Les procès de Donald Trump doivent-ils être filmés et retransmis à la télé ? La question divise

L’ex-président Donald Trump, ici le 27 avril, est inculpé dans trois affaires.
L’ex-président Donald Trump, ici le 27 avril, est inculpé dans trois affaires.

ÉTATS-UNIS - Après les caméras de The Apprentice, celles de la justice ? Depuis l’inculpation de l’ancien président américain Donald Trump dans trois affaires qui pourraient le conduire derrière les barreaux, la question de la retransmission de ses procès à la télévision, surtout celui sur sa tentative de renverser les résultats de l’élection présidentielle 2020, fait débat.

Depuis 1946, « prendre des photos dans une salle d’audience pendant un procès ou la retransmission télévisée d’un procès depuis la salle d’audience » est strictement interdit dans les tribunaux fédéraux pour les affaires pénales. La règle peut être levée de manière exceptionnelle par une loi du Congrès ou par la Judicial Conference (conférence judiciaire) présidée par le juge John Roberts, également à la tête de la Cour suprême.

C’est ce qu’ont réclamé 38 parlementaires démocrates dans une lettre adressée à la Judicial Conference le 3 août. Pour eux, « peu de circonstances justifient davantage une diffusion télévisée que celles-ci, étant donné (la) nature historique » du procès « États-Unis v. Trump », dont la date n’a pas encore été fixée.

Les démocrates comme le camp Trump pensent avoir l’avantage

« Pour que le public accepte pleinement l’issue de ce procès, il est vital qu’il puisse le voir, de façon la plus immédiate possible, voir comment les débats sont menés, la qualité des preuves, la crédibilité des témoins », insiste notamment le Représentant de Californie Adam Schiff, qui a été membre du comité enquêtant sur la procédure de destitution contre Trump et celui sur l’assaut du Capitole.

Plus surprenant, l’un des avocats de Donald Trump s’est aussi dit en faveur de la retransmission du procès à la télévision, mais pour une autre raison. « Si vous me demandez mon opinion personnelle, la réponse est oui », a déclaré John Lauro sur CNN. « Je suis convaincu que l’administration Biden ne veut pas que le peuple américain accède à la vérité », a-t-il ajouté plus tard sur Fox News. Donald Trump ne s’est pas exprimé sur la question.

En fait, les deux parties « sont confiantes sur le fait que le procès va leur donner raison », explique Jordan Singer, un professeur de droit interrogé par plusieurs médias dont le Washington Post et la radio NPR.

La stratégie des démocrates mise en doute

Il faut dire que Donald Trump, ancienne star de la téléréalité avec son émission The Apprentice, est particulièrement à l’aise à la lumière des projecteurs. « C’est un homme qui a très très confiance en lui et en sa capacité d’avoir les caméras qui le filment en sa faveur », poursuit Jordan Singer.

En parallèle, les démocrates espèrent que « tout ce qui va sortir du procès sera suffisamment mauvais pour tuer toutes les aspirations présidentielles de Trump ». Car l’ex-président, de nouveau en campagne pour la Maison Blanche, est le grand favori de la primaire républicaine et un nouveau choc Trump-Biden se dessine en 2024. Un sondage du New York Times paru le 1er août montre que les deux hommes sont aujourd’hui au coude-à-coude, avec chacun 43 % des intentions de vote.

Cristina Tilley, interrogée par les deux mêmes médias, pense à l’inverse que la stratégie des démocrates n’est pas la bonne. « Si leur objectif est que les gens acceptent le verdict, quel qu’il soit, je ne suis pas sûre que filmer le procès soit la bonne solution », estime la professeur de droit qui a justement fait des études sur la présence des caméras en salle d’audience.

Peu de chance que le procès soit télévisé

Ses recherches montrent que le public s’intéresse aux moments d’émotions ou dramatiques. Les passages les plus importants concernant le droit et la preuve de l’illégalité, plus ardus et « ennuyeux » pour le grand public, n’intéressent pas. Au vu de la capacité de Donald Trump à dominer et déformer les débats, explique à l’AFP Christina Bellantoni, sa cote de popularité « montera, quelles que soient les preuves présentées ».

Malgré tout, Gabe Roth, membre de l’association Fix the Court, qui milite pour une réforme du système judiciaire fédéral américain, juge qu’avoir accès à des « sources primaires » est toujours une bonne chose. Interviewé par NPR, il s’inquiète également d’un procès où seuls des extraits fuitent, entre les raccourcis et la manipulation de l’opinion publique.

Mais Gabe Roth reste réaliste : les chances sont « très très minces » que le procès soit filmé. Non seulement les membres de la Judicial Conference sont réticents à l’introduction de caméras par crainte que les jurés soient influencés par l’extérieur, mais aussi… parce qu’ils « n’ont pas de compte Instagram ou TikTok ».

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