Des médias tunisiens pris de court

Sur le site du journal Le Quotidien, on en est resté à l’actualité de l’avant-veille. Une photo du président déchu Ben Ali avec ces mots faussement gaulliens : “Je vous ai compris”. Sur le site du quotidien Le Temps, un peu plus de réactivité : on peut y lire la déclaration du Premier ministre Mohamed Ghannouchi – éphémère président par intérim - ainsi qu’un intéressant éditorial de Raouf Khalsi comparant la chute de l’ancien président Bourguiba en 1987 à celle de Ben Ali. Et affirmant qu’en fin de compte il n’existe qu’une seule “présidente à vie”, la Tunisie elle-même . Détail qui ne manque pas d’ironie, la bannière qui est au-dessus de la page d’accueil du site du Temps affirme en gros caractères : “On a toujours le choix, on est même la somme de nos choix”. Il ne s’agit pas de la Tunisie (pas encore) mais d’une offre publicitaire pour les entrepreneurs !

Tunis Hebdo comme Réalités, un autre hebdo, n’ont pas changé leurs sites. Quant au site de la Télévision tunisienne, il est toujours décoré de multiples photos de Ben Ali ! Radio Kalima, sans doute le seul média indépendant au Maghreb (Algérie et Tunisie), indique le changement de pouvoir et signale aussi le retour le vendredi 14 janvier à Tunis de Sihem Bensedrine. Cette opposante historique pourrait jouer en effet un rôle important dans le front démocratique qui se mettra en place pour les législatives prochaines.

A l’extérieur, les médias d’opposition sont eux aussi pris de court par la vitesse des événements. Sur nawaat.org, où l’on avait pu voir un certain nombre de photos et de documents concernant la révolte des jeunes, on peut seulement lire une analyse d’Abdallah Rihani intitulé “Changement de siècle en Tunisie”. Sur l’avenir proche, Abdallah Rihani (politologue installé à Montréal) reste prudent. Tout au plus dit-il que la Tunisie ne manque pas de gens compétents pour gérer les affaires du pays : “Tous ceux qui prétendent encore et toujours que l’opposition tunisienne n’est pas une alternative crédible, devront se taire. Les hommes et les femmes qui n’ont jamais plié devant le tyran et sa terreur durant la totalité de son règne, ces hommes et ces femmes sont ce qu’il y a de plus honorable et respectable parmi les intellectuels et les instruits et honnêtes gens de ce pays. Ils sont à la disposition du peuple en marche. Ils sauront nettoyer le pays de toute la crasse dont l’a comblé le médiocre militaire, sa famille et ses proches. En Tunisie je ne citerais que Mohammed Abbou et Radhia Nasraoui qui pourraient constituer un gouvernement de transition avec la garantie que le mouvement social se reconnaitra en eux. Mais Marzouki, Chebbi, Jribi, Hammami, Larayedh, Hajji, Ghannouchi, Ben Sedrine et autres cadres syndicaux, des centaines d’autres, sont autant d’hommes et de femmes dignes, probes, courageux et compétents.”

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