Jacques Delors est mort : revoyez l’annonce de sa non-candidature à la présidentielle de 1995

Le 11 décembre 1994, Jacques Delors est l’invité de l’émission 7sur7 présentée par Anne Sinclair sur TF1. Il annonce qu’il ne sera pas candidat à l’élection présidentielle de 1995.
PATRICK KOVARIK / AFP Le 11 décembre 1994, Jacques Delors est l’invité de l’émission 7sur7 présentée par Anne Sinclair sur TF1. Il annonce qu’il ne sera pas candidat à l’élection présidentielle de 1995.

POLITIQUE - À gauche, il laisse aussi le souvenir d’une douloureuse déception. Jacques Delors, ancien président de la Commission européenne, père de l’euro et figure du Parti socialiste est mort, mercredi 27 décembre, à l’âge de 98 ans. « Il est décédé ce matin (mercredi) à son domicile parisien dans son sommeil », a déclaré sa fille Martine Aubry, maire socialiste de Lille.

Ancien ministre de l’Économie sous François Mitterrand (1981-1984), l’homme avait douché les espoirs de sa famille politique en refusant de se présenter à l’élection présidentielle de 1995 alors qu’il était le grand favori des sondages (Édouard Balladur n’est pas encore candidat), un renoncement spectaculaire à la télévision devant 13 millions de téléspectateurs.

« J’ai décidé de ne pas être candidat à la présidence de la République », annonçait-il sur le plateau de « 7 sur 7 », ce dimanche 11 décembre 1994, face à Anne Sinclair, comme vous pouvez le voir dans ces archives de l’INA. « Le soutien des grands ce monde, l’amicale pression du PS, l’attente d’une partie de l’opinion n’y ont rien fait », s’étonne-t-on alors au journal télévisé de l’époque.

À ce moment, l’homme politique justifie surtout cette décision par des motifs personnels, à savoir son âge et les décennies de vie politique derrière lui, qui lui font préférer « un mode de vie plus équilibré, entre la réflexion et l’action ».

Lionel Jospin remplace Jacques Delors

Mais derrière cette déclaration fracassante se cachent aussi des raisons politiques. Il craint alors les divisions au sein du PS et la possibilité de ne pas obtenir une majorité aux législatives pour mener à bien ses réformes. Quelques semaines plus tard, c’est Lionel Jospin qui endosse la candidature socialiste, arrivant en tête du premier tour mais battu au second par Jacques Chirac.

« Je n’ai pas de regrets, mais je me pose la question. Je ne dis pas que j’ai eu raison. » Jacques Delors, en 2021 dans une interview au Point.

Dans une longue interview publiée par Le Point en 2021, il était revenu sur ce coup de tonnerre, expliquant même que tout s’était joué sur une feuille de papier divisée en deux. Deux jours avant sa déclaration, Jacques Delors avait gribouillé deux colonnes pour énumérer les arguments pour et contre une candidature. « En me couchant, la colonne favorable comptait un argument de plus. J’ai passé une très mauvaise nuit, agitée, indécise et remplie de cauchemars. Au petit matin, j’ai ajouté deux arguments à la colonne de droite… », raconte-t-il.

Deux autres raisons sont en effet venues à l’esprit de l’ex-ministre de l’Économie et se sont ajoutées à la colonne des « contre ». « J’ai considéré qu’une partie du PS ne me soutiendrait pas autant qu’il le faudrait. La seconde, c’est que cette situation risquait de m’empêcher d’agir comme je le croyais bon pour la France », concluait Jacques Delors, signant ainsi, à toutes fins utiles, le début de la fin d’une longue carrière politique.

Ce dernier affirmait ne pas avoir de « regrets ». Mais « je ne dis pas que j’ai eu raison », ajoutait-il. « J’avais un souci d’indépendance trop grand, et je me sentais différent de ceux qui m’entouraient. Ma façon de faire de la politique n’était pas la même ».

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