L'élection présidentielle perturbée par le Covid, à quel point?

COVID-19 - Alors que l’arrivée du variant Omicron provoque une véritable flambée épidémique, que va-t-il advenir de l’élection présidentielle, qui se tient dans un peu plus de quatre mois à peine? Officiellement, le gouvernement jure que le calendrier sera maintenu. “Ce n’est ni sur la table, ni en dessous, ni dans le placard près de la table, nous voterons en avril”, a balayé d’un revers de main Gabriel Attal, interrogé sur France 2 sur un possible report de l’élection suprême. Lors d’un point presse suivant le Conseil des ministres, ce mercredi, il s’est fait l’écho de la promesse d’Emmanuel Macron: “les échéances démocratiques seraient maintenues”.

Même son de cloche pour le ministre de la Santé. “Non”, a tout simplement répondu Olivier Véran à Jean-Jacques Bourdin qui l’interrogeait sur une possible “annulation” de l’élection présidentielle. Pour autant, il semble admis au sein de l’exécutif que ce rendez-vous démocratique ne se déroulera pas dans des conditions normales.

Quelles “modalités”?

Ce mercredi 22 décembre, Le Parisien révèle que le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, en charge de l’organisation de l’élection, a demandé un rendez-vous avec le président du Conseil constitutionnel, Laurent Fabius. Au menu des discussions, “les modalités de scrutin dans le contexte sanitaire”. Une rencontre annonciatrice d’aménagements à venir? Pas si simple. Lors du travail réalisé en amont des élections régionales, l’exécutif redoublait d’arguments pour enterrer l’idée du vote par correspondance comme réponse aux contraintes sanitaires.

D’autant que si certains, à l’instar du candidat écologiste Yannick Jadot, se prononcent pour ce mode de scrutin, d’autres y sont particulièrement hostiles, à l’image de Marine Le Pen. Ce qui rendrait l’instauration de cette mesure particulièrement inflammable sur le plan politique. Reste alors la question d’un report, alors que le premier tour doit se tenir le 10 avril. Mais est-ce faisable?

“Rien n’interdit le 15 mars par exemple de modifier la Constitution. Cela peut se faire en huit à dix jours, avec une loi constitutionnelle qui modifie la durée du mandat du président en cours”, explique dans le JDD le constitutionnaliste Didier Maus, avant d’émettre une grosse réserve sur la faisabilité du processus: “pour que cela fonctionne, il faut que l’Assemblée et le Sénat soient d’accord”. Ce qui, en pareil contexte, paraît politiquement impossible.

La délicate question des meetings

Au-delà du vote, l’autre levier serait d’instaurer des mesures sanitaires sur la campagne, comme l’obligation de la présentation d’un pass sanitaire pour participer à un meeting, ce que n’avait pas demandé Éric Zemmour à ses quelque 12.000 partisans rassemblés à Villepinte. Mais là encore, cela paraît compliqué sur le plan constitutionnel.

Le 9 novembre, dans leur décision sur le projet de loi de vigilance sanitaire, les Sages s’étaient montrés catégoriques: “la présentation du ‘pass sanitaire’ ne peut être exigée pour l’accès aux bureaux de vote ou à des réunions et activités politiques”. Du moins, en l’état actuel de la loi. “Ce n’était pas un refus de principe, mais l’affirmation d’une interprétation stricte de la loi, qui cantonne strictement le pass sanitaire aux activités de loisir”, précise au HuffPost, Jean-Philippe Derosier, juriste spécialiste du droit constitutionnel. “On pourrait très bien imaginer une loi qui oblige, sous conditions, les organisations politiques à exiger un pass sanitaire à leurs militants à partir d’un certain seuil”, poursuit-il.

En outre, l’exécutif imagine mal pouvoir empêcher la tenue de ces méga-meetings qui sont essentiels dans le cadre d’une campagne présidentielle puisque, retransmis à la télévision, ils permettent de “de montrer qu’il y a une dynamique” et de “transmettre du désir aux électeurs”, expliquait récemment au HuffPost, Philippe Moreau-Chevrolet, professeur en communication politique à Sciences Po. D’autant qu’il arrivera bien un moment où Emmanuel Macron aura (aussi) besoin de ces belles images pour sa propre campagne.

Reste alors à savoir si les candidats prendront le risque d’organiser de telles réunions malgré le contexte sanitaire. Le 15 janvier, Marine Le Pen a prévu un grand meeting à Reims pour donner un coup de boost à sa campagne perturbée par le variant Éric Zemmour. Le lendemain, c’est Jean-Luc Mélenchon qui donnera un meeting à Nantes. En cas d’aggravation de la situation épidémique, les deux candidats pourront-ils maintenir ces événements? Réponse dans quelques jours.

À voir également sur Le HuffPost: Le pass sanitaire va devenir un pass vaccinal, annonce Jean Castex

Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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