Guerre en Ukraine : où en est la contre-offensive après les premières victoires proclamées par Kiev ?

Des militaires ukrainiens aux manettes d’un char près de la ligne de front, dans la région de Donetsk le 5 juin, quelques jours avant de revendiquer plusieurs reconquêtes de villages dans cette région aux mains des Russes.
Des militaires ukrainiens aux manettes d’un char près de la ligne de front, dans la région de Donetsk le 5 juin, quelques jours avant de revendiquer plusieurs reconquêtes de villages dans cette région aux mains des Russes.

GUERRE EN UKRAINE - Attendue, repoussée, perturbée, actée par Moscou et finalement admise par Kiev à demi-mot, la contre-offensive de l’Ukraine pour reprendre les 17 % de territoire ukrainien occupés par la Russie a véritablement pris forme aux alentours du 10 juin avec l’annonce de la reconquête de plusieurs petites localités dans le sud du pays. Une première victoire pour Kiev depuis de nombreux mois.

Ce lundi soir, Emmanuel Macron a confirmé que la contre-offensive avait commencé « depuis plusieurs jours ». Elle devrait durer « plusieurs semaines, voire mois », a-t-il estimé, alors qu’il se trouvait au côté du chancelier allemand Olaf Scholz et du président polonais Andrzej Duda à l’Élysée.

Le début de la contre-offensive ukrainienne prend les noms de Blagodatné, Makarivka, Neskoutchné, Lobkovo, Levadne, Novodarivka, et Storozheve. Il s’agit des sept premiers villages repris par l’armée ukrainienne dans le Sud et l’Est du pays au cours des dernières 48 heures. Une première étape pour Kiev, après plus d’une semaine de flou sur l’état des combats et dans l’attente des premiers indices concrets sur cette fameuse contre-offensive.

Premières victoires symboliques

Si l’armée russe a reconnu ce lundi avoir repoussé des offensives ukrainiennes dans la zone du sud de l’Ukraine où Kiev a revendiqué la capture de ces villages, aucun démenti n’a été fourni par le ministère russe de la Défense au sujet du repli de ses troupes, qui se contente d’évoquer des « attaques de l’adversaire » dans cette zone.

Dans cette même région, une unité ukrainienne, la 110e de la défense territoriale, a également revendiqué ce lundi la libération – depuis le 4 juin – du village de Novodarivka. Une nouvelle annoncée dans un post Facebook de la Brigade de défense territoriale séparée de Zaporijjia.

Et ce lundi, trois autres villages auraient même été repris aux Russes par l’Ukraine. Une vidéo montre des soldats ukrainiens traversant victorieusement Storojevé, village lui aussi situé dans la région de Donetsk. Une information confirmée par la vice-ministre de la Défense Ganna Malyar sur le réseau social Telegram.

Ganna Malyar a précisé que les villages de Lobkovo et Levadne et Novodarivka, près de Zaporijja, avaient été repris.

Dans les faits, James Waterhouse, correspondant de la BBC à Dnipro, prévient que ces modestes gains territoriaux ont surtout une valeur symbolique à ce stade. « La vue de soldats hissant à nouveau des drapeaux ukrainiens dans des colonies libérées est passionnante pour le pays et ses alliés », reconnaît-il depuis l’Ukraine.

Des gains qui restent très coûteux

James Waterhouse relève toutefois que ces « modestes gains » restent « toujours aussi coûteux » pour l’Ukraine. Il donne pour exemple le cas des actions de contre-offensive menées dans la région de Zaporijjia, où « beaucoup d’hommes et de matériel ont été perdus ».

Selon des analystes militaires cités par l’AFP, l’Ukraine n’a pas encore lancé le gros de ses forces dans sa contre-offensive. Raison pour laquelle seuls des villages sont grappillés en échange de lourds efforts militaires, dans ce qui semble être un travail de reconnaissance de la part de Kiev pour trouver des failles dans la ligne de défense installée par les Russes depuis de nombreux mois.

Pour l’heure, la zone dans laquelle l’armée ukrainienne a gagné le plus de terrain est à l’intersection des fronts Est et Sud, comme vous pouvez le voir avec les points rouge foncé sur la carte ci-dessous. Elle est située à une dizaine de kilomètres au nord des principales lignes fortifiés russes, faites notamment de tranchées et de pièges antichars.

Carte représentant les principales zones de combats sur les fronts Est et Sud de l’Ukraine, où Kiev a revendiqué la reconquête de plusieurs villages dans l’oblast de Donetsk depuis dimanche 11 juin.
Carte représentant les principales zones de combats sur les fronts Est et Sud de l’Ukraine, où Kiev a revendiqué la reconquête de plusieurs villages dans l’oblast de Donetsk depuis dimanche 11 juin.

Il faut dire que cette zone est particulièrement stratégique pour Kiev. En effet, un succès militaire ukrainien d’ampleur du front permettrait à terme de rompre le pont terrestre reliant la Russie à la péninsule annexée de Crimée. Territoire aux mains des Russes depuis 2014, la Crimée est connue pour être l’un des principaux axes de ravitaillement des forces militaires de Moscou dans les zones occupées.

Bakhmout et Zaporijjia en ligne de mire

Plus au nord, toujours dans l’oblast de Donetsk, un autre objectif semble dans la ligne de mire de l’Ukraine. L’armée a ainsi entamé des opérations offensives à Bakhmout, où elle a longtemps tenu contre les Russes avant que Moscou n’en revendique la conquête en mai.

L’Institut pour l’étude de la guerre (ISW), qui se donne pour mission de rendre compte jour après jour de l’évolution des combats, avance que « des sources russes ont signalé la poursuite des attaques terrestres ukrainiennes sur les flancs nord et sud de Bakhmout ».

Des informations confirmées dimanche par la vice-ministre ukrainienne de la Défense, Hanna Malyar, qui a annoncé que les forces russes transféraient leurs unités les plus aptes au combat de Kherson vers Bakhmout et Zaporijjia. Signe qu’une nouvelle zone d’affrontement majeure risque de prendre place sur les ruines de cette ville déjà lourdement marquée par la guerre.

Dans la région de Zaporijjia, l’ISW fait aussi état de gains territoriaux ukrainiens au sud-ouest d’Orikhiv, ville située à 6 km du front et à 65 km au sud-est de Zaporijia. L’objectif final serait d’ailleurs d’atteindre Melitopol, ville proche de la Crimée annexée.

Pour la suite des opérations, il est difficile de connaître les plans de Volodymyr Zelensky et de l’Ukraine. D’autant plus que les autorités ukrainiennes ont juré de rester muettes concernant les objectifs, stratégies et tactiques de la contre-offensive. Une chose est sûre : les inondations causées par la rupture du barrage de Kakhovka il y a quelques jours compliquent les manœuvres militaires de Kiev.

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