Meurtre du policier Éric Masson à Avignon: avant le verdict, l'accusé demande "pardon"

Ilias Akoudad, qui a avoué en plein procès avoir tué le policier Eric Masson, a demandé "pardon" ce vendredi 1er mars, juste avant que la cour d'assises du Vaucluse ne se retire pour statuer sur le meurtre pour lequel, à 22 ans, il risque la prison à vie.

"Je veux demander pardon à toute la famille de Monsieur Masson", a simplement dit l'accusé, pull noir, visage fermé.

Plus tôt dans la semaine, Marc Masson, le père du brigadier, lui-même policier à la retraite, avait demandé qu'on lui "épargne les faux regrets". Après ce dernier mot offert aux accusés, la cour est ensuite partie délibérer.

Perpétuité requise

Ce jeudi matin, l'avocate générale, Florence Galtier, avait requis la peine maximale encourue pour un homicide volontaire sur un policier: la perpétuité assortie d'une période de sûreté de 22 ans, face à la "dangerosité" de l'accusé et pour en "protéger la société". Vingt-deux ans, soit l'âge donc d'Ilias Akoudad.

Cette peine, si elle était prononcée, serait "inhumaine", "plus longue que sa vie", avait plaidé Me Elise Arfi, l'une de ses deux avocats.

Pendant deux semaines d'audience, où des dizaines de policiers étaient là chaque jour pour soutenir la famille, l'accusation et la défense se sont livrées à une âpre bataille autour de la possible circonstance aggravante d'un meurtre commis sur une personne dépositaire de l'autorité publique.

"Je suis un con, j'ai voulu faire mon beau"

Mais le procès n'aura pas permis de répondre à une question: pourquoi Eric Masson, père de deux enfants, est-il mort le 5 mai 2021?

Ce jour-là, vers 18 heures, il est sur une opération de surveillance d'un point de deal à Avignon. Avec Romain, un collègue, ils sont en civil lorsqu'ils croisent Ilias Akoudad. Petit dealer récidiviste, celui-ci a décroché de l'école à 14 ans et vit avec une mère décrite comme permissive.

"Vous faites quoi les gars, vous charbonnez (vendez de la drogue)?", lance-t-il aux deux policiers qui viennent de contrôler une toxicomane.

Dans ses aveux partiels lundi, après presque trois ans de dénégations, Ilias Akoudad avait finalement reconnu, face à un dossier accablant, avoir tiré sur Eric Masson. Mais, assure-t-il, il l'avait pris pour un dealer. "Je suis un con, j'ai voulu faire mon beau".

"Je voulais l'intimider pour qu'il parte. Et comme un con, j'ai sorti mon arme, il avait sa main dans sa sacoche, il a mis sa main sur mon arme et j'ai paniqué. Malheureusement, j'ai tiré un premier coup, il a crié, il avait toujours la main dans la sacoche, j'ai tiré une deuxième fois sans vraiment savoir", se rappelle-t-il.

"J'étais en panique totale, je suis parti en courant. (...) À ce moment-là, je ne sais pas sur qui j'ai tiré, je sais qu'il est blessé... Et quand j'apprends par le journal (qu'il est mort, NDLR), c'est le cauchemar total. Les jours d'après, j'ai passé mes soirées dans une cave, impossible de dormir", explique-t-il à la barre.

"À aucun moment, je n’ai vu son brassard"

Ilias Akoudad l'assure, il ignorait qu'Eric Masson était policier au moment des faits. "Si j'avais vu un brassard, je ne me serais jamais arrêté. On aurait pris la fuite. À aucun moment je n’ai vu son brassard. Je ne serai pas allé au contact de policiers", jure-t-il.

Il était "absolument impossible" de les prendre pour des dealers concurrents, a balayé l'avocate générale dans son réquisitoire musclé, estimant que le brigadier avait été "exécuté sans sommation, par un individu ivre de violence, fier du geste accompli".

Face à des témoignages divergents, la cour dispose-t-elle de "suffisamment d'éléments" pour affirmer qu'il a bien montré son brassard ou crié "police" avant qu'on ne lui tire dessus, s'est interrogée Me Arfi.

"Soit c'est de la vengeance, soit c'est de la justice", a plaidé son autre avocat, le ténor lillois Me Frank Berton, appelant à ne pas "emmurer vivant" Ilias Akoudad.

La question de la circonstance aggravante

Il est poursuivi pour meurtre sur une personne dépositaire de l'autorité publique, et pour tentative de meurtre, toujours sur policier, du collègue d'Eric Masson. Pour cela, il encourt la perpétuité avec une période de sûreté de 18 ans, qui pourrait être portée à 22 ans par la cour, avec décision spéciale et motivée.

Si la circonstance aggravante n'est pas retenue, il encourt seulement 30 ans. Les deux autres accusés, jugés pour l'avoir aidé dans sa fuite, risquent des peines de trois ans de prison, six avec la récidive.

Le verdict est très attendu côté police. "Il faut que ça fasse date", a demandé en marge de l'audience Yann Combe, délégué départemental Unsa-Police.

Article original publié sur BFMTV.com