, même si le terme plus approprié serait neutralisation d’une situation où un chien est susceptible de mordre", explique notre interlocuteur, ajoutant qu'une situation comme celle-ci, avec cette issue, est très rare.

La capture ou l'immobilisation d'un animal intervient essentiellement lors de perquisitions: "Si on sait que sur place, il y a des chiens susceptibles de gêner la progression de nos camarades, on va intervenir et isoler l'animal pour permettre à nos camarades de travailler sereinement", détaille le spécialiste.

"On n'intervient pas lors de simples divagations de chiens. Dans ces cas-là, ce sont les pompiers ou la commune qui gèrent", précise le maître de chien.

Car le travail des maîtres de chiens est "lié à une procédure judiciaire ou un danger imminent", explique-t-il. Au sein du Groupement d'intervention cynophile (GIC) de Feneu (Maine-et-Loire), ils sont cinq maîtres de chiens et un suppléant.

Sur la région, tous n'ont pas forcément la même spécialité. Il y a les chiens spécialisés dans la recherche de Stupéfiants, d'armes, de munitions et de billets de banque (SAMBI), mobilisés notamment pendant les perquisitions ou lors de contrôles routiers. D'autres canidés, eux, sont dédiés à la recherche de produits accélérateurs d’incendie (RPAI).

"On les mobilise par exemple sur le lieu d'un incendie pour tenter de trouver un produit qui prouverait que le feu a été déclenché volontairement", explique le maître de chien.

Les chiens sont parfois utilisés par les équipes cynophiles du Peloton de surveillance et d'intervention de la gendarmerie (Psig) pour la recherche de personnes lors de disparitions inquiétantes, "comme les personnes atteintes d'Alzheimer, les personnes suicidaires ou les mineurs", ou celle de malfaiteurs. C'est ce qu'on appelle "un chien piste-défense".

"On dit défense, car dans le cas d’une recherche de malfaiteurs, si on les retrouve et, qu’à l’issue, ils n’obtempèrent pas ou mettent en danger les camarades, les chiens sont dressés pour mordre de manière appropriée pour permettre l’immobilisation du malfaiteur. Il est alors employé comme une arme pour neutraliser la menace", détaille le spécialiste.

"La formation n'est jamais vraiment terminée"

Mais d'autres spécialités existent dans les différentes unités comme la recherche de restes humains (RRH), de traces de sang humain (RTSH). Car la gendarmerie compte aujourd’hui quelque 534 chiens et 449 équipes cynophiles, réparties en métropole et dans les Outre-mer. Pour devenir maître de chiens, les gendarmes doivent candidater à des présélections, où ils passeront des tests physiques et d'acclimatation aux chiens. Une fois retenus, ils sont inscrits sur une liste d'attente. "Quand une place se libère, on est envoyé en formation au Centre National d'Instruction Cynophile de la Gendarmerie de Gramat ", explique le maître de chien.

S'ensuit ensuite une formation de trois mois, où les apprentis maîtres de chiens passent des "tests de personnalités" pour "que les caractères et tempéraments du chien et du maître soient raccords, il faut un binôme harmonieux", ajoute-il.

De l'autre côté, les futurs chiens sont sélectionnés par la gendarmerie, à l'âge de 10 à 24 mois. "Ils sont testés pendant un mois renouvelable par des instructeurs, certains sont multicartes, d'autres ne pourront prétendre qu’à une seule spécialité", détaille-t-il. Les canidés rentrent ensuite en formation avec ces instructeurs, dédiés à la tâche.

"Nous, on arrive en cours de formation et on poursuit l'apprentissage aux côtés de l'instructeur lors d'un stage de trois mois. Le but, c'est qu'il nous laisse progressivement la main, il faut créer l'alchimie avec le maître et le chien", explique le maître de chien.

Une fois le duo formé, il rejoint l'unité. Chaque gendarme travaille avec un seul chien attitré, qui vit en chenil.

"Mais la formation n'est jamais vraiment terminée, le chien découvre des situations et des milieux nouveaux chaque jour", estime-t-il.

Après une moyenne de neuf ans de bons et loyaux services - moins si le vétérinaire le décide, les chiens sont mis à la retraite et placés à l'adoption. "On est prioritaires, on peut décider de le récupérer pour une retraite paisible", affirme le maître de chien.

Article original publié sur BFMTV.com