En pleine canicule au Royaume-Uni, des météorologues harcelés et accusés de mentir

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Durant les températures records du mois de juillet, les spécialistes du climat et de la météo britannique ont fait l’objet de vagues de harcèlement en ligne.

ROYAUME-UNI - Un climatoseptisme en plein essor outre-Manche ? Le 19 juillet, le Royaume-Uni connaissait des températures encore jamais atteintes sur son territoire. Pourtant, malgré les températures affichées, dépassant pour la première les 40° degrés, certains n’y ont vu qu’alarmisme et mensonge.

Comme en témoignent plusieurs spécialistes ce vendredi 29 juillet dans un article de la BBC, météorologues et prévisionniste ont été victimes d’une vague de harcèlement sans précédent liée aux informations transmises sur la canicule. Notamment des membres de la BBC, de la Royal Meteorological Society et du service national britannique de météorologie (Met Office).

Matt Taylor, météorologue pour le service public britannique admet n’avoir jamais vu ça en 25 ans de carrière. « C’est un ton plus qu’abusif comme je n’en ai jamais reçu. Je me suis un peu déconnecté de tout cela, car il est devenu trop déprimant de lire certaines des réponses », témoigne-t-il.

Le réchauffement climatique, un argument qui ne passe pas

La Royal Meteorological Society dit avoir eu affaire à un « public ridicule », capable « d’accusations de mensonges et de chantage ». Au cœur des tweets et emails outranciers reçus, la majorité des critiques visent le rapport établit entre canicule et réchauffement climatique.

À ce sujet, la professeure Liz Bentley, par ailleurs directrice générale Royal Meteorological Society note le « rapport intrinsèque » entre les messages virulents et la thématique du réchauffement climatique.

« Les commentaires abusifs augmentent lorsque le message sur le changement climatique est intrinsèque à l’histoire », note-t-elle auprès de la BBC. Pour Alex Deakin, météorologue en chef du Met Office, le public doit arrêter de « croire Bob au pub ou Tony sur Youtube » et « faire un peu plus de recherche » à la place.

« C’est juste l’été »

Un constat alarmant, qui n’est pas sans rappeler Don’t Look Up, le dernier film d’Adam McKay, dans lequel les appels face à l’urgence climatique sont tournés en dérisions ou railler sans le moindre argument, parfois même par les médias eux-mêmes, comme en atteste cette scène à la télévision britannique le 20 juillet.

Parmi les nombreux messages reçus de la part de téléspectateurs et citoyens, les remarques comme « c’est juste l’été » ou « il fera bientôt froid à nouveau » sont légions. À ces remarques -adressées parfois personnellement à certains spécialistes- s’ajoutent des accusations sur l’« hystérie » et « l’alarmisme » répandu par les services de météo pour « faire peur à la population ». Pourtant les faits sont là: selon le Met Office, la vague de chaleur observée mi-juillet au Royaume-Uni a été rendue dix fois plus probable à cause du changement climatique sur Terre.

« Ce qui me frustre le plus, c’est quand on m’accuse de déformer la vérité. En tant que météorologues, nous rapportons des faits. Il n’y a pas de complot », réplique, attristé, Tomasz Schafernaker, météorologue pour la BBC.

Pour Matt Taylor, cet épisode de haine en ligne et de climatoscepticisme exacerbé doit servir de leçon. La canicule a été un « véritable tournant dans l’attitude du public et sur la prise de conscience de ce qui est arrivé à notre climat ». Il ajoute que « notre climat a changé, donc nos reportages et nos réponses doivent également changer. Tout ce que nous essayons de faire, c’est d’apporter les faits aux gens ».

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