Ni saintes ni soumises : les héroïnes littéraires ne sont pas des victimes
Dans Au non des femmes, de Jennifer Tamas, le male gaze côtoie « l'agentivité ». La cancel culture et les trigger warnings télescopent le cisgenre ou la binarité. Et pourtant, quand tout pourrait inviter à fuir ce nouvel essai dans l'air du temps, ainsi qu'une phraséologie qui fleure bon les campus américains – l'autrice est elle-même enseignante à l'université Rutgers, dans le New Jersey –, plusieurs passages désamorceront assez vite tout jugement trop hâtif : « Arrêtons de considérer la belle Hélène et ses avatars (telle Marilyn Monroe) comme des femmes fatales devenues victimes consentantes. Ces perceptions faussées sédimentent les préjugés et expliquent que la littérature classique soit accusée de propager une culture du viol. »À LIRE AUSSI Thelma et Louise : la balade sauvage de Susan Sarandon et Geena Davis
Jennifer Tamas prêche pour sa paroisse. Une paroisse où se pressent de moins en moins de fidèles, du moins aux États-Unis, et qui a pour nom « Littérature française des XVIIe et XVIIIe siècles », dont elle est une spécialiste. Car Jennifer Tamas a été sommée, d'une certaine façon, de justifier l'existence même d'enseignements « que les étudiants américains voient souvent comme l'héritage d'un “privilège blanc”, considérant même qu'une telle littérature conçue par des hommes blancs, vieux ou morts (old/dead white men) n'a absolument rien à leur apprendre ». L'argument n'est pas nouveau, on le sait, et toutes les formes de connaissances issues de la [...] Lire la suite