Incendie en Gironde: comment empêcher de futurs méga-feux?

Un pompier lutant contre l'incendie à Louchats, en Gironde, le 17 juillet 2022. (Photo: Sarah Meyssonnier via Reuters)
Un pompier lutant contre l'incendie à Louchats, en Gironde, le 17 juillet 2022. (Photo: Sarah Meyssonnier via Reuters)

Un pompier lutant contre l'incendie à Louchats, en Gironde, le 17 juillet 2022. (Photo: Sarah Meyssonnier via Reuters)

ENVIRONNEMENT - 15.000 hectares brûlés, 8000 personnes évacuées... les deux énormes incendies qui touchent la Gironde continuent d’avancer ce lundi 18 juillet. À Landiras, dans les terres, les flammes ont déjà ravagé 9800 hectares. Près du bassin d’Arcachon à Teste-de-Buch, ce sont 4200 hectares de végétation qui sont partis en fumée.

La canicule qui touche à présent l’ouest de la France métropolitaine couplée à la sécheresse augmente les risques d’incendie, mais ceux-ci sont tout de même hors-norme. En 12 ans, seule une vingtaine de feux de plus de 1000 hectares ont été recensés par la base de données sur les incendies de forêt (BDIFF).

Ces “méga-feux” (même si la définition est floue) risquent d’être plus réguliers avec le réchauffement climatique, mais ce qui permet l’apparition d’incendies aussi importants, c’est surtout la présence d’un espace boisé ininterrompu.

Une France très arborée

“Les espaces naturels, pour de nombreuses raisons, se développent de plus en plus, de même que les forêts. Notamment du fait de la réduction des activités agricoles”, expliquait au HuffPost, en 2020, Dominique Morvan, chercheur à l’université Aix-Marseille et spécialiste de la propagation des feux de forêt.

Ainsi, en 1830, la France comptait moins de 10 millions d’hectares de forêts. En 1985, le chiffre était de 14 millions et de 16 millions en 2016.

L'évolution des forêts en France. (Photo: IGN)
L'évolution des forêts en France. (Photo: IGN)

L'évolution des forêts en France. (Photo: IGN)

En effet, la forêt et les étendues d’herbe se sont agrandies depuis le XIXe siècle en France, notamment grâce à l’amélioration des techniques d’agriculture: certaines zones ne sont plus rentables ni nécessaires à exploiter.

“En 1989, quand un énorme incendie a embrasé la montagne Sainte-Victoire, on se disait alors que les paysages célèbres peints par Paul Cézanne avaient disparu”, se rappelle Dominique Morvan. “Mais quand on compare ce qu’a peint Cézanne [un siècle plus tôt, NDLR] et les paysages juste avant l’incendie, cela n’avait rien à voir! À l’époque, c’était un paysage agricole, avec des vignes, des oliviers, des vergers”.

La montagne Sainte Victoire, vue par Paul Cézanne. (Photo: Paul Cézanne)
La montagne Sainte Victoire, vue par Paul Cézanne. (Photo: Paul Cézanne)

La montagne Sainte Victoire, vue par Paul Cézanne. (Photo: Paul Cézanne)

Et les choses ne se sont pas spécialement améliorées depuis. “Un continuum de combustible se développe de plus en plus entre Nice et Marseille, par exemple”, précisait Dominique Morvan. En Gironde également, les forêts sont partout. Le taux de boisement est de 48%, selon un rapport de 2010.

Recréer les paysages de Cézanne

Si le risque d’incendie va augmenter avec le réchauffement climatique, la question est donc de savoir comment limiter les départs de feux, mais aussi la taille des incendies. Pour ce dernier point, des solutions existent.

“Pour la forêt, le maintien et l’intensification de la récolte de bois est donc [...] le volet prioritaire de la prévention des incendies”, expliquait un rapport gouvernemental dès 2010. Et le meilleur moyen pour faire cela durablement, nous expliquait Dominique Morvan, c’est via l’agriculture. “Il faut trouver des activités agricoles: l’élevage, la culture de la vigne, de l’olive, etc”.

Mais n’est-ce pas paradoxal quand on sait que les oliviers aussi brûlent? “Oui, mais une oliveraie est beaucoup moins dense qu’une forêt. Au pied, le sol est propre”, expliquait Dominique Morvan. Mieux, l’oliveraie va constituer un coupe-feu naturel “sur lequel peuvent s’appuyer les pompiers pour avoir une action efficace contre les incendies”.

C’est d’ailleurs ce qui a été fait sur la montagne Sainte-Victoire après le mega-feu de 1989. Comme le précise le label Grands site de France, “l’objectif sur ces zones est de créer et de maintenir de vastes étendues non boisées bordées de forêts peu denses.

Ainsi si un incendie arrive, il sera arrêté ou au moins freiné par cette grande coupure de végétation. Puis, avec l’accord des propriétaires, ces terres sont confiées à des éleveurs pour les troupeaux ou à des sociétés de chasse pour des cultures cynégétiques.” Pour empêcher les mega-feux, il faudra donc recréer les paysages de Cézanne.

À voir également sur Le HuffPost: les images des incendies en Gironde

Cet article a été initialement publié sur Le HuffPost et a été actualisé.

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