Législatives 2024 : Au RN, il n’y a pas que Jordan Bardella qui a du mal à débattre

Dimitar Dilkoff/AFP
Dimitar Dilkoff/AFP

POLITIQUE - La peur du débat est-elle une qualité requise chez les candidats du Rassemblement national (en plus de tout le reste) ? Sur le modèle du grand chef, Jordan Bardella, qui snobe ostensiblement Marine Tondelier et qui refuse qu’un affrontement soit organisé en direct à la télévision avec elle, les candidats d’extrême droite aux législatives se font discrets à l’heure de porter la contradiction à leurs adversaires locaux.

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Le réseau de radio France Bleu, présent partout en France, révèle avoir dû annuler une vingtaine d’émissions à cause du refus des candidats RN d’y participer. Sur France 3, c’est pareil. En Alsace, dans le Loiret, en Indre-et-Loire, dans les Pyréenées-Orientales... Les exemples se multiplient. À chaque fois, les raisons invoquées sont les mêmes : agenda surchargé, contraintes personnelles et professionnelles, agressivité du camp adverse voire empêchements de dernière minute...

« Face à une chaise vide »

Dans le Périgord, la référente RN a dû ramer pour expliquer pourquoi les candidates en lice pour le second tour dans le département ne souhaitaient pas débattre. « L’une d’elles a un enfant qui est gendarme et elle n’a pas envie d’avoir en face d’elle quelqu’un qui considère que la police tue », a-t-elle déclaré. Le journaliste lui a fait remarquer que si elle est élue à l’Assemblée, « elle devra discuter avec tout le monde ». Ce à quoi Florence Joubert n’a pas su quoi répondre.

Dans la Somme, le Courrier Picard avait organisé un échange entre le député sortant François Ruffin et son opposante RN. « Surprise, je me retrouve face à une chaise vide ! Si elle n’ose pas venir ici pour débattre avec moi, comment va-t-elle défendre à Paris nos emplois, nos usines, nos écoles, nos hôpitaux ? », a-t-il ironiquement écrit sur X. De fait, il s’est retrouvé seul à répondre aux questions des journalistes.

Faut-il voir dans ces refus une consigne donnée en haut-lieu face à une éventuelle peur du bad buzz ? Laquelle révélerait des lacunes et des impréparations béantes ? Sur les réseaux sociaux, nombres de vidéos montrent des aspirants députés RN laissant planer d’interminables hésitations, se révèlant finalement incapables de répondre aux questions posées. Les séquences sont désastreuses pour l’image d’un parti qui cherche à paraître respectable. Ainsi, à Saint-Malo, Dylan Lemoine a évoqué lors d’un débat tenu lundi 1er juillet « l’insécurité énorme » à Dol-de-Bretagne (Ille-et-Vilaine) en raison, selon lui, de l’ouverture d’un centre pour mineurs étrangers. Problème : celui-ci n’est toujours pas ouvert.

Propos racistes, anti-IVG...

Il y a ensuite la volonté, de la part du RN, de ne pas réveiller de vieux démons qui constituent pourtant l’ADN du parti. Mardi 2 juillet, lors d’une confrontation organisée par France Bleu Dordogne, la représentante du RN s’est explicitement montrée hostile à l’avortement, expliquant : « Je suis contre les 220.000 IVG par an ». Dans l’Yonne, le candidat Daniel Grenon est accusé d’avoir tenu des propos ouvertement racistes lors d’un débat organisé face à la candidate du Nouveau Front populaire : « Des Maghrébins sont arrivés au pouvoir en 2016, ces gens-là n’ont pas leur place dans les hauts lieux ». Il se défend en évoquant des propos tronqués mais l’indignation est générale, d’Éric Dupond-Moretti à Olivier Faure.

Le patron du RN Jordan Bardella a tenté de répondre à ce procès en amateurisme. « Ce n’est pas parce qu’on n’est pas une bête médiatique qui enchaîne dix plateaux télé par jour qu’on est une mauvaise personne, ou qu’on n’est pas sincère dans ses convictions », a-t-il exprimé au micro de France Bleu. Tout en reconnaissant que des profils problématiques se cachent parmi les investitures du RN, qu’ils qualifient de « brebis galeuses ». Des chevrotantes aussi.

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