Inde, le pas de géant

Record battu le 14 avril ? Ou bien depuis la fin de 2022 ? Selon que l’on se base sur les sources onusiennes ou bien sur la World Population Review, organisation indépendante spécialisée dans la démographie, l’Inde est – ou sera très bientôt – le pays le plus peuplé du monde. Devant la Chine. Mais peu importe la date exacte. Avec désormais plus de 1,4 milliard d’habitants, le pays culmine sur un sommet démographique, alors même que la Chine a révélé une baisse de sa population pour la première fois depuis plus de soixante ans, rappelle le site indien Scroll.in dans l’article qui ouvre notre dossier.

Ce record, c’est bien sûr l’une des raisons qui nous ont poussés à choisir de mettre ce sujet en une cette semaine. Mais ça n’est pas la seule. L’inde est également l’une des économies les plus dynamiques. “Le Fonds monétaire international (FMI) prévoit pour l’Inde une croissance économique de 6,1 % en 2023 – l’un des taux les plus élevés parmi les puissances économiques – et de 6,8 % en 2024”, rappelle le Financial Times. Un titre s’accompagne de quelques obligations. Vis-à-vis notamment de la jeunesse indienne, celle que nous avons choisi de montrer, sûre d’elle, confiante, et prête à aller de l’avant, sur notre couverture.

En effet, pour le moment, cette richesse n’est pas partagée. Elle ne se traduit pas par des emplois qualifiés, ni pour la jeune génération ni pour les femmes. Le taux de chômage ne cesse d’augmenter. L’emploi des femmes a quant à lui chuté à 19 %, soit deux fois moins que dans les années 1990. Un autre phénomène entrave le marché du travail : le sous-emploi, soit la présence de personnes à des postes qui ne correspondent pas à leur profil. “Il y a des centaines de millions de jeunes Indiens qui ‘tuent le temps’ au travail”, estime Ashoka Mody, auteur de l’essai India Is Broken (“L’Inde est cassée”), dans le Financial Times. Pour transformer l’essai, l’Inde doit donc offrir des perspectives à la jeune génération.

Un partenaire très courtisé

Mais cela n’entame pas l’attractivité du pays à l’international. Avec la guerre en Ukraine et la montée en puissance de la Chine, l’Inde – qui assure la présidence tournante du G20 – est plus que jamais un partenaire stratégique pour les États-Unis et l’Europe. En 2022, “Modi [le Premier ministre] s’est entretenu en visioconférence avec Emmanuel Macron, et Joe Biden l’a félicité par téléphone pour le contrat avec Boeing. Entre-temps, le Premier ministre du Royaume-Uni, Rishi Sunak, dont le pays est l’un des bénéficiaires du contrat avec Airbus (Rolls-Royce va fabriquer les moteurs), a publié un tweet enthousiaste. Tout cela en dit long sur le rôle que l’Inde entend jouer vis-à-vis de l’Occident, un rôle défini dans la ‘doctrine stratégique de l’hindutva’ [hindouité]”, rappelle The Hindu dans un formidable article que nous avions déjà publié dans notre hors-série Géopolitique. Le monde de demain, actuellement en vente. Et ça marche. L’Occident fait les yeux doux à New Delhi, quitte à fermer les eux sur l’extrémisme du gouvernement Modi, qui bafoue la liberté d’expression, la liberté de la presse et, surtout, qui entretient – toujours au nom de l’hindutva, sa doctrine nationaliste – une haine contre les musulmans.

[...] Lire la suite sur Courrier international

Sur le même sujet :