Macron au Gabon pour le One Forest Summit : pourquoi ce choix symbolique pour parler des forêts ?

Macron au Gabon : pourquoi ce choix symbolique pour parler « forêts » ? (photo d’illustration prise le 19 juin 2020)
Macron au Gabon : pourquoi ce choix symbolique pour parler « forêts » ? (photo d’illustration prise le 19 juin 2020)

POLITIQUE - Au chevet de l’un des poumons de la planète. Emmanuel Macron arrive au Gabon ce mercredi 1er mars pour coprésider un sommet dédié à la préservation des forêts tropicales, organisé à Libreville jusqu’à jeudi. Le chef de l’État se rendra ensuite en Angola puis au Congo et en République démocratique du Congo (RDC), pour une tournée de cinq jours au total en Afrique centrale.

Avant de parler agriculture, santé ou sécurité à Kinshasa ou Libreville, le président de la République fait donc un arrêt de deux jours dans la capitale gabonaise pour une nouvelle édition du One Forest Summit, une des branches du One Planet, un format qu’il a lancé en 2017 pour réunir des acteurs divers dans la lutte contre le changement climatique et la protection de la biodiversité.

Organisé au lendemain de la Cop15 de Montréal, ce grand raout international doit permettre des avancées sur la « mise en œuvre » de l’accord signé par 190 pays en décembre dernier au Canada pour la sauvegarde de 30 % des terres et des mers de la planète. Mais pourquoi faire cela au Gabon ? Ce choix plein de symboles ne doit rien au hasard.

Champion de la captation de CO2

À Libreville, ce sont les forêts tropicales du bassin du Congo que le président français veut mettre à l’honneur, une zone géographique qui s’étend sur 3,6 millions de kilomètres carrés et six pays différents.

« Le bassin du Congo est sans doute moins regardé que l’Amazonie à l’échelle de la communauté internationale, et pourtant, le bassin du Congo est aujourd’hui le premier poumon forestier de la planète », assure un conseiller élyséen, avant le décollage du président pour le Gabon, en citant les nombreuses vertus de ces gigantesques forêts.

En termes de superficie, le bassin du Congo est le deuxième massif forestier tropical après la forêt amazonienne. Il capte, en revanche, davantage de CO2 que son cousin d’Amérique du Sud, à en croire plusieurs études récentes. Il absorberait ainsi 0,61 milliard de tonnes chaque année, soit l’équivalent de dix ans d’émissions mondiales de CO2, quand, dans le même temps, l’Amazonie n’en capte que 0,1.

« Il n’y aura pas de victoire dans la lutte contre le changement climatique ou dans la préservation de la biodiversité sans le concours de l’Afrique »
Élysée

Quant au Gabon, le pays qui accueille ce sommet, il s’agit du premier État africain à avoir été rémunéré pour la protection de ses forêts grâce aux crédits carbone. Un outil qui était au cœur des discussions de la COP27 sur le climat.

L’objectif est donc de mettre la lumière sur les enjeux et les menaces qui touchent ce bassin essentiel, lui aussi soumis à la déforestation. Mais pas uniquement. L’Élysée insiste sur les « solutions » qui seront mises à l’honneur, car « c’est aussi à cette échelle que se développent les pratiques exemplaires en matière de gestion forestière. »

« La philosophie de ce sommet, ce n’est pas de réinventer à nouveau les grandes cibles internationales, c’est de démontrer qu’il est possible d’y arriver avec des solutions qui permettent de concilier protection exigeante de la forêt et intérêts économiques directs des pays forestiers », explique encore un conseiller, en citant trois axes : la science, les chaînes de valeur et les financements.

Présence critiquée

Plus globalement Emmanuel Macron entend mettre l’accent sur la nécessité de nouer des partenariats avec le continent, dans de nombreux domaines, dont l’environnement ne fait pas exception. « Il n’y aura pas de victoire dans la lutte contre le changement climatique ou dans la préservation de la biodiversité sans le concours de l’Afrique », prévient-on encore à l’Élysée, convaincu de la « centralité » du continent dans le « traitement des enjeux globaux. » C’est l’un des fils que le président de la République va tirer au cours de sa tournée. Avec quel résultat ?

À Libreville, des voix s’élèvent pour critiquer les contours du One Forest Summit et la présence du président de la République à six mois de l’élection présidentielle gabonaise. Interrogé par l’AFP, le militant pro démocratie et défenseur de l’environnement Marc Ona Essangui, regrette que « le débat sur le climat ne soit même plus abordé » dans le pays.

« Ce que l’on retient, c’est la venue d’Emmanuel Macron qui vient adouber son candidat », assène-t-il, en référence à l’actuel dirigeant Ali Bongo Ondimba, tandis qu’à l’Élysée on promet « stricte neutralité » par rapport à ces échéances.

S’il évoque un rendez-vous « important », bien que pas assez « inclusif », le militant estime surtout que le symbole du Gabon comme nation pionnière n’est pas forcément si bien choisi. Le pays « n’est pas un modèle de conservation comme il le prétend, notamment concernant l’attribution des permis forestiers », pointe-t-il, avec « 80 % du territoire attribué à l’exploitation forestière. Ajoutez à cela les permis miniers et pétroliers, il n’y a plus d’espace pour la préservation. » De là à dire que le sommet cache la forêt.

À voir également sur Le HuffPost :

Salon de l’agriculture : le militant plaqué par la sécurité de Macron a porté plainte

Afrique : Macron promet une loi pour encadrer les « restitutions » d’œuvres d’art