Journée internationale des droits des femmes : l’argent, au cœur des inégalités

Écarts de salaires, capacités d’emprunt inférieures, répartition des dépenses désavantageuse dans le couple… les inégalités économiques sont nombreuses.
Écarts de salaires, capacités d’emprunt inférieures, répartition des dépenses désavantageuse dans le couple… les inégalités économiques sont nombreuses.

8 MARS - Si l’argent est le nerf de la guerre, il est aussi celui des inégalités femmes-hommes. Et ce, de l’enfance jusqu’au troisième âge, comme le prouve une fois de plus le projet de réforme des retraites du gouvernement, puisque les femmes seront davantage pénalisées par l’allongement de la durée de travail que les hommes.

Une injustice qui vient s’ajouter à de nombreuses autres : inégalités salariales, capacités d’emprunt inférieures, répartition des dépenses désavantageuse dans le couple… Si l’on veut un jour atteindre l’égalité entre les hommes et les femmes, il faut se plonger dans ce sujet trop longtemps considéré comme sale et tabou qu’est l’argent. C’est pour cette raison que Le HuffPost a décidé d’y consacrer un dossier spécial pour la journée internationale des droits des femmes ce mercredi 8 mars.

Dépensières, incompétentes, irresponsables… Les clichés autour des femmes et de l’argent pullulent et renforcent les inégalités. L’un des plus omniprésents est celui de la dépensière frivole, sur lequel nous avons choisi de nous pencher. Selon ce mythe, les femmes seraient plus préoccupées par leur collection de chaussures que par la bonne santé de leur compte épargne. Un lien entre femmes et futilité qui a des conséquences dès l’enfance, puisque les parents auraient tendance à considérer les petites filles comme plus dépensières et à moins faire confiance à leur gestion de l’argent de poche, selon la chercheuse à l’Institut national d’études démographiques, Angèle Jannot. Ces idées reçues pourraient expliquer une première inégalité : toutes les études sur l’argent de poche relèvent des différences de traitement entre filles et garçons.

Des différences de traitement qui se poursuivent à l’âge adulte, aussi bien au niveau des salaires, que du patrimoine - les inégalités entre hommes et femmes dans ce dernier domaine se sont même creusées ces vingt dernières années : elles s’élevaient à 9 % en 1998, mais atteignent 16 % en 2019. En cause notamment ? Les contrats de séparations de bien dans les mariages, selon la sociologue Sibylle Gollac, autrice de « Le Genre du capital », interviewée dans le journal du CNRS.

Car si les femmes célibataires souffrent particulièrement des inégalités économiques (leur capacité d’emprunt est par exemple moins élevée que celle des hommes célibataires), ces inégalités se manifestent aussi intensément au sein du couple. Jusqu’à parfois alimenter les violences conjugales.

Pillage de compte en banque, rétention de carte bleue, interdiction de travailler… Les outils de l’emprise économique sont multiples, comme nous l’ont expliqué des victimes de violences. Une emprise qui rend de nombreuses femmes dépendantes et les empêche de quitter un foyer violent. L’essayiste et autrice de Nos absentes : à l’origine des féminicides, Laurène Daycard, nous a ainsi expliqué que « tout est lié. Les inégalités qui sont dans la société, notamment les inégalités de salaires, ont forcément aussi un impact au sein du couple et ça peut être un terreau propice à des situations de violences et de contrôle conjugal. »

Même dans les foyers sans emprise ni violences, parmi des couples qui s’aiment et aspirent à l’égalité, les écarts persistent. Paradoxalement, c’est parfois la politique du partage des frais à 50/50 qui creuse ces inégalités, dans des schémas familiaux où l’homme gagne souvent plus et où la femme fournit un travail gratuit à travers les tâches ménagères. C’est ce que nous a expliqué l’essayiste Lucile Quillet, qui revendique une « reconnaissance du travail invisible » des femmes dans le couple.

Vous l’aurez compris, la question des inégalités liées à l’argent est vaste et tentaculaire. Présente dans tous les pans de la vie d’une femme, dans les épreuves, comme dans les moments heureux, elle mérite qu’on s’y attarde pour pouvoir enfin viser l’égalité.

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