La hausse inquiétante de l’antisémitisme en France documentée dans le dernier rapport de la CNCDH

Sur l’année 2023 en France, on compte un total de 1 676 actes antisémites, quatre fois plus qu’en 2022
ZAKARIA ABDELKAFI / AFP Sur l’année 2023 en France, on compte un total de 1 676 actes antisémites, quatre fois plus qu’en 2022

ANTISÉMITISME - Des chiffres extrêmement inquiétants. La commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a publié ce jeudi 27 juin son rapport sur la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la xénophobie en France. Une enquête annuelle qui revient sur l’indice de tolérance des Français, le décompte des actes racistes, ou encore l’adhésion de la population à des préjugés liés à certaines catégories de la population.

« Avec la montée de l’antisémitisme, j’ai dû dire à ma fille de 12 ans de taire son judaïsme » - Témoignage

Pour l’année 2023, les résultats n’ont rien de rassurant. Après des années de hausse continue, la tolérance mesurée par la CNCDH est en baisse pour la deuxième année consécutive et les actes racistes sont en augmentation, particulièrement les actes antisémites ; leur hausse est sans précédent.

Une augmentation très inquiétante des actes antisémites

Depuis l’attaque terroriste du 7 octobre en Israël et l’offensive d’Israël à Gaza, les actes antisémites ont drastiquement augmenté en France. Entre octobre et décembre 2023, dix fois plus d’actes antisémites ont été recensés qu’au dernier trimestre 2022. Sur l’année, on compte un total de 1 676 actes antisémites, quatre fois plus qu’en 2022, dont la majeure partie (60 %) sont des propos ou gestes menaçants, pour la plupart commis dans la sphère privée (les chiffrent du rapport y intègrent les lieux de travail), dans l’espace public ou dans le milieu scolaire.

Ces faits ne sont pas spécifiques à certains territoires mais répartis sur l’ensemble de l’espace national : ils ont eu lieu dans 616 communes différentes, et 95 départements sur 101. « Pour la première fois depuis 2005, c’est l’indice de tolérance relatif aux Juifs qui a le plus chuté en un an, avec une baisse de quatre points à comparer à celle d’un point pour les Maghrébins et les Noirs, de deux points pour les Musulmans, et de trois points pour les Roms », indique le rapport.

On comptabilise dix fois plus d’acte antisémites entre octobre et décembre 2023 qu’entre octobre et décembre 2022
Capture d’écran du rapport 2023 de la CNCDH On comptabilise dix fois plus d’acte antisémites entre octobre et décembre 2023 qu’entre octobre et décembre 2022

Des préjugés antisémites en hausse, et ancrés à l’extrême droite

En 2023, le rapport de la CNCDH relève une hausse de 3 % de la proportion de Français partageant l’idée selon laquelle « les Juifs ont trop de pouvoir en France », qui atteint 21 %. 36 % des interrogés estiment par ailleurs que « pour les Français juifs, Israël compte plus que la France », une augmentation de 6 points depuis 2022. L’aggravation est la plus forte chez les Français qui se positionnent « au centre » sur l’axe politique (ils sont 46 % à y adhérer, en augmentation de 12 points) que chez ceux qui se placent « à gauche » (36 %, une augmentation de 4 points), et « à droite » (48 %, une hausse de trois points).

Le rapport interroge également le « vieil antisémitisme » en France, basé sur des préjugés antisémites historiques : l’idée selon laquelle « les Juifs ont un rapport particulier à l’argent », par exemple, à laquelle 37 % des sondés expriment leur adhésion, ou le soupçon de « double allégeance des Français juifs ». D’après les résultats, « les sympathisants d’extrême droite restent les plus enclins à se montrer d’accord avec ces préjugés antisémites traditionnels », précise le dossier, chiffres à l’appui.

En 2023, on constate une prévalence de l’antisémitisme marquée à l’extrême-droite de l’échiquier politique
Capture d’écran du rapport de la CNCDH 2023 En 2023, on constate une prévalence de l’antisémitisme marquée à l’extrême-droite de l’échiquier politique

Une baisse de la tolérance généralisée

Selon le baromètre, 21 % des Français se disent « un peu » ou « plutôt » racistes. Une déclaration qu’on retrouve particulièrement chez les sympathisants LR (26 %), les proches du RN (54 %) et les personnes qui se situent « très à droite » sur l’axe politique (61 %).

Plus de quatre Français sur dix considèrent que « l’immigration est la principale cause de l’insécurité », mais les immigrés ne sont pas les seuls à faire les frais de ces préjugés. Les indices de tolérances sont en effet en baisse pour toutes les communautés. La CNCDH alerte sur un phénomène de « repli », dans un contexte de « défiance vis-à-vis de l’Autre et de la diffusion d’un discours haineux dans certaines sphères politiques et médiatiques où la figure de l’immigré est rendue responsable des maux de la société ».

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