Avant Izïa et Shaka Ponk, Emmanuel Macron a souvent été attaqué en chanson

De Tryo à Youssoupha, en passant par Damien Saez, le président de la République a été chahuté plus d'une fois par des artistes ces dernières années.

Le groupe Tryo en 2017 aux Francofolies de La Rochelle (Photo XAVIER LEOTY / AFP)
Le groupe Tryo en 2017 aux Francofolies de La Rochelle (Photo XAVIER LEOTY / AFP)

"Ce que le peuple veut, ce dont le peuple a envie, c'est qu'on m'accroche à 20 mètres du sol, telle une piñata humaine géante, et qu'on soit tous ici présents munis d'énormes battes avec des clous au bout". En concert aux Nuits Guitare de Beaulieu-sur-Mer, Izïa a partagé avec le public sa colère envers Emmanuel Macron. Des mots qui font polémique, au point notamment que le maire LR de Marcq-en-Barœul (Nord) a annulé la venue de la fille de Jacques Higelin dans la ville. Avant elle, d'autres artistes s'en étaient déjà pris au président de la République.

  • Shaka Ponk

La scène était jusqu'à présent passée inaperçue, mais elle est largement partagée sur les réseaux sociaux depuis les propos tenus par Izïa à Beaulieu-sur-Mer. Le 25 juin dernier, les Shaka Ponks se produisent lors du festival Solidays, à Paris.

Sur l'écran géant derrière les artistes, on aperçoit une représentation du président, immense, dans la posture d'un marionnettiste. En contrebas, plusieurs personnes défilent avant de tomber subitement dans un gouffre, laissant penser à un président manipulant la population.

Un discours hostile au pouvoir en place qui était déjà présent dans le clip "Everybody dance" dévoilé il y a deux mois, et qui critique notamment la surconsommation ou le manque d'action contre le réchauffement climatique. Dans ce clip, Emmanuel Macron, ainsi que plusieurs membres du gouvernement, apparaissent à plusieurs reprises alors que le groupe de rock chante son refrain "Tout le monde danse quand ces gens-là claquent des doigts / Mais moi je danse pas", sur des images de violences policières durant les manifestations gilets jaunes.

Hasard du calendrier, Izïa succèdera à Shaka Ponk sur la scène des Francopholies de la Rochelle le 12 juillet.

  • Marc Rebillet

Inconnu du grand public jusqu'au 27 août 2022, le DJ et chanteur franco-américain se produit alors au Touquet (Pas-de-Calais). Le bruit court que le président, qui possède une résidence secondaire dans la station balnéaire cossue du nord de la France, est dans le public. Le DJ lance alors des insultes à l'égard d'Emmanuel Macron.

Sur Instagram, l'artiste admet "avoir un peu malmené Macron". "Le festival n’était pas très content puisqu’il était dans le public, mais tout le monde a besoin d’être remis à sa place de temps en temps", a-t-il ajouté. Il récidivera quelques jours plus tard, à la demande du public cette fois, lors d'un concert à l'Olympia, à Paris.

  • Gauvain Sers

En janvier 2022, celui qui a notamment fait les premières parties de Renaud ou de Tryo est invité de France Inter, où il interprète un titre inédit, "Monsieur le président", directement inspiré du "déserteur" de Boris Vian.

Dans cette chanson, il s'adresse directement au chef de l'État, à qui il reproche notamment l'oubli d'une partie de son électorat, son arrogance et une totale déconnexion. "Monsieur le président, seriez-vous dur d'oreille pour bafouer si longtemps un boucan sans pareil ? C'est le peuple qui gronde, qui occupe vos boulevards, pendant que la bête immonde se rapproche du pouvoir.

Monsieur le président, refusez-vous de voir ceux qui vous ont, un temps, choisi dans l'isoloir ? Oubliez l'arrogance au fond de votre planque, on n'dirige pas la France comme on dirige une banque..."

  • Tryo

Groupe engagé notamment autour de l'écologie ou en soutien aux gilets jaunes, Tryo n'a pas manqué d'égratigner Emmanuel Macron, à l'issue de son premier mandat. En avril 2021, à un an des présidentielles, le groupe sort "En Marche, en replay", dans lequel le groupe dépeint un président isolé avec pour refrain "En marche, en replay ! S'isole, s'isole Faubourg Saint Honoré. En marche, en replay ! S'isole, s'isole Le prince sa majesté".

"Rue du Faubourg Saint-Honoré, enfermé dans son aquarium, dans ses appartements privés, Monsieur peaufine ses réformes", introduit le groupe sur fond d'images des gilets jaunes notamment. "Dans la langueur des protocoles, monsieur muré dans son silence, se nourrit de fiches Bristol, qui lui font découvrir la France", poursuit le groupe, alors que s'affichent des caricatures des précédents chefs de l'État. On voit également Emmanuel Macron, face aux revendications de la rue, faire fermer les rideaux de l'Élysée et s'allonger dans son lit en mettant un masque de nuit et des boules Quiès.

  • Les Sales Majestés

Autre groupe à dédier une chanson à Emmanuel Macron, Les Sales Majestés, un groupe de punk. Dans un clip dévoilé en 2020 et mélangeant images d'Emmanuel Macron jeune et doigts d'honneurs, le groupe s'en prend au chef de l'État et au nom de son parti, à travers le refrain : "La France en marche, c'est marche ou crève, marche ou crève, marche ou crève".

Dans le reste de la chanson, c'est le positionnement politique annoncé du chef de l'État qui est ciblé. "Ni de gauche, ni droite / Ni du centre, bien au contraire / Oui je vais te le faire à l’envers / Ou dans le cul si tu préfères / Je me présente, je m’ appelle Macron / Avec moi, tu l’ auras dans le fion / Mes ministres sont des faux cul / Et leur devise, c ‘est dans ton cul (...) Oui élu grâce au FN / Je remercie Marine Le Pen / On se rend service entre bourgeois / Oui chez les riches on est comme ça".

  • Damien Saez

Connu notamment pour ses engagements contre la société capitaliste, Damien Saez a dédié une chanson à Emmanuel Macron, pour le premier anniversaire du mouvement des gilets jaunes, en novembre 2019, au point que la chanson est fréquemment diffusée durant les manifestations des gilets jaunes.

En reprenant "Manu rentre chez toi" de Renaud, Damien Saez s'adresse directement au chef de l'État de manière très directe.

"Et Manu viens chez moi voir un peu la galère / De ceux qui meurent de froid, de ceux qui puent la bière (...) Et Manu ferme-la quand tu prends tes grands airs / Tes airs de petit bourgeois qui chie sur l'populaire / Avec ta gueule de petit roi, ta gueule de princière / Qui ferait mieux d'retourner sous les jupons d'sa mère (... ) Crois-moi la France elle en peut plus / De voir ta gueule à la télé / Des petits discours de corrompus / Toujours, toujours pour nous saigner / Putain allez casse-toi Manu / J'crois bien qu'Brigitte elle va chialer / Et Manu rentre chez toi et remballe tes cent balles / T'as mal compris je crois sur la place de l'Étoile / Les mots qu'j'avais tagués, comme un idéal / Aller chiale pas Manu, ça t'a coûté que dalle"

  • Youssoupha

En septembre 2018, Emmanuel Macron connait les premiers troubles de son premier quinquennat avec l'affaire Benalla, mais n'a pas encore eu a faire face à l'opposition populaire comme lors du mouvement des gilets jaunes ou encore des réformes des retraites.

Le rappeur Youssoupha évoque pourtant déjà le président de la République dans une chanson très politique, "Polaroid Experience".

"J'suis l'ennemi de Valls, j'suis l'ennemi de Macron / J'suis l'ennemi de Ménard, j'suis l'ennemi de Marion / J'suis l'ennemi de la République de François Fillon / J'suis l'ennemi de la Françafrique et de ses millions (...) / Mais putain j'attends que les poings se brandissent / Les grands hommes ne naissent pas dans la grandeur / Non, ils grandissent".

Trois ans plus tard, Youssoupha est au coeur d'une polémique menée par l'extrême droite après la diffusion de son hymne de soutien à l'équipe de France masculine de football en vue de l'Euro 2021. Jordan Bardella, alors vice-président du Rassemblement national, explique que choisir le son de Youssoupha comme "hymne" des Bleus revient à "céder à une partie racaille de la France". Youssoupha reçoit alors le soutien d'Emmanuel Macron.

La réforme des retraites, argument idéal

La réforme des retraites a été l'occasion de cibler Emmanuel Macron, au travers d'une chanson pour le rappeur marseillais Jul, dans "Entrainement" : "64 ans la retraite, il respecte pas l’peuple le gouvernement", lance le rappeur, alors que la France est en plein mouvement d'opposition à la réforme visant à décaler l''âge légal de départ de 62 à 64 ans.

Une réforme qui est aussi l'occasion pour de nombreux artistes dont des chanteurs de faire part de leur opposition, sans toutefois viser directement le chef de l'État. Parmi eux, Joey Starr, le rappeur marseillais SCH, Françoise Hardy, ou encore Benjamin Biolay.

Avant même d'être élu président, Emmanuel Macron était ciblé par Nekfeu au détour d'une chanson, Squa, sortie en 2016 alors qu'il était ministre de l'Économie. "Ça fait bizarre de voir les keufs reconnaître ma tronche / J'suis sûr qu'eux aussi ils aimeraient cogner Macron".

VIDÉO - "Des battes pleines de clous" : Izïa Higelin fantasme le lynchage d'Emmanuel Macron et échappe à la police