Liz Truss pour remplacer Boris Johnson à Downing Street ?

(FILES) In this file photo taken on June 07, 2022 Britain's Foreign Secretary Liz Truss arrives to attend a Cabinet meeting at 10 Downing Street in London. - After a gruelling nationwide tour, a dozen hustings and three televised debates, Liz Truss appears poised to take over as the UK's next prime minister heading into the close of voting by Conservative party members on Friday. (Photo by Niklas HALLE'N / AFP)

NIKLAS HALLE'N / AFP

Liz Truss est la favorite pour remplacer Boris Johnson à Downing Street le 5 septembre 2022.

ROYAUME-UNI - L’heure de la succession est arrivée. Ce lundi 5 septembre, Boris Johnson va connaître le nom de son remplaçant au 10 Downing Street après sa démission contrainte début juillet causée par les départs en cascade des ministres excédés par ses scandales à répétition. Sauf coup de théâtre, Liz Truss, actuelle ministre des Affaires étrangères, devrait être choisie par les membres du parti conservateur pour le remplacer.

Endurcie par un riche parcours politique, Liz Truss s’est imposée comme la grande favorite dans la course à Downing Street face à Rishi Sunak, ex-ministre des Finances qui a été l’un des premiers à démissionner et resté prisonnier de son image de riche banquier technocrate.

Le vote s’est terminé vendredi et les résultats seront connus ce lundi à la mi-journée. « Cela sera une très très grande surprise si elle ne gagne pas », explique à l’AFP John Curtice, politologue à l’université de Strathclyde, relevant la capacité de la ministre à « séduire politiquement les adhérents conservateurs et articuler un message clair pour eux ».

Ralliée au conservatisme et au Brexit sur le tard la ministre de 47 ans a séduit la base du parti au pouvoir, 160 000 adhérents surtout des hommes âgés et blancs très à droite, qui départagent les finalistes à la succession de Boris Johnson. Ses références régulières à Margaret Thatcher y sont pour beaucoup.

Contre le Brexit en 2016

Liz Truss a derrière elle une carrière politique parfois tortueuse. Née le 26 juillet 1975 dans une famille très à gauche, elle a d’abord milité au parti centriste Libéral-Démocrate avant de rejoindre en 1996 les conservateurs, pour qui elle devient députée en 2010, pour la circonscription de South West Norfolk (est de l’Angleterre).

Depuis 2012, elle a enchaîné les postes dans les ministères (Éducation, Environnement, Justice puis secrétaire en chef du Trésor). Elle a connu défaites et revers : elle a failli perdre l’investiture aux législatives en raison d’une aventure extraconjugale et a été rétrogradée par Theresa May après un passage difficile à la Justice.

Elle aurait pu aussi payer son vote contre le Brexit en 2016. Mais elle en est devenue l’une des plus ferventes supportrices, négociant et vantant de nouveaux accords de libre-échange au ministère du Commerce international.

Margaret Thatcher, un modèle

Nommée en 2021 à la tête de la diplomatie britannique - manière pour Boris Johnson de contrôler ses ambitions -, elle se montre intransigeante face à l’Union européenne sur l’Irlande du Nord, et incarne avec Boris Johnson la fermeté contre la Russie après l’invasion de l’Ukraine. Une position contraire à celle d’Emmanuel Macron, partisan du dialogue avec Vladimir Poutine.

Elle alimente des comparaisons avec Margaret Thatcher, ultra-populaire dans la majorité et plaît aux conservateurs avec son discours dur envers les syndicats. Parfois jugée raide, elle est apparue plus détendue ces dernières semaines, tandis que ses alliés la décrivaient en bonne vivante amatrice de fromage et de karaoké. Elle est aussi considérée comme loyale, puisqu’elle est l’une des rares à ne pas avoir démissionné de son poste en juillet dernier.

« Dans un parti qui a évolué vers le populisme, elle a su se présenter de manière plus authentique, plus ordinaire que Rishi Sunak qui se retrouve facilement assimilé à l’élite mondialisée », relève aussi Tim Bale, professeur à l’université Queen Mary de Londres. « Comme Boris Johnson, elle défend l’idée d’une élite qui doit être contrée et se présente comme extérieure à l’establishment, bien qu’elle soit au gouvernement depuis huit ans », ajoute-t-il.

Liz Truss promet de baisser les impôts

Pour plaire à son électorat, elle s’est engagée à réduire les impôts pour stimuler la croissance et réduire la bureaucratie. Si elle est élue, elle « se concentrera sur les prix de l’énergie pour les consommateurs et sur la manière de relancer l’économie britannique » et a assuré avoir « un projet audacieux qui va faire croître l’économie ».

Mais la pression sera considérable pour agir vite. La crise du coût de la vie a pris un tour dramatique au Royaume-Uni, avec l’annonce d’une hausse de 80 % des factures d’énergie pour les ménages en octobre qui pourrait porter l’inflation, déjà à plus de 10 %, jusqu’à 22 % selon les prévisions les plus alarmistes.

De nombreux foyers se demandent déjà comment ils vont pouvoir payer leurs factures cet hiver. De nombreuses grèves et manifestations dans tous les corps de métier ébranlent le pays depuis plusieurs semaines pour la hausse des salaires. Le mouvement « don’t pay UK », dont les membres refusent de payer les factures d’énergie face à l’explosion des coûts, a aussi été lancé.

La tension entre France et Royaume-Uni ne va pas de retomber

Côté international ses positions dures, notamment sur le Brexit, risquent de tendre encore plus la relation du Royaume-Uni avec l’Europe, et la France. Pour Elvire Fabry, chercheuse spécialiste du Brexit interrogée par Le JDD, « Liz Truss se veut la réincarnation de Thatcher et entend renouer avec le libéralisme traditionnel du Parti conservateur. Elle voudra se montrer plus dure que Johnson et reprendre l’épée d’un affrontement très personnel ».

Liz Truss a ainsi surpris lorsqu’elle a refusé de dire si Emmanuel Macron était « un ami ou un ennemi » pendant la campagne. Elle a dit qu’elle jugerait le président français « sur ses actes ». « Le jury est toujours en train de délibérer », a-t-elle ajouté, faisant rire la salle.

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Invité à réagir sur la réponse ambiguë de Liz Truss, Emmanuel Macron s’est permis une petite mise en garde quelques heures plus tard : « Ce n’est jamais bon de trop perdre ses repères dans la vie. Si on me posait la question, quelle que soit la personne à considérer, je ne m’interroge pas une seule seconde : le Royaume-Uni est ami de la France. Nous vivons dans un monde compliqué, si on n’est pas capables, entre Français et Britanniques, de dire si l’on est ami ou ennemi - le terme n’est pas neutre - on va vers de sérieux problèmes. »

Pas de bon augure pour les nombreux dossiers de contentieux qui existent entre la France et le Royaume-Uni. Parmi eux, la gestion des dossiers de l’après-Brexit, que ce soient la pêche ou l’Irlande du Nord, la question des traversées des migrants du Nord de la France vers l’Angleterre, ou encore les rejets d’eaux usées non traitées par les entreprises britanniques dans la Manche.

À voir également aussi sur le HuffPost : « Hasta la Vista, baby » : Boris Johnson se la joue « Terminator » pour son dernier show à la Chambre

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