Grève du 19 janvier : que contient la réforme des retraites contestée

France's Prime Minister Elisabeth Borne attends a press conference to present the government's plan for a pension reform in Paris on January 10, 2023. - The French government announced proposals for raising the retirement age and overhauling the pension system on January 10, in a potentially explosive reform fraught with danger for the president. (Photo by Bertrand GUAY / POOL / AFP)

MANIFESTATION - Les premiers cortèges se sont élancés. En attendant celui de Paris qui relira les places de République et de Nation, les opposants à la réforme des retraites battent le pavé à Marseille, Lyon, Nice, Toulouse où les rassemblements étaient organisés depuis le milieu de matinée ce jeudi 19 janvier.

Le mot d’ordre est clair : non à un texte qui prévoit de faire travailler les Français plus longtemps. Après des mois de concertation et plusieurs reports, il a été dévoilé le 10 janvier par Élisabeth Borne qui s’est immédiatement mis à dos l’ensemble des syndicats.

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De l’âge légal de départ à 64 ans à l’accélération du rythme de la réforme Touraine, en passant par la suppression des régimes spéciaux… Voici donc ce que contient vraiment le texte du gouvernement :

L’âge légal de départ à la retraite repoussé à 64 ans

C’était sans doute l’annonce la plus attendue. Le projet de réforme présenté par Élisabeth Borne prévoit le recul de l’âge légal de départ à 64 ans, dès l’horizon 2030. Il sera donc progressivement repoussé d’un trimestre par an. En clair, il sera de 63 ans et 3 mois à la fin du mandat d’Emmanuel Macron, et de 64 ans trois ans plus tard.

Pour les travailleurs handicapés, la réforme maintient un âge de départ à 55 ans et à 62 ans (mais toujours à taux plein), pour les personnes en situation d’invalidité ou d’inaptitude. Les salariés atteints de maladies professionnelles ou victimes d’un accident du travail, pourront quant à eux partir deux ans avant l’âge légal.

Accélération de la réforme Touraine sur la durée de cotisation

La réforme présentée par Élisabeth Borne prévoit qu’il faille valider 43 ans de cotisations en 2027 pour obtenir une retraite à taux plein. C’est une forme d’accélération de la réforme des retraites votée sous François Hollande et entrée en vigueur en 2020, qui prévoyait d’augmenter la durée de cotisation nécessaire d’un trimestre tous les trois ans. Avec pour objectif d’atteindre progressivement 43 annuités, soit 172 trimestres.

Suppression des régimes spéciaux

La réforme des retraites «  actera l’extinction des principaux régimes spéciaux », a indiqué la Première ministre, Élisabeth Borne. « Les nouveaux embauchés à la RATP, dans la branche industries électriques et gazières et à la Banque de France » seront notamment affiliés au régime général pour la retraite, a précisé la cheffe du gouvernement.

Le gouvernement appliquera toutefois la « clause du grand-père ». C’est-à-dire que « seuls les nouveaux embauchés recrutés à compter du 1er septembre 2023 dans les régimes spéciaux concernés seront affiliés au régime général ». Une exception au système général est néanmoins prévue pour les professions libérales et avocats ainsi que pour les marins, l’Opéra de Paris, et la Comédie Française.

Un dispositif « plus juste » pour les carrières longues et les femmes

Les carrières longues seront prises en compte dans le nouveau système de retraites. Les départs seront possibles à partir de 58 ans dans le cas d’un début de carrière avant 16 ans, 60 ans avant 18 ans, ou encore 62 ans avant 20 ans. « Aucune personne ayant commencé à travailler tôt » ne sera « obligée de travailler plus de 44 ans », a précisé l’exécutif dans un dossier de presse.

« Nous rendrons le dispositif carrières longues plus juste, notamment pour les femmes », a encore expliqué la cheffe du gouvernement. « Avant ce projet, les périodes de congé parental n’étaient pas prises en compte dans la durée pour en bénéficier. Cela sera désormais le cas », a-t-elle affirmé. Ainsi, «  davantage de Français seront concernés par le dispositif », soit au total 1 sur 5 «  arrivant à la retraite dans les prochaines années », a-t-elle précisé.

La pension minimum revalorisée pour les retraités

Le minimum de pension sera fixé à 85 % du Smic net, «  soit près de 1 200 euros par mois dès cette année », pour les futurs retraités ayant une carrière complète. La Première ministre a indiqué avoir «  décidé d’intégrer » au projet également «  la revalorisation des pensions des retraités actuels ayant eu une carrière complète au niveau du Smic », soit «  près de deux millions de petites retraites ».

Précisant que cette mesure serait discutée avec les parlementaires, «  en particulier » le groupe LR, Élisabeth Borne a dit que son «  objectif » était de la voir figurer dans le projet de loi qui sera présenté en Conseil des ministres le 23 janvier.

Un index des seniors dans chaque entreprise

« Le taux d’emploi des séniors en France est révoltant », considère le ministre de l’Économie Bruno Le Maire. C’est pourquoi chaque entreprise de plus d’un millier de salariés devra renseigner le taux d’emploi des seniors en son sein.

« Un index sera créé pour les entreprises de plus de 1 000 salariés pour vérifier le taux de personnes âgées employées », a indiqué la Première ministre Élisabeth Borne. Il permettra de « valoriser les bonnes pratiques et de dénoncer les mauvaises », et une absence de publication équivaudra à une « sanction », a précisé le ministre du Travail Olivier Dussopt.

Meilleure prise en compte de la pénibilité des carrières

Le compte professionnel de prévention (C2P), qui permet notamment de partir à la retraite plus tôt lorsqu’on exerce un métier pénible, sera modifié et utilisé plus régulièrement. Chaque année, 60 000 personnes supplémentaires seront concernées par ce compte.

« Les seuils des principaux facteurs d’exposition aux risques professionnels seront abaissés pour permettre à davantage de salariés de bénéficier d’un compte », indique le gouvernement. Le seuil du travail de nuit passera ainsi de 120 à 100 nuits par an, par exemple.

L’exécutif souhaite également utiliser davantage le C2P pour permettre aux travailleurs exerçant un métier pénible de se réorienter. Les branches professionnelles devront recenser les métiers les plus exposés aux risques et un fonds de prévention de l’usure professionnelle doté d’un milliard d’euros durant le quinquennat sera mis en place.

La réforme dégagera 18 milliards d’euros en 2030

La réforme des retraites « apportera 17,7 milliards d’euros en 2030 aux caisses de retraite », a indiqué le ministre de l’Économie et des Finances Bruno Le Maire. Ces recettes feront plus que compenser les «  13,5 milliards d’euros » de déficit que le régime de retraite aurait connu en 2030 en l’absence de réforme, selon lui.

D’ici 2030, «  ça permettra de garantir l’équilibre financier de notre système de retraite de répartition », a conclu Bruno Le Maire. « Aucun déficit n’est négligeable. Chaque euro compte pour un État qui a [près de] 3 000 milliards d’euros de dette », a martelé le numéro deux du gouvernement.

La réforme débattue au Parlement

La réforme des retraites sera débattue au Parlement par l’intermédiaire d’un futur projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif, a indiqué la Première ministre. « Dans deux semaines, le projet de loi de financement de la sécurité sociale rectificatif (...) sera présenté en Conseil des ministres », le 23 janvier, « puis débattu au Parlement » début février, a relevé Élisabeth Borne.

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