OM-PSG, attaques de convois, dialogue avec les supporters... Le patron de la DNLH se confie à RMC Sport
Thibaut Delaunay, vous êtes très rare dans les médias et c'est un moment spécial, nous sommes à trois jours du classique de la Ligue 1 entre l’OM et le PSG. Une rencontre qui se déroulera une nouvelle fois sans des supporters adverses, sans les supporters parisiens. Pourquoi cette décision?
Vous n'êtes pas sans savoir que ces rencontres PSG-OM ou OM–PSG suscitent un engouement particulier. Et que depuis de nombreuses années, un antagonisme fort oppose les supporters des deux clubs. Malheureusement, ces matchs ont souvent été émaillés d'incidents, parfois d'incidents graves. Et c’est ce qui nous amène à prendre des mesures pour encadrer ces rencontres, qui ne pourraient pas se jouer dans de bonnes conditions de sécurité en présence des supporters adverses. Ça commence à remonter, la dernière fois que les supporters ont pu se déplacer. On avait fait une tentative à l'occasion d'une rencontre de Coupe de France en 2018 au Parc des Princes, les supporters marseillais avaient pu se déplacer. Malheureusement, cette rencontre avait également été émaillée d'incidents. Depuis, systématiquement, les matchs se déroulent sans les supporters adverses. Nous en sommes désolés, mais les conditions de sécurité ne sont pas réunies et malheureusement les incidents qui ont eu lieu en fin d'année et notamment à l'occasion de la venue des supporters lyonnais à Marseille n’ont pas aidé. Puisqu'on faisait un test avec le retour des supporters lyonnais à Marseille avec un nombre assez élevé, ce test n'a pas été concluant et donc ça nous a amenés à prendre une décision d'interdiction pour le déplacement des supporters parisiens.
Il faut que les supporters se responsabilisent.
Mais est-ce qu'un jour on pourra revoir des Marseillais à Paris, ou des Parisiens à Marseille comme l’espère le CUP?
On l'espère, on l'espère.
Il manque encore un peu de dialogue entre toutes les parties?
Je pense qu'il manque un peu de dialogue, mais il manque surtout de bonnes conditions. Ça demande une préparation très en amont, c’est déjà le cas sur toutes les autres rencontres du championnat. Mais je pense qu'il faut aussi que les supporters se responsabilisent. Les supporters devraient prendre des engagements afin qu’ils nous donnent des gages de confiance pour qu'on puisse les autoriser à se déplacer. En l’état, on n'a pas suffisamment de certitudes sur le fait que ces déplacements se passent dans de bonnes conditions.
Donc les Lensois, pour le déplacement à Lille ce vendredi soir, vous ont donné des gages de confiance?
Les Lensois nous ont donné des gages de confiance pour le déplacement à Lille. La saison dernière nous avions déjà organisé le déplacement des Lensois à Lille. Le déplacement s'était bien passé avec un encadrement strict. Et donc ça nous conforte dans l'idée qu'on doit aller dans cette voie. Maintenant, le cas de OM-PSG est encore différent. La configuration des stades, à Marseille ou à Paris, entre aussi en ligne de compte. Nous sommes sur deux stades très urbains avec tout ce que ça implique comme difficulté d’accès pour les supporters et donc de sécurisation des supporters.
Il y a une aggravation des faits de violence.
Quel bilan faites-vous à la DNLH depuis le début de saison au niveau des violences? Est-ce que l'intensité de ces violences est plus forte?
La DNLH ne constate pas forcément une augmentation des faits de violence depuis le début de la saison. En revanche, on constate une évolution de ces faits de violence. Il y a une aggravation des faits. Ça c'est très clair. On a une aggravation des violences mais pas forcément une augmentation en volume. Et puis on constate surtout un déplacement de ces faits de violence, déplacement plutôt à l'extérieur des enceintes. Alors on revient finalement à une situation qui était un peu antérieure à la période Covid, c'est un peu notre marqueur. Immédiatement après le Covid, la saison qui a suivi, énormément d'incidents à l'intérieur des stades. De nouveau on a retrouvé une situation un peu plus apaisée dans les stades. Cette violence s'est reportée à l'extérieur. Maintenant, il nous tient de la juguler. Mais c'est vrai qu'on on se rend compte que depuis le début de la saison, on a énormément de faits violents à l'extérieur des stades et notamment un phénomène particulier qui est l'attaque des convois.
Ça vous surprend ça d'ailleurs?
On le sentait monter. Nous ne sommes pas surpris par ce type d'agissements. Néanmoins, la violence de ces agissements doit être notée et on a constaté depuis le début de la saison environ 17 ou 18 attaques ou tentatives d'attaques de convois, ce qui est énorme. On peut notamment penser à l’attaque des supporters lyonnais à Marseille, mais on a aussi eu les supporters havrais à Montpellier et les supporters niçois à Lyon. Ce sont des faits qui pourraient être dramatiques. C’est un phénomène que l’on doit maîtriser et surtout endiguer.
Mais comment mieux sécuriser l’extérieur des stades et le retour des supporters?
Ce phénomène d'attaque de convois de supporters est pris en compte et c'est un phénomène sur lequel on travaille énormément. C'est pour ça qu'on met en place ces encadrements avec des escortes policières qui permettent de sécuriser l'arrivée des convois de supporters, ce qui nous permet d'entraver les tentatives d'attaques. Il y a encore des attaques de temps en temps. Mais globalement on arrive à contrecarrer les velléités d'attaques de convois des supporters locaux à l'arrivée des supporters visiteurs. En revanche, ce qu'on constate de plus en plus c'est que maintenant, faute de pouvoir les attaquer avant, les faits se passent après les matchs. C'est un phénomène sur lequel il faut qu'on soit extrêmement vigilant. Il y a l'avant match où on a progressé, où nous sommes de plus en plus efficaces mais il y a aussi l’après.
43.000 policiers et gendarmes mobilisés cette saison.
Depuis le début de la saison, combien avez-vous mobilisé de policiers, par exemple sur la Ligue 1 et la Ligue 2, pour sécuriser les matchs?
Sur les matchs de Ligue 1, de Ligue 2 et de Coupes d'Europe nous avons mobilisé 43.000 policiers et gendarmes. Ce qui est un investissement énorme de l'État et du ministère de l'Intérieur. Alors il y a une partie de cet engagement qui est rétribuée par les clubs, puisqu'on facture une partie de cette mobilisation. Néanmoins, pendant que les policiers et les gendarmes assurent la sécurité de ces rencontres, ils ne sont pas déployés sur d'autres missions.
Les incidents lors d'OM-OL ont-ils modifié votre approche sur les matchs à très haut risque?
Non. On était conscient que ce type de phénomène existait et pourrait se produire. Ce qui est nécessaire d’avoir en tête c’est de bien anticiper la préparation de ces rencontres. L’anticipation peut prendre plusieurs formes. Et j’en reviens encore une fois à l’engagement. La police ne peut pas tout faire, toute seule. Les clubs aussi. L’engagement des supporters est aussi important avec le respect des instructions données, des consignes passées. Si par exemple, nous avons un non-respect du point de rendez-vous, si les supporters ont un retard par rapport à l'heure du point de rendez-vous qui va impliquer qu'on va arriver plus tard sur la zone aux abords du stade, ça va augmenter le risque à l'approche du stade avec les bus. Donc c'est vraiment important que tout le monde s'engage. Et quand je dis tout le monde ça prend en compte les supporters et aussi les autorités.
Comment qualifier la relation avec les supporters? Les discussions sont-elles fluides?
Je vais faire un petit bond dans le dans le passé. Mais lorsque le foot a pu reprendre normalement après la période Covid, on a eu tout de suite des incidents graves. Dans la foulée nous avons eu une réaction de l'État, qui a été d'augmenter significativement le nombre d'interdictions de déplacement. On a œuvré fort, le ministre de l'Intérieur a fait des rappels par circulaire afin de rappeler que ces mesures d'interdiction devaient rester exceptionnelles et qu'on devait passer par une phase de préparation des rencontres avec des réunions très anticipées, de manière à poser tous les éléments sur la table en concertation et de manière à prendre les mesures les plus adaptées. Nous sommes parvenus à cette évolution vers davantage d'encadrement et une réduction assez drastique des interdictions.
Malheureusement cette saison a été marquée par deux événements dramatiques…
Oui, avec l'attaque des Lyonnais à Marseille et puis surtout la mort d'un supporter à Nantes, ce qui derrière a entraîné cette période de moratoire, où nous avons eu une interdiction systématique de tous les déplacements de supporters dès lors qu'un match était classé à risque. Ça ne pouvait pas durer dans le temps. Forcément cette période de moratoire avec ces interdictions systématiques, ça a un petit peu cassé le dialogue entre l'autorité publique et les supporters. Il était nécessaire de réinstaurer ce dialogue. Le travail a été mené notamment par la ministre des Sports et des Jeux olympiques dans le cadre de l'Instance nationale du supportérisme. Cette séquence a permis de réenclencher ce dialogue avec les supporters et de revenir à une situation plus apaisée. Ce qui permet depuis la reprise de janvier de limiter les interdictions de déplacement de supporters au match qui le nécessite réellement. Alors on a encore ici et là quelques demandes qui sont peut-être abusives, mais globalement on limite ces interdictions de déplacement aux matchs qui le nécessite vraiment. On va privilégier l'encadrement. Mais qui dit encadrement dit qu'on pose des règles dans le déplacement des supporters. Et donc c'est pour ça que j'insiste sur le fait qu’il faut absolument que ces règles soient respectées. Ces règles sont faites pour sécuriser les déplacements et éviter ainsi ces attaques de convois telles qu'on peut les connaître.
On va essayer de faire un peu de pédagogie. Comment la DNLH note-t-elle une rencontre? On prend l’exemple de Lille–Lens, le derby du Nord ce vendredi soir… Quelle est la note de cette rencontre?
Ce match est classé au niveau 4 sur une échelle de 5. L'échelle des risques débute au niveau 0, l'absence de classement, jusqu'au niveau 5 qui est le niveau le plus élevé.
Pourquoi cette décision de noter 4 sur 5?
L'évaluation des risques se fait selon un ensemble d'éléments. A la fois des éléments factuels d'antécédents entre les groupes de supporters des deux équipes, tout l'historique qu'on peut avoir entre les groupes de supporters. On va aussi regarder le comportement des supporters d'une manière générale, pas forcément lors de leur confrontation, mais d'une manière générale. On va étudier la topographie des lieux puisque comme je vous le disais tout à l'heure, l'environnement du stade, les accès au stade vont entrer dans l'analyse. La situation sportive des clubs va évidemment rentrer en ligne de compte puisque ça peut influer sur le comportement des supporters. Le contexte général et social du moment puisque on peut être sur des moments de tension, y compris sur d'autres domaines que le football qui peuvent générer des comportements déviants de la part des supporters ou des mouvements d'humeur de la part des supporters du fait de la tension générale dans le pays. Et puis on va surtout s'appuyer sur le travail qui est fait à la fois par mes équipes, ici à Paris. Mais aussi avec l’analyse de toute notre base historique, l’analyse des réseaux sociaux. Avec par exemple des provocations éventuelles qui peuvent apparaître. Et puis surtout sur le travail de terrain de mes correspondants locaux puisqu'on a un réseau de correspondants sur l'ensemble du territoire. Ils vont nous remonter un maximum d'informations qui va entrer en compte dans l'analyse. Enfin et surtout, on va avoir un échange à la fois avec la Ligue et les clubs, notamment à l'occasion des réunions préparatoires qui sont organisées autour du préfet de département qui accueille la rencontre. Lors des matchs qui présentent une sensibilité particulière, ces réunions vont permettre un partage de tous les éléments, un partage d'informations entre les différents acteurs pour essayer d'avoir une analyse la plus fine possible des risques entourant la rencontre. Tous les matchs qui présentent un caractère de sensibilité doivent faire l'objet a minima de deux réunions préparatoires, la première trois semaines en amont de la rencontre et la seconde dans la semaine qui précède la rencontre.
Les arrêtés sont quand même souvent pris à la dernière minute…
Tous les trimestres, nous envoyons à toutes les préfectures, tous les matchs qui présentent une sensibilité particulière. Ces matchs doivent faire l'objet d'une première réunion trois semaines en amont de la rencontre, de manière à justement avoir suffisamment la capacité d'anticiper et de poser toutes les bases qui vont potentiellement amener à la prise de mesures administratives, que ce soient des arrêtés d'encadrement ou des arrêtés d'interdiction. Oui, on doit faire mieux mais ça a déjà beaucoup évolué. Tout n'est pas tout n'est pas encore parfait. On doit encore progresser sur ce point, mais force est de constater qu'il y a qu'il y a une évolution. J'en prends pour exemple l'interdiction de déplacement des supporters Parisiens à Marseille pour ce classique. L'arrêté ministériel a été publié lundi, soit 6 jours avant la rencontre. On va essayer de poursuivre sur cette volonté de manière à ce que les supporters, et je comprends la frustration de certains supporters, qui des fois organisent leur déplacement et souhaitent pouvoir se retourner en cas d'évolution dans l'organisation de ce déplacement.
Pourquoi il y a très peu de déplacements en train pour les supporters en France?
C'est une piste qui est évoquée régulièrement. Il n’y a pas de dogme sur le sujet. On n'est pas contre les déplacements en train.
C'est plus difficile à sécuriser?
C'est ça, et ça va dépendre des déplacements, ça va dépendre de la configuration de la rencontre. Évidemment, sur un déplacement très à risque, ça peut être un peu plus compliqué en train. Tout le monde peut aisément comprendre que les gares se trouvent en plein centre des villes. Et qu’organiser l'arrivée d'un groupe de supporters en volume important dans une gare en plein centre-ville avec le reste des voyageurs, ça peut présenter un risque supplémentaire par rapport à une arrivée en bus encadrée, escortée par les forces de police. Sur certains cas, ça pourrait être faisable. Mais pas sur tous les déplacements. Maintenant c'est une piste qui est parfaitement envisageable.
Où en est l’expérimentation du policier référent supporter?
Le policier référent supporter visiteur est une expérimentation qu'on avait lancée juste avant la période Covid, qui a malheureusement été interrompue. Cette expérience a été reprise à l'occasion de la saison 2022-2023 sur huit sites. Donc c'est une expérimentation qui est en cours. Le policier référent supporter visiteur est un policier qui est dédié à l'accueil des supporters visiteurs et qui fait le lien entre les supporters visiteurs et le directeur du service d'ordre. Donc le chef de la police locale qui organise la sécurisation de la rencontre. Ce policier est amené à faire le lien dans un sens comme dans l'autre. Pour le moment, à chaque fois qu'on l'a déployé sur les huit sites qui sont ciblés, les résultats sont très positifs. L'objectif est une généralisation de ce dispositif. Ça va demander un temps de recrutement et un temps de formation au sein des effectifs de police. C'est un dispositif qui est porté par le ministère de l'Intérieur, la LFP et la FFF dans le cadre de la fondation Nivel. Nous sommes convaincus de l'intérêt de ce dispositif. Et donc l'objectif c'est une généralisation à minima sur les clubs de Ligue 1 pour la saison prochaine. Si on peut faire mieux, on n'hésitera pas.
Je pense qu’on s'autoflagelle en France.
La France est-elle à l’abri des incidents qui se sont déroulés en Turquie?
Je ne pense pas qu'on puisse dire que nous sommes à l'abri de de quoi que ce soit. Malheureusement, c'est un domaine qui est trop fragile pour qu'on puisse se targuer d'être à l'abri. En revanche, je pense qu’on s'autoflagelle en France, on se dit qu’on travaille mal en France, que les autres pays européens font beaucoup mieux que nous. Moi je constate que ce n’est pas vrai. Évidemment, tout n'est pas parfait, on a des choses qui doivent progresser. Néanmoins je constate qu'il y a aussi des incidents violents tous les week-ends en Allemagne, tous les week-ends aux Pays-Bas ou dans d'autres pays voisins. Et je ne vais pas jusqu'à parler des incidents en Turquie mais ce que je veux dire c'est que souvent on nous oppose les modèles étrangers, y compris les Anglais qui sont de nouveau confrontés à des phénomènes de violence assez réguliers. On a malgré tout des incidents qui nous prouvent qu'on doit encore progresser. Mais je pense qu’il faut arrêter de se dire que les autorités françaises, les clubs français, les organisateurs de compétition travaillent mal. Ce n’est pas vrai.
En revanche la France est largement en retard sur les interdictions individuelles de stade…
Alors c'est vrai et c’est un vrai sujet. Sur ce sujet, toutes les parties prenantes sont convaincues que l'individualisation de la peine est la meilleure des réponses. Pourquoi? Parce que c'est toujours désolant de devoir punir collégialement un groupe au sein duquel il y a sûrement des éléments perturbateurs, mais au sein duquel il y a aussi des éléments qui ne sont pas forcément impliqués dans les incidents. Ça demande beaucoup d'efforts en termes de judiciarisation, en termes d'enquête, mais c’est un travail nécessaire. On a actuellement en France un peu plus de 300 interdits de stade, ce qui, comparativement à nos voisins et notamment les Anglais qui sont à plus de 3000, est sans commune mesure avec notre pays. Mais même nos voisins belges qui possèdent un volume de supporters inférieurs au nombre de supporteurs français, ils ont quatre fois plus d'interdits de stade qu'en France. Donc il y a un vrai effort à faire sur ce sujet. Mais ça doit aussi impliquer les clubs, qui doivent s'emparer de cette question avec les dispositions qui sont entre leurs mains, c'est à dire les interdictions commerciales de stade.
"Il faudra être vigilant pour l'Euro 2024."
Est-ce que vous constatez une montée des mouvements identitaires dans les tribunes françaises?
On travaille étroitement avec les services de renseignement. Je ne vous dévoilerai pas les techniques de renseignement mais nous sommes évidemment attentifs à ces phénomènes. Ils ne sont pas nouveaux malheureusement. En revanche, ces phénomènes sont davantage relayés sur les réseaux sociaux, ils sont davantage visibles parce que le foot est exposé, surexposé médiatiquement. Mais ce n’est pas un phénomène nouveau. C'est un phénomène sur lequel il faut lutter et on utilise à la fois les techniques de renseignement mais aussi des techniques d’investigation pour contrevenir et pour interpeller et identifier les auteurs de ces de ces agissements qui n'ont rien à faire dans les tribunes. Ces comportements n'ont pas leurs places dans un stade de football.
Comment bien préparer cet Euro 2024? Le premier grand événement en Europe dans un seul et même pays depuis le Covid…
La DNLH suit plus particulièrement les supporters de l'équipe de France, elle les accompagne à l'occasion des grandes compétitions. À la fois pour détecter éventuellement des profils à risque au sein même des supporters français. Fort heureusement, l'équipe de France est suivie par un public plutôt familial, un public d'amoureux du football qui n'a pas d'attrait pour la violence. Et c'est tant mieux. On va les accompagner pour faire le lien entre ces supporters et les autorités locales. Et cet Euro en Allemagne a cette particularité que c'est la première grande compétition depuis le Covid, j'en reviens toujours au Covid, mais c'est un peu notre marqueur. C'est la première grande compétition où tous les supporters à risque des pays européens vont pouvoir se retrouver. C'est un pays qui est central en Europe, ça va être le carrefour de l'Europe. Tous les supporters des nations engagées vont se regrouper, voire peut être des supporters de nations qui ne seront pas qualifiés pour l'Euro. Mais qui voudront soit participer à la fête, soit venir troubler la fête. On aura une grande vigilance sur cette compétition. On travaille étroitement avec les autorités allemandes depuis de longs mois sur la sécurisation de cet Euro. Nous allons déployer une équipe spécifiquement dédiée au suivi des supporters français et à l'accompagnement des supporters français. On va dédier une équipe de dix policiers qui vont les suivre, huit policiers sur le terrain et deux policiers qui seront au centre de coopération internationale. Il présente une sensibilité très particulière du fait aussi des pays qui sont engagés dans cette compétition. Maintenant, pour la très grande majorité, les équipes nationales ne sont pas suivies par des supporters avec des niveaux de risques élevés. Et puis j'ai toute confiance dans les autorités allemandes pour que la fête soit belle.
La montée de la violence dans le football amateur vous inquiète-t-elle?
Oui, on constate une montée de la violence dans le football amateur. Alors ça tient à plusieurs faits. Nous sommes amenés à avoir un œil très attentif sur les divisions amateurs. Notre maillage territorial est très utile. Mais rien que sur le niveau national, le fait d’avoir d’anciens clubs professionnels avec des supporters organisés, des groupes de supporters dits "ultras" ça nous incite à avoir un œil attentif. Ça va être encore plus le cas avec le passage à 18 clubs de la Ligue 2. Le championnat National sera composé de clubs qui sont structurés. Donc forcément ces divisions amateures vont être de plus en plus touchées par ces phénomènes de confrontation entre supporters. Nous l’avons aussi sur les divisions de jeunes, qui peuvent commencer à être touchés par ces phénomènes. Parce que les supporters de foot, et notamment d'équipes professionnelles, peuvent parfois se reporter sur les catégories de jeunes ou des féminines de leur propre club.
Sur d’autres sports?
Par exemple, c’est le cas des clubs qui sont omnisports. On va avoir un report des comportements de supporters de foot, je ne parle pas encore de violences mais en tout cas des comportements de supporters de foot sur d'autres disciplines. C'est aussi le cas sur le basket. On peut avoir des comportements déviants, notamment de la part de supporters étrangers qui viennent sur le territoire français comme des supporters qui arrivent de Serbie ou de Turquie.
Et vous pouvez noter ces matchs?
Oui, on peut classer ces matchs, nous ne sommes pas une unité dédiée qu’au football, nous sommes multisports. Nous sommes amenés à surveiller ces rencontres. On a eu très très récemment, des petits incidents lors d'un match de Bourg-en-Bresse face au Besiktas en basket, ce sont des alertes que nous devons suivre et nous avions un dispositif mis en place sur le match. Il faut être vigilant. Il faut absolument qu'on anticipe une éventuelle contagion des autres sports pour ne pas en arriver à constater que les autres sports sont victimes des mêmes phénomènes qu’au football.