Guerre Israël-Hamas : le Qatar, un rôle indispensable dans la crise des otages, rappelle la libération des deux Américaines

Une manifestations pro-palestinienne à Doha, le 20 octobre 2023 P
KARIM JAAFAR / AFP Une manifestations pro-palestinienne à Doha, le 20 octobre 2023 P

PROCHE-ORIENT - Objet des remerciements internationaux et salué pour son « rôle très important », le Qatar est apparu comme l’acteur clef qui a permis la libération de deux otages Américaines ce vendredi 20 octobre dans la soirée, comme vous pouvez le voir dans notre vidéo en tête d’article.

Washington s’est empressé de remercier Doha, tandis qu’Emmanuel Macron se disait « confiant » vendredi dans les « canaux » activés par la France pour obtenir la libération de ses otages, faisons directement référence au Qatar.

La teneur des négociations demeure ultra-secrète mais ce rôle pivot n’a rien d’un hasard, tant le petit État est un habitué des missions du genre. Peut-être même encore plus que l’Égypte et la Turquie, également appelées à négocier avec le Hamas, qui a kidnappé près de 200 personnes lors de ses attaques meurtrières du 7 octobre en Israël.

Des liens privilégiés avec le Hamas...

C’est un double jeu qui lui est souvent reproché, mais le Qatar entretient des liens resserrés avec le Hamas. Il est notamment accusé de contribuer à son financement notamment via sa participation à hauteur de 30 millions de dollars dans le salaire des fonctionnaires de la bande de Gaza.

Surtout, Doha abrite depuis plus de dix ans le bureau politique du Hamas et c’est aussi au Qatar que réside son chef, Ismaïl Haniyeh. Le bureau y a été « ouvert en 2012 en coordination avec le gouvernement américain, suite à sa demande d’avoir un canal de communication » avec le mouvement, a expliqué à l’AFP un responsable qatari. Ce bureau a « servi à des médiations coordonnées avec plusieurs administrations américaines pour stabiliser la situation à Gaza et en Israël », a-t-il ajouté.

En 2012, l’ancien émir du Qatar, Cheikh Hamad ben Khalifa Al Thani, est devenu le premier dirigeant arabe depuis des années à se rendre dans la bande de Gaza. Il est entré par le poste frontière de Rafah, en compagnie de son épouse, devant des Palestiniens enthousiastes.

Une proximité que plusieurs pays occidentaux regardent avec en partie de la méfiance, et face à laquelle le Premier ministre du Qatar, cheikh Mohammed ben Abdelrahmane Al-Thani a tenté de rassurer en rappelant que le bureau du Hamas n’était qu’un canal servant à « communiquer et à apporter la paix et le calme dans la région ».

... Et Washington

Par ailleurs, ce bureau politique offre aussi aux Occidentaux et notamment à Washington, une forme de surveillance sur la Hamas : le Qatar abrite la plus grande base militaire américaine de la région.

Ce qui en fait un acteur d’autant plus crédible dans la crise actuelle, c’est qu’il y a aussi des liens avec Israël sans pour autant que la confiance soit totale. « Les relations n’ont certes pas toujours été tranquilles entre le Qatar et Benyamin Netanyahou, mais elles ont été maintenues. Il y a un souhait de voir Gaza se transformer, de voir émerger une élite et une classe moyenne libérale afin de progressivement marginaliser l’emprise du Hamas », soulignait Hasni Abidi, directeur du Centre d’études et de recherche sur le monde arabe et la Méditerranée, auprès de France Culture.

Un expert en négociation

Auprès de la communauté internationale, Doha a déjà montré de nombreuses fois son savoir-faire. Le Qatar avait par exemple invité les talibans à ouvrir un bureau à Doha avec l’aval des États-Unis. C’est notamment ce qui a permis de négocier, avec l’aide de Doha, le retrait des forces américaines d’Afghanistan en 2021, suivi par le retour des talibans au pouvoir.

Il s’est « spécialisé dans la libération d’otages », souligne Étienne Dignat, au Centre de recherches internationales (Ceri), rappelant qu’il était intervenu dans la récente libération d’Américains prisonniers en Iran.

Coincé entre des voisins géants tels que l’Arabie saoudite ou l’Iran, cette capacité à se déployer dans les crises, Doha en a fait une véritable marque de fabrique pour exister sur le terrain diplomatique. Et pas qu’au Proche ou Moyen-Orient. Mi-octobre, le Qatar annonçait avoir réuni avec leurs familles en Ukraine quatre enfants ukrainiens qui se trouvaient sur le territoire russe après avoir été pris par les autorités de Moscou à la suite de l’invasion en février 2022.

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