Gratuité des préservatifs : les allergiques au latex, grands oubliés de la mesure

Aucun fabricant de préservatifs sans latex n’a proposé ce type de produits dans le cadre de la mesure sur la gratuité de ces protections pour les moins de 26 ans.

Si la mesure sur la gratuité des préservatifs chez les jeunes est un succès, elle ne concerne pas les protections sans latex, les fabricants n’ayant pas proposé ce type de produits aux autorités de santé.

SANTÉ - La capote gratuite pour les jeunes ? Pas pour tous. « Je suis allergique au latex. À la pharmacie, j’ai demandé des préservatifs sans latex et on m’en a donné gratuitement », raconte Clara, une étudiante en master MEEF de 23 ans. Une bonne surprise de courte durée : une fois chez elle, la jeune femme reçoit un appel de la pharmacie qui lui explique que ces produits ne sont en fait pas concernés par la mesure. Clara doit donc retourner à l’officine pour payer sa boîte. « Il n’existe pas de préservatifs sans latex remboursés », résume celle qui nous a contactés par e-mail pour nous signaler ce manque.

Depuis son lancement le premier janvier 2023, la mesure concernant la gratuité des préservatifs en pharmacie pour les moins de 26 ans rencontre un franc succès, avec plus de deux millions de protections distribuées sur le premier mois. Mais ce dispositif ne permet pas d’obtenir des protections sans latex. Excluant, de facto, les personnes qui y sont allergiques.

« Encore une fois, on ne pense pas aux allergiques. C’est une problématique vraiment mal connue et souvent minimisée », regrette Pascale Couratier, la directrice générale de l’association française pour la prévention des allergies, que nous avons contactée par téléphone, avant d’ajouter : « Les allergies ne font pas partie de la prévention au niveau national et il faut vraiment que ça change. »

« L’allergie au latex, ce n’est pas que des petits boutons », continue-t-elle. « Elle peut être aussi beaucoup plus grave et entraîner une réaction sévère et une hospitalisation, allant jusqu’au décès, dans les cas les plus graves, si on n’est pas pris en charge correctement. »

Pour Clara, les préservatifs sans latex représentent aussi une dépense conséquente : « C’est un coût pour moi. Je suis étudiante boursière, je n’ai pas beaucoup de revenus. Je ne suis pas la seule allergique au latex et je ne trouve pas ça normal que tous les jeunes de moins de 26 ans ne soient pas concernés par la gratuité des préservatifs. »

Pas de produits sans latex proposés

Les deux marques de préservatifs remboursées, Eden et Sortez Couvert, étaient déjà disponibles gratuitement avant le lancement de la mesure, mais avec une ordonnance. Les protections sans latex, elles, ne sont ni remboursées sur ordonnance, ni concernées par la gratuité. Contacté par Le HuffPost, Philippe Besset, le président de la Fédération des Syndicats Pharmaceutiques de France, nous éclaire : « Ce sont les fabricants qui proposent leurs produits aux autorités de santé. Ils négocient ensuite un prix de remboursement, souvent très bas, qu’il faut accepter. »

En ce qui concerne les préservatifs, « les fabricants ne gagnent pas beaucoup quand ils se font rembourser sur ce produit. La plupart préfèrent en vendre moins et rester payant ». Quant aux préservatifs sans latex, les labos n’en ont tout simplement pas proposé.

Mais la Direction de la Sécurité Sociale l’assure : « Un exploitant de préservatifs sans latex peut, s’il le souhaite, faire les démarches pour une inscription à la LPP (Liste des Produits et des Prestations) afin que ces derniers puissent potentiellement intégrer la mesure. »

Alors pourquoi ne l’ont-ils pas fait ? Eden et Sortez Couvert se fournissent respectivement auprès des laboratoires Majorelle et Polidis. Ces derniers ont affirmé au HuffPost ne pas produire de préservatifs sans latex. Quant aux deux géants de la capote, Durex et Manix - qui vendent tous les deux des préservatifs sans latex -, aucun de leurs produits n’est remboursé par la sécurité sociale, ordonnance ou pas.

Contacté par nos soins, le premier s’est justifié de la manière suivante : « Si nos produits faisaient partie de la campagne de remboursement, nous ne serions plus disponibles pour faire des opérations dans les médias – ce qui irait à l’encontre de toutes les initiatives que nous avons lancées l’année dernière. » Le second n’a pas répondu à nos sollicitations.

Malgré cela, la gratuité des préservatifs sans latex serait une « bonne idée » selon Philippe Besset. « Même si la demande est faible, il faut que les industriels le fassent. Il faut enclencher le processus », ajoute le professeur.

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