Jean-Luc Mélenchon ne veut pas « s’imposer » dans ces législatives mais la gauche est obligée de faire avec lui

POLITIQUE - « Le temps que je passe ce matin à commenter Jean-Luc Mélenchon, c’est exactement ce qu’il veut ». Jérôme Guedj, candidat à sa réélection dans l’Essonne, s’agace ce lundi 24 juin sur franceinfo. Le socialiste, en rupture avec la France insoumise, est nouveau interrogé sur Jean-Luc Mélenchon et ses prétentions pour Matignon. À six jours du premier tour, le nouveau Front Populaire (NFP) en revient toujours à cette question : que faire du leader insoumis trois fois candidat à l’Élysée ?

Législatives 2024 : Comment expliquer la cacophonie du nouveau Front populaire sur le choix de son Premier ministre ?

Depuis l’annonce de la dissolution et la naissance du Nouveau Front populaire, Jean-Luc Mélenchon souffle le chaud et le froid. « J’ai l’intention de gouverner ce pays », a-t-il déclaré samedi 22 juin sur le plateau de C l’hebdo. Pourtant, il l’assure, il ne « s’élimine pas » mais ne « s’impose pas » non plus. « Je pense que c’est une formule qui est assez respectueuse du collectif », ajoute-t-il ce 22 juin.

Dans l’Evenement ce lundi soir, questionné sur sa volonté de prendre le poste de Premier ministre il a évoqué d’emblée un « malentendu ». « Je peux être un ministre parmi d’autres ou ne pas être un ministre du tout », a-t-il assuré. « Ce n’est pas ma carrière, tout ça c’est derrière moi », a-t-il insisté.

Ce discours, le fondateur de LFI le tient depuis le 12 juin, quand il s’est exprimé au 20h de France 2. À l’époque, comme le relatait L’Express, les cadres des autres partis de gauche en pleines négociations sur l’alliance retiennent leur souffle, inquiets d’une potentielle déclaration (de candidature) qui ruinerait tous leurs efforts d’union. Après l’interview, le soulagement domine. Mais alors que la campagne s’accélère, le refus de Jean-Luc Mélenchon de se mettre en retrait crispe de plus en plus.

Tir groupé PS, PCF, EELV

Officiellement candidat à rien, il est malgré tout omniprésent, sur ses réseaux sociaux comme dans les médias : samedi sur France 5, ce lundi sur France 2, sur M6 jeudi… À chaque fois, Jean-Luc Mélenchon martèle sa même formule qui lui permet de rester dans le jeu et de faire valoir son expérience et ses compétences pour le poste, n’en déplaise à ceux qui, comme François Hollande, l’exhortent à se taire.

Conséquence directe : rares sont les interviews où les personnalités de gauche échappent à une question sur « Mélenchon à Matignon ? ». François Ruffin le 14 juin dans le Courrier Picard, Sandrine Rousseau sur Sud Radio le 19, Clémentine Autain le 23 dans La Tribune Dimanche, Marine Tondelier sur LCI le même jour… Interrogée sur un risque de « parasitage » de la campagne du nouveau Front Populaire, la cheffe écologiste estime que « la fin de l’histoire est déjà écrite sur le sujet » puisque le nom de Mélenchon ne fait pas consensus et qu’il a promis de ne pas s’imposer. « Vous dites qu’il décide de faire parler de lui, c’est vous qui en parlez. Si tout le monde se dit qu’il n’en parle plus, ce n’est pas un sujet », lance-t-elle en souriant.

Changement de ton moins de 24 heures plus tard. Ce lundi, à quelques heures de L’évènement dont il était l’invité, ce sont les trois chefs de la gauche qui remettent le sujet sur la table dans un tir groupé. Dans un même message publié sur X à quelques minutes d’intervalles, Fabien Roussel et Olivier Faure rappellent que « personne ne peut s’autoproclamer Premier Ministre » et que « les députés du NFP en lien avec leurs partis, choisiront la personnalité qui fait consensus pour rassembler le pays ». Jean-Luc Mélenchon « ne sera pas Premier ministre », assure dans la foulée Marine Tondelier à l’AFP. Comme pour couper l’herbe sous le pied du tribun.

Débattre de Mélenchon (avec ou sans lui)

Car en refusant de « s’éliminer » de façon claire, Jean-Luc Mélenchon donne des armes à ses adversaires, comme vous pouvez le voir dans la vidéo en tête d’article. À l’extrême droite comme dans le camp présidentiel, on présente le Nouveau Front populaire comme soumis à l’Insoumis afin de mieux discréditer l’alliance. « Jean-Luc Mélenchon, c’est très clair, serait le Premier ministre de la France si la coalition NUPES (sic) qu’il dirige, remportait les élections législatives », assure ainsi (et à tort) le Premier ministre Gabriel Attal sur CNews ce 24 juin.

Même discours au RN où Jordan Bardella estime que Jean-Luc Mélenchon est « candidat au poste de Premier ministre » et tance « une partie de la gauche qui cherche à (le) planquer ». Les deux candidats déclarés à Matignon doivent participer mardi (sur TF1) et jeudi (sur France) à deux débats. Pour représenter le nouveau Front Populaire, c’est le coordinateur national de la France Insoumise (Manuel Bompard) puis le Premier secrétaire du PS (Olivier Faure) qui ont été désignés. Mais ce choix ne satisfait ni la Macronie ni l’extrême droite. « Je l’invite (Jean-Luc Mélenchon) à participer à ce débat et à ne pas avancer masqué dans cette élection », a lancé le président du RN ce lundi 24 juin en conférence de presse.

Dès le 13 juin, Jean-Luc Mélenchon a décliné la proposition. « Notre prochain Premier Ministre sera proposé par le groupe parlementaire le plus nombreux en concertation, APRÈS les élections. Les chefs de nos partis nous représentent d’ici-là. (...)Ne désignez pas les représentants des autres. Ne les méprisez pas », a-t-il redit ce lundi 24 juin sur X. Ou comment être « en retrait » sans être « à la retraite ».

À voir également sur Le HuffPost :

Législatives 2024 : le programme du RN sur l’économie n’a rien à voir avec le Front populaire, voici pourquoi

Législatives : la France insoumise, parti antisémite ? D’où viennent ces accusations (et sont-elles fondées) ?