Guerre en Ukraine : à Marioupol, les Russes accusés de démolir le théâtre

Près de 600 personnes seraient mortes dans le bombardement du théâtre de Marioupol, en mars 2022, selon une enquête de l’Associated Press.
STRINGER / AFP Près de 600 personnes seraient mortes dans le bombardement du théâtre de Marioupol, en mars 2022, selon une enquête de l’Associated Press.

GUERRE EN UKRAINE - Le bombardement du théâtre municipal de la ville ukrainienne de Marioupol en mars, où des centaines de civils, notamment des femmes et enfants, s’étaient réfugiés pour échapper aux frappes russes, avait choqué la communauté internationale. Neuf mois plus tard, la ville portuaire est aux mains des Russes, qui souhaiteraient détruire ce lieu emblématique du conflit pour cacher les preuves d’un possible « crime de guerre », selon le maire ukrainien de la ville, Petro Andryushchenko, cité par la BBC.

Selon l’élu, la destruction du théâtre a commencé. Les Russes prévoiraient de laisser intacte la façade du bâtiment, tout en détruisant le reste de la structure, pour construire un nouveau théâtre « sur les os du peuple de Marioupol ». Une initiative qui s’inscrit dans un large projet de reconstruction de la ville par les autorités russes, qui communiquent abondamment sur ces travaux.

Des photos et vidéos ont été diffusées sur les réseaux sociaux, notamment par le ministre ukrainien de la Culture Tkachenko Oleksandr (ci-dessous) montrant les ruines du théâtre cachées derrière d’immenses brise-vues, ainsi qu’une pelleteuse détruisant les murs restés debout.

« D’abord, ils ont essayé de la couvrir. Maintenant, les envahisseurs rasent la preuve de l’un des crimes les plus révélateurs de l’armée terroriste russe : à Marioupol, le théâtre a été démoli. »

« Le théâtre de Marioupol n’existe plus. Ceci est une tentative de cacher pour toujours les preuves du meurtre délibéré d’Ukrainiens par les Russes. Le pays agresseur n’essaie même pas de cacher sa volonté de tout effacer. Aucun mensonge ne peut permettre d’échaper à la justice. »

Au moment de son bombardement, le théâtre de Marioupol abritait « plus de 1 000 civils », selon les autorités ukrainiennes. Elles estiment que 300 personnes ont été tuées, mais une enquête de l’Associated Press a révélé que le nombre réel était plus proche de 600.

Le théâtre n’a jamais été « un objectif militaire valable »

Les ONG qui ont enquêté sur la frappe, à l’instar d’Amnesty International, sont formelles : il s’agirait bien d’un « crime de guerre ». Le mot « enfants » écrit en russe à l’extérieur du bâtiment était en effet parfaitement visible depuis le ciel, et Amnesty International considère que le théâtre n’a jamais été « un objectif militaire valable ». La Russie avait rejeté en bloc ces accusations et affirmé que le théâtre avait été attaqué par le bataillon nationaliste ukrainien Azov.

Depuis que la région de Donetsk est tombée aux mains des séparatistes, de gigantesques panneaux brise-vue illustrés par des figures culturelles russes cachent le théâtre de Marioupol aux yeux des curieux. Au mois de novembre, la BBC avait rapporté que les autorités avaient extrait discrètement des cadavres des bâtiments détruits de la ville. Selon des images satellites consultées par l’Associated press, 10 300 tombes supplémentaires ont par ailleurs été creusées dans le cimetière municipal.

Depuis son annexion en septembre, la ville de Marioupol subit une russification à marche forcée. Les autorités ont bâti quelques barres d’immeubles, dont les images sont diffusées inlassablement sur les réseaux sociaux et reprises par les talk-shows de la télévision d’État. Certains influenceurs acquis à la cause du Kremlin dépeignent une joie retrouvée dans la ville depuis l’arrivée des Russes.

Ce ne serait toutefois qu’un leurre selon les autorités ukrainiennes, qui dépeignent une ville ravagée derrière les rideaux de chantiers. Plus de 50 % des logements de Marioupol ont été détruits par les frappes russes pendant le long siège de la ville et les infrastructures civiles seraient détruites à près de 90 %, selon Kiev.

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