Mario Vargas Llosa : « Les écrivains français m'ont sauvé du stalinisme ! »

Prix Nobel de littérature en 2010, Mario Vargas Llosa rejoint aujourd'hui l'Institut de France.  - Credit:EMMANUEL DUNAND / AFP
Prix Nobel de littérature en 2010, Mario Vargas Llosa rejoint aujourd'hui l'Institut de France. - Credit:EMMANUEL DUNAND / AFP

Madame le Secrétaire perpétuel, Mesdames et Messieurs de l'Académie.

Au temps de mon enfance, la culture française était souveraine dans toute l'Amérique latine ainsi qu'au Pérou. « Souveraine », cela veut dire que les artistes et les intellectuels la tenaient pour la plus originale et consistante, et les gens frivoles aussi l'adoraient en y voyant la consécration de leurs rêves, ce voyage à Paris qui, d'un point de vue artistique, littéraire et sensuel, était la capitale du monde. Et aucune autre ville n'aurait pu lui disputer sa couronne. C'est avec ces idées que j'ai grandi et me suis formé, en lisant des auteurs français parmi lesquels se détachaient deux futurs adversaires potentiels : Jean-Paul Sartre et Albert Camus. C'était au temps de l'existentialisme, qui régnait aussi à Lima, du moins dans l'arène littéraire de San Marcos, l'université que j'avais choisie, à l'encontre des miens qui me voyaient plutôt élève discipliné des curés à la Catholique, cette université privée fréquentée alors par les jeunes Péruviens de bonne famille.

À LIRE AUSSIMario Vargas Llosa élu à l'Académie françaiseJe n'ai jamais regretté d'avoir préféré à la Catholique l'université de San Marcos, une des plus anciennes d'Amérique latine, fondée par les Espagnols quelques années après la Conquête, et dont les étudiants, d'humble origine, souvent paysanne, lui avaient valu, sous la République, la réputation de rebelle et de radicale par son énergique opposition à toutes les dicta [...] Lire la suite