Manif contre l’A69 entre Toulouse et Castres : les images fortes de la journée

Des milliers de manifestants se sont réunis à Saïx, dans le Tarn, pour protester contre la construction d’une route qu’ils jugent contraire à l’urgence climatique.

MANIFESTATION - Un rassemblement bon enfant et sans heurt. Plusieurs milliers d’opposants à l’autoroute A69 Toulouse-Castres ont manifesté en pleine campagne ce samedi 22 avril à Saïx, dans le Tarn pour dénoncer un projet qu’ils jugent contradictoire avec l’urgence climatique et réclamant « moins de goudron ».

Dansant au rythme des percussions, parfois sous la pluie, environ 8 200 personnes selon les organisateurs, 4 500 selon la préfecture, ont marché tout l’après-midi sur des sentiers et à travers bois, suivant une partie du tracé de la future autoroute. La mobilisation s’est déroulée dans une ambiance festive, mais elle était sous haute surveillance.

Certains manifestants brandissaient des banderoles : « Moins d’énergie, moins de voitures, moins de goudron » ou « A69, une autoroute en cul-de-sac qui se finira en tête à queue ». D’autres slogans ont été tagués comme « A69 sortie de route » sur un panneau de directions ou « Ni à 64, ni A69 », en référence à la réforme des retraites, sur une 2x2 voies.

Des manifestants contre l’autoroute 69 qui doit relier Toulouse à Castres, le 22 avril 2023.
Des manifestants contre l’autoroute 69 qui doit relier Toulouse à Castres, le 22 avril 2023.

Un petit mur de béton a également été construit au milieu de la route nationale où passait la manifestation avec l’inscription « L’A69 ne passera pas. » Le but, ont expliqué les organisateurs aux journalistes : « bloquer les engins qui doivent passer là pour poursuivre le chantier ».

Organisateurs de la mobilisation, le collectif La voie est libre, Extinction Rebellion, la Confédération paysanne et les Soulèvements de la Terre (SLT) ont demandé « l’arrêt immédiat » des travaux. Lors d’une conférence de presse, ils ont à nouveau proposé un aménagement de la nationale existante et dénoncé la perte de terres agricoles ou de biodiversité qu’entraînerait la construction de cette portion d’autoroute de 53 km.

Protéger les terres agricoles et la biodiversité

Dénonçant aussi « une injustice sociale organisée », ils ont déploré le coût du trajet Toulouse-Castres, qui pourrait atteindre 17 euros aller-retour. Des élus du Tarn ont dénoncé un projet en « totale contradiction avec l’urgence climatique », tandis que d’autres le soutiennent car il réduirait d’une vingtaine de minutes le trajet Castres-Toulouse en 2025, d’une durée d’un peu plus d’une heure aujourd’hui

« Si on veut être cohérent, ce projet doit être abandonné », a pour sa part estimé le député LFI Manuel Bompard, présent dans la manifestation. « Nous, on est là pour la préservation des terres agricoles et aussi pour la préservation de la biodiversité », a ajouté Monique, manifestante sexagénaire qui préfère taire son nom.

« C’est un projet qui date des années 90, qui pense le territoire et l’aménagement du territoire uniquement avec la voiture et les autoroutes. Et en fait ça, c’est plus possible ! », a déclaré à l’AFP Sandrine Rousseau, députée EELV, venue aussi sur place, estimant qu’« il n’y a vraiment pas besoin d’une autoroute en plus ».

Le traumatisme de Sainte-Soline

Moins d’un mois après les affrontements entre gendarmes et opposants aux « mégabassines » à Sainte-Soline (Deux-Sèvres), les autorités suivent de près cette mobilisation. Le préfet du Tarn, François-Xavier Lauch, avait précisé vendredi que les 800 gendarmes et policiers mobilisés resteraient en retrait si la manifestation est « pacifique ».

Depuis plusieurs semaines, la contestation se centrait à Vendine, en Haute-Garonne, à la limite du Tarn, où des opposants s’étaient installés dans des platanes pour en éviter l’abattage.

Cette fois, le rassemblement s’est tenu à Saïx, 37 km plus loin, où débats, concerts et autres activités sont prévus tout le week-end. Vendredi, des centaines de militants de diverses régions avaient installé deux chapiteaux, des tentes, un bar et une cantine sur une surface équivalant à une dizaine de terrains de foot.

Samedi des participants ont disputé une course de caisses à savon, ou « bolides » allant « le plus lentement possible ».

La course s’est terminée en bataille de peau de bananes, comme vous pouvez le constater sur la video du média Blast présent sur place.

Atosca, concessionnaire privé de l’A69, juge le projet « exemplaire » pour l’environnement ou l’emploi. Concernant les terres agricoles, l’emprise prévue a été réduite de 380 à 300 hectares, selon son directeur général Martial Gerlinger.

Le ministère des Transports a précisé vendredi que Clément Beaune avait demandé dès janvier une revue des sept projets autoroutiers en cours, « au regard des enjeux actuels : lutte contre l’artificialisation des sols, réduction des émissions de CO2, mais aussi désenclavement des territoires ».

Les travaux ont déjà commencé

Celui de l’« A69 ne fait pas exception », ajoute le ministère, en nuançant du fait de son avancement : « Les travaux ont débuté, et un contrat engageant l’État a été signé avec le concessionnaire ».

Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait averti vendredi qu’« on peut en débattre, mais pas en découdre », ajoutant qu’il n’y a « pas de renseignement qui démontre que dans le Tarn les gens aient une envie absolue de violence ». Des déclarations en deçà de ses propos du 5 avril, classant l’A69 parmi 42 projets « susceptibles de faire naître des contestations extrêmement violentes ».

Des opposants l’avaient accusé de « mettre le feu aux poudres », dans une région où le souvenir de Rémi Fraisse reste présent. Le 26 octobre 2014, ce militant écologiste de 21 ans avait été retrouvé mort sur le chantier du barrage de Sivens (Tarn), à une soixantaine de kilomètres de Saïx, après des affrontements d’opposants avec les forces de l’ordre.

Cinq mois plus tard, le projet était abandonné au profit d’une retenue d’eau réduite de moitié, et le gouvernement faisait évacuer le site occupé pendant seize mois par des « zadistes ».

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