Sur Paris-Nice, Démare compte sur son train pour retrouver le chemin du succès

Ça n’est un secret pour personne, la fin de l’aventure d’Arnaud Démare chez Groupama-FDJ ne fut pas des plus paisibles. En froid avec David Gaudu, puis pas invité sur le Tour de France par son ancien manager Marc Madiot, il fit alors ses valises au beau milieu de l’été pour s’engager avec l’équipe Arkea B&B Hotels et retrouver le goût du succès en fin de saison sur le Tour de Vendée et Paris-Bourges.

Mais si le sprinteur, octuple vainqueur d’étape sur le Giro et double vainqueur d’étape sur le Tour de France, a d’abord mal vécu cette séparation forcée avec son équipe de toujours. Il a fini par remonter la pente et digérer cet épisode douloureux. "Ça a mis du temps mais je suis passé à autre chose, avoue Arnaud Démare. Maintenant j’ai pris mes repères dans ma nouvelle équipe, j’espère vite ramener des résultats cette saison."

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A post shared by Viktorija Burakauskas (@toribur) on Jan 21, 2020 at 8:43am PST

"Sans train, c’était dur de gagner"

Et peut-être dès Paris-Nice cette semaine, où l’objectif du Picard sera de faire un pas supplémentaire vers sa centième victoire en professionnel en allant déjà cueillir à minima un 96e bouquet. Si l’étape d’hier (dimanche) autour des Mureaux au final tortueux et bosselé lui était peu propice (finalement 77e), celle ce lundi entre Thoiry et Montargis devrait, sauf surprise, offrir un authentique sprint massif dans lequel Démare pourrait avoir son mot à dire, notamment grâce à un train qui s’était peu à peu étiolé au fil de ses dernières années chez Groupama FDJ.

Ce train, pour les profanes, c’est en fait la garde rapprochée de tout sprinteur "non solitaire". Un groupe de trois ou quatre coureurs aux profils divers de gros rouleur, de bon frotteur puis de poisson pilote à la vitesse de pointe très élevée, une sorte de fusée à étages censée mettre sur orbite l’homme le plus rapide, en l’occurrence chez Arkea B&B Hotels Arnaud Démare. "J’ai été formaté à ça explique le triple champion de France, donc sans train l’an passé ça avait été dur de gagner. Avec un train, on augmente les possibilités de gagner, c’est aussi pour ça que de plus en plus d’équipes en ont". A l’image par exemple d’Alpecin Fenix, dont le sprinter belge Jasper Philipsen avait enlevé quatre victoires au sprint sur le dernier Tour de France, notamment grâce à son poisson pilote de luxe, le Néerlandais Mathieu Van Der Poel.

Rendez-vous à un point stratégique

Le fonctionnement du train change tous les jours, en fonction du parcours et de points clés déterminés au briefing du matin. Dans sa nouvelle formation, Arnaud Démare peut compter dans l’idéal sur le Néo-Zélandais Dan McLay, sur Florian Sénéchal, et sur l’Australien Miles Scotson. Blessures des deux premiers oblige, Arnaud Démare ne dispose que de Scotson durant Paris-Nice et du rouleur Donavan Grondin pour le placement dans le final.

En général, le train se met en place dans les derniers kilomètres d’une étape. Les équipiers, s’ils sont dispersés dans le peloton, tentent de se retrouver à un point stratégique déterminé à l’avance. "Ça peut être à 25 kilomètres, comme parfois à 6 kilomètres de l'arrivée, observe Arnaud Démare. On sait qu’à tel endroit, tel virage va forcément tendre le peloton et qu’après ce sera difficile de remonter et de trouver une place en tête de paquet, donc on essaye de se retrouver à ce repère avec ensuite comme but absolu de rester groupés."

Jouer des coudes et tenir la ligne

Tableau noir sur le papier, cette manœuvre, reproduite presque autant de fois dans le peloton qu’il n’y a d’équipes de sprinters et d’équipes qui veulent protéger leurs leaders pour le classement général requiert pourtant anticipation, flegme et savoir-faire. "Ça nécessite aussi de se parler dans l’oreillette raconte Arnaud Démare. Parfois on me demande : 'Arnaud t’es où ?' 'Moi je suis à gauche de la route'. 'Et t’es dans la roue de quelle équipe ?' 'Je suis dans la roue d’Ineos'. Et c’est comme ça qu’on arrive à se retrouver, même si c’est plus facile à dire qu’à faire, surtout quand on est sur des petites routes bien sinueuses. Mais en général on se retrouve sans trop de problèmes."

Une fois le train reconstitué, Démare se positionne dans la roue de ses trois ou quatre coéquipiers. Dans un premier temps, un gros rouleur, comme Donavan Grondin a le rôle de premier étage de la fusée, jusqu’à la flamme rouge, jouant des coudes pour tenir une position la plus avancée en tête de peloton. Le travail pour lui s’arrête au kilomètre, où le relai est alors pris par Miles Scotson, deuxième étage de la fusée chargé de prendre le trajet le plus court et d’anticiper au mieux toute difficulté liée au tracé. Ensuite Florian Sénéchal entame l’emballage final, relayé par Dan McLay qui s’efface dans l’idéal à 400 mètres de la ligne, lançant Arnaud Démare vers l’ultime effort du jour à plus de 70 km/h.

Plus de victoire en World Tour depuis 2022

Une mécanique à bien huiler donc, mais qui n’est pas non plus la garantie absolue de briller tous les jours tant la concurrence fait rage dans le sprint actuel. Rien que sur Paris-Nice, Kooij (vainqueur de la première étape dimanche), Pedersen, Groves, Jakobsen ou Coquard, pour n’en citer qu’une poignée, prétendent eux aussi à lever les bras lors de chaque sprint qu’ils disputent.

Et même s’il n’a pas encore gagné cette saison, Arnaud Démare compte donc sur son train pour vite y parvenir. "On a fait de belles choses depuis le début de l’année mais on n’a toujours pas le bon timing, observe-t-il. On essaye, il y a de l’envie et de la motivation. Maintenant il faut que ça paye." Rendez vous en fin d’après-midi à Montargis à l’arrivée de la deuxième étape de Paris-Nice pour voir ce qu’il en est. Démare n’a plus gagné sur une épreuve World Tour (1e division du cyclisme mondial) depuis le Tour de Pologne en août 2022.

Article original publié sur RMC Sport