Nouvelle-Calédonie : comment se positionnent les partis politiques face aux velléités d’indépendance

Alors que la droite et l’extrême droite appellent à renforcer la position de Paris sur place, la gauche veut rester fidèle aux accords de 1998.

POLITIQUE - Les yeux rivés vers le Pacifique. Alors que la situation s’envenime en Nouvelle-Calédonie, où des violences ont éclaté dans le sillage d’une réforme constitutionnelle prévue par l’exécutif, décriée sur place par les indépendantistes, et qui a franchi une étape de taille avec l’adoption au Sénat puis à l’Assemblée nationale, tous les partis politiques ont leur mot à dire sur la situation sur place. Mais aussi sur le futur de l’archipel...

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L’occasion pour ces différentes formations d’appliquer à ce contexte complexe leur logiciel idéologique, et de décrire la façon dont Paris devrait agir pour déminer cette crise, alors que la question liée à l’indépendantisme a plusieurs fois connu des épisodes tragiques, que ce soit lors des événements de 1984 ou du drame d’Ouvéa en 1988.

En l’occurrence, tout part d’une volonté de l’exécutif d’élargir le corps électoral des élections provinciales de l’île sur fond de référendum contesté sur la question de l’indépendance, Le HuffPost fait le point sur les positions de chacun.

Du côté du camp présidentiel, on considère que les résultats des trois référendums locaux sur l’indépendance (2018, 2020 et 2021), où le « non » l’a systématiquement emporté, permettent de rapprocher encore plus Paris de cet archipel fonctionnant avec un système juridique propre. Et qu’importe si le référendum de 2021 a été boycotté par les indépendantistes et qu’il a été victime d’une participation très faible (moins de 50 %).

Emmanuel Macron avait annoncé sur place son souhait de voir advenir, par une réforme constitutionnelle, « une citoyenneté pleine et entière fondée sur un contrat social, faite de devoirs et de droits », et donc de dégeler le corps électoral du scrutin provincial pour l’ouvrir aux natifs et aux résidents présents depuis au moins dix ans. Le tout en associant le camp des indépendantistes dans le processus (ce qui n’a manifestement pas fonctionné).

Après l’adoption du projet de loi constitutionnelle par les deux chambres du Parlement à Paris, le chef de l’État a d’ailleurs promis de convoquer le Congrès « d’ici la fin juin » pour une adoption définitive... à moins qu’indépendantistes et loyalistes parviennent « trouver un accord qui dépasse le seul dégel (du corps électoral, ndlr) et tienne compte du chemin parcouru et des aspirations de chacun ». Une manière de dire que l’on avancera quoi qu’il arrive dans la direction de la réforme qu’il promeut.

Plus à droite, chez Les Républicains, on plaide de longue date pour un acte permettant d’arrimer davantage l’archipel à la souveraineté française. En 2018, Laurent Wauquiez s’était rendu sur place pour souligner son opposition à l’indépendance, plaidant pour une autonomie « au cœur de la France ». Sans surprise, Éric Ciotti est donc favorable à cette révision constitutionnelle.

Tout comme le Rassemblement national, également en faveur de cette réforme. Lors du dernier référendum, Marine Le Pen avait d’ailleurs appelé les électeurs « à manifester de façon définitive [leur] volonté de demeurer Français », tout en se disant « ouverte à des évolutions qui permettront d’aboutir à une solution institutionnelle acceptable par tous et pour tous ». Soit l’application d’une doctrine conservatrice à l’égard de ces territoires.

Sans forcément souhaiter l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie (à laquelle Jean-Luc Mélenchon ajoute le nom cher aux indépendantistes « Kanaky »), la gauche estime qu’il revient aux premiers concernés de choisir leur destin. En ce sens, les responsables de ce camp affirment que le chef de l’État a fait une erreur en ne tenant pas compte du boycott du dernier référendum par les formations kanakes.

Ce qui a contribué, aux yeux des partis de gauche, à donner une coloration coloniale à la réforme constitutionnelle en cours, perçue comme contraire aux accords de Matignon, signés en 1998. « La manière dont la France se comporte avec ses anciennes colonies est humiliante et dégradante donc oui, ça provoque des réactions un peu épidermiques », a commenté sur franceinfo la secrétaire nationale des Écologistes, Marine Tondelier. Logiquement, donc, les partis de gauche s’opposent à cette réforme constitutionnelle.

Le Parti socialiste a demandé, comme LFI, à l’exécutif de faire machine arrière afin de retrouver le chemin du dialogue. « Il y a urgence à éteindre l’incendie. Il faut à tout prix revenir au dialogue et ne pas céder à la tentation de l’escalade dans la violence. Personne n’est jamais arrivé à rien en plus de cent ans avec ce genre de méthode sur le terrain, sauf à des morts, des haines et de l’esprit de vengeance », écrit Jean-Luc Mélenchon sur son blog. Pour Mathilde Panot, présidente du groupe LFI à l’Assemblée nationale, cette révision constitutionnelle est « un fait colonial indéniable », estimant que « les mauvaises décisions s’accumulent depuis qu’Édouard Philippe ne gère plus le dossier ».

Comme les autres formations de gauche, le PCF « appelle à la poursuite du processus de décolonisation engagé il y 25 ans » lors des accords de Matignon, et exhorte là encore l’exécutif à revoir sa copie afin d’éviter l’embrasement. Lorsque la date du dernier référendum avait été avancée, provoquant la colère des indépendantistes, Fabien Roussel avait accusé Emmanuel Macron d’user d’une méthode « digne d’un empire colonial méprisant les peuples colonisés ».

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