Mort de Geneviève de Fontenay: une histoire mouvementée entre le comité Miss France et son ex-présidente

Plus de dix ans après avoir quitté la présidence du comité Miss France, Geneviève de Fontenay reste indissociable du concours de beauté. La "dame au chapeau", morte dans la nuit de lundi à mardi à l'âge de 90 ans, a marqué la compétition en la dirigeant d'une main de fer. Mais c'est cette même vision conservatrice de la féminité qui a fini par lui coûter sa place à la tête de l'institution.

Tout au long de sa carrière, Geneviève de Fontenay a fait montre d'un attachement certain aux traditions:

"De mon temps, Miss France c'était la mise en valeur des terroirs, mais j'ai toujours refusé les maillots de bains deux pièces car j'estime que le nombril à l'air lors de l'élection, c'est de l'exhibition!", avait-elle ainsi observé comme le rapporte l'AFP.

Depuis 1981, année où elle a pris seule les commandes du comité Miss France, Geneviève de Fontenay a fait fi de l'évolution des moeurs pour préserver l'ADN d'origine de sa compétition et son règlement intransigeant: obligation de célibat, interdiction d'être mère, d'être tatouée ou d'avoir eu recours à la chirurgie esthétique... Il aura fallu, par exemple, attendre 2022 pour qu'une femme mariée et mère de famille puisse se présenter au concours.

Cheffe d'orchestre inflexible

Plusieurs fois, Geneviève de Fontenay s'est montrée inflexible envers ses protégées qui ne rentraient pas dans le rang. Isabelle Turpault, Miss France 1983, a ainsi été destituée pour des photos de charme dans Paris Match.

Le même sort attendait sans doute Valérie Bègue, Miss France 2008, quand des photos dénudées datant d'avant l'élection se sont retrouvées dans les magazines Entrevue et Choc, après son sacre.

"Elle doit démissionner immédiatement, sinon on la fera partir", avait immédiatement réagi Geneviève de Fontenay, comme le rappelle L'Obs, face à ces images qui contrevenaient à la règle selon laquelle les candidates s'engagent à "n'avoir jamais posé ou s'être exhibée(s) dans des tenues ou poses équivoques, partiellement ou totalement dénudée(s)".

Intervention de Sylvie Tellier

C'était sans compter sur l'intervention de Sylvie Tellier, Miss France 2002, fraîchement nommée directrice de la société Miss France. Elle avait alors fait office de médiatrice et un compromis avait été trouvé: Valérie Bègue a conservé son titre mais, en échange, elle n'a pas pu participer aux élections internationales.

"Je suis toujours en colère", lâchera néanmoins Geneviève de Fontenay à Libération. "Je n'ai pas cédé. Les photos, je ne les accepte pas et je ne les accepterai jamais (...) Je n'entends plus réapparaître aux côtés de Valérie Bègue."

Au fil des ans, Geneviève de Fontenay a continué à s'imposer en gardienne du temple: "Une Miss est le contraire du laisser-aller, du débraillé, de la vulgarité qui me désolent tant, à l'image de ces publicités avec des paires de fesses et une ficelle dedans", déclarait-elle.

Le conflit avec Endemol

Au moment du scandale Valérie Bègue, les choses avaient déjà changé avec le rachat de la société Miss France par Endemol en 2002. Rapidement, la "dame au chapeau" et le géant européen de la téléréalité sont entrés "en conflit éthique", selon elle, sur l'organisation du concours et de la cérémonie.

La goutte d'eau est intervenue en 2009 avec l'apparition dans l'émission La Ferme Célébrités d'une miss, Kelly Bochenko, déchue de son titre de Miss Paris 2009 après la parution de photos jugées sexuellement explicites dans le magazine Entrevue.

Pour Geneviève de Fontenay, Endemol (productrice de l'émission de téléréalité) a "bafoué l'image de Miss France":

"Depuis 2008, ils n’ont pas cessé d’entourer Miss France de scandales", déplore-t-elle à l'époque.

Et d'énumérer: "Bègue avec son pot de crème, à moitié nue sur une croix; ils mettent Miss France dans Secret Story, cette émission affligeante de vulgarité; Bochenko dans La Ferme Célébrités, tout aussi minable! Je leur ai dit tout le mépris que j’avais pour eux, leur manque de dignité. Est-ce qu’une femme, une mère, écarte ses jambes comme ça, devant un photographe? Si elles veulent le faire, qu’elles le fassent, mais qu’elles ne viennent pas à l’élection de Miss France!"

En colère, poussée vers la sortie, Geneviève de Fontenay claque la porte cette année-là. Elle décide de créer un très bref concours dissident, Miss Prestige National, déclenchant une guerre judiciaire avec Endemol. En 2013, les poursuites sont abandonnées de part et d'autre.

La compétition se tient jusqu'en 2015, année où Geneviève de Fontenay remet sa dernère écharpe. "(Je ne me sens) plus trop en accord avec ce qui semble marcher aujourd'hui", regrette-t-elle alors.

Rancune tenace

Geneviève de Fontenay n'aura jamais enterré la hache de guerre. Elle a boycotté le centenaire des concours de beauté en France organisé fin 2020 par TF1 car elle rejetait la date de 1920 - celle du premier concours de "la plus belle femme de France" - et retenait celle de 1928, lorsqu'il fut rebaptisé "Miss France".

En août 2022, lorsque la société Miss France annonce le départ de Sylvie Tellier et son remplacement par Cindy Fabre, la dame au chapeau s'agace dans un message vocal diffusé lors de l'émission TPMP:

"Il y a des choses plus importantes que ça en ce moment. Ça lui donne même une importance qu'elle ne mérite pas. Sylvie elle n’a pas eu le temps que j'ai passé moi sur les Miss. Parce que moi je suis là quand même depuis 1947, il n’y a rien de comparable."

Ces dernières années, Geneviève de Fontenay s'est essentiellement illustrée par ses ses propos polémiques. Elle avait été mise en examen en juin dernier pour injures et incitation à la discrimination transphobes, à la suite d'un communiqué diffusé en décembre 2021 dans lequel elle estimait qu'une Miss France transgenre serait "contre nature".

Article original publié sur BFMTV.com