Le Mali "en guerre" contre les séparatistes touaregs

par Adama Diarra KIDAL Mali (Reuters) - Le Premier ministre malien Moussa Mara a déclaré dimanche l'état de guerre, au lendemain de combats meurtriers entre soldats maliens et séparatistes touaregs qui ont enlevé une trentaine de fonctionnaires à Kidal, dans le nord du pays. Le nouveau chef du gouvernement, désigné le mois dernier, a été rattrapé par l'instabilité à l'occasion de son premier déplacement dans la ville du Nord, où une fusillade a éclaté peu avant son arrivée samedi. Parmi les victimes des affrontements figurent notamment au moins huit soldats maliens, selon le chef du service d'information de l'armée nationale, ainsi que six fonctionnaires et deux civiles, selon la mission des Nations unies (Minusma). "Le bilan est de huit morts et 25 blessés du côté de l'armée, de 28 morts et 62 blessés du côté des groupes armés", a dit à la radio le chef du service d'information de l'armée, le colonel Souleymane Maifa. La Minusma a précisé que 21 membres des forces de police de l'Onu avaient été blessés, dont deux souffrent de graves blessures par balles. Le gouvernement a dépêché des renforts, y compris des unités des forces spéciales avec pour "objectif de reprendre la totalité de Kidal", a-t-on dit de source militaire. D'après le gouverneur local, une trentaine de fonctionnaires ont été enlevés par les séparatistes du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA). "Prenant en compte cette déclaration de guerre, la République du Mali est dorénavant en guerre", a dit Moussa Mara à Reuters à l'intérieur de la base militaire où il a été contraint de se réfugier. Moussa Mara a critiqué à la fois la force française Serval et celle des Nations unies pour n'avoir pas su prévenir les affrontements de samedi. Il a dénoncé leur "passivité". "Le moins qu'on pouvait attendre de la Minusma et de Serval, c'était de s'assurer que les bureaux du gouverneur ne soient pas attaqués", a-t-il insisté. Un porte-parole du MNLA a affirmé dimanche que le mouvement touareg contrôlait Kidal. "Nous avons fait une quarantaine de prisonniers, notamment des officiers de haut rang et des fonctionnaires. Ils sont tous sains et saufs, ils vont bien", a précisé Attaye Ag Mohamed par téléphone à Reuters. LE MNLA DIT CONTRÔLER KIDAL Il a précisé que le MNLA entendait libérer les fonctionnaires enlevés. "Nous ne les qualifions pas d'otages. Ce sont des survivants sous notre protection. Ils vont être prochainement libérés car ce sont des civils", a-t-il dit, ajoutant que 15 soldats étaient également captifs et considérés comme des prisonniers de guerre. Il a ajouté que la Minusma avait appelé à un cessez-le-feu et que la ville était calme dimanche. Adama Kamissoko, le gouverneur régional, a annoncé dimanche matin qu'une trentaine de fonctionnaires maliens avaient été enlevés par les séparatistes qui, a-t-il dit, ont attaqué le siège de son administration. "Nous avons 23 blessés, dont trois dans un état grave qui ont été évacués par hélicoptère", a-t-il ajouté. Ces affrontements, nouvelle illustration de l'instabilité du Mali seize mois après l'arrivée des forces françaises de l'opération Serval, se sont produits peu avant l'arrivée samedi du Premier ministre. La réunion qui était prévue entre Moussa Mara et le gouverneur a dû être annulée. Selon un porte-parole des séparatistes du MNLA, les combats ont éclaté samedi matin quand l'armée a ouvert le feu sur le casernement du mouvement touareg après des manifestations pro-indépendance dans la ville. Une source militaire malienne a réfuté cette version, affirmant que les tirs avaient débuté lorsque des séparatistes armés du MNLA circulant à bord de deux pick-up ont attaqué un barrage tenu par l'armée devant le bâtiment abritant les services du gouverneur. Un journaliste de l'agence Reuters accompagnant le Premier ministre a vu le corps d'un soldat malien mort transporté dans une base militaire de la ville où Moussa Mara a dû passer la nuit. Dans son discours de politique générale, fin avril, le nouveau chef du gouvernement malien avait affiché son intention de renouer le dialogue avec les groupes armés toujours présents dans le nord du pays. (Henri-Pierre André, Guy Kerivel et Simon Carraud pour le service français)