Gaza: Séjourné estime qu'une opération militaire israélienne à Rafah serait un "désastre humanitaire"

Le ministre des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, alerte samedi dans Le Monde sur les conséquences qu'aurait une offensive militaire à Rafah, dans la bande de Gaza, telle que celle promise par Israël. Il juge également Tel-Aviv "comptable" de la situation humanitaire "catastrophique" sur le territoire.

Le ministre des Affaires étrangères, Stéphane Séjourné, alerte sur la situation humanitaire "catastrophique" à Gaza, où une centaine de personnes sont mortes jeudi lors d'une distribution d'aide.

Des témoins ont affirmé que des soldats israéliens ont tiré sur une foule affamée qui se précipitait vers des camions d'aide humanitaire dans la ville de Gaza, dans le nord. Le bilan est de 115 morts et environ 760 blessés, selon le Hamas. De son côté, Israël affirme que de nombreuses personnes sont mortes dans un mouvement de foule ou renversées par les camions d'aide. Sur BFMTV, Olivier Rafowicz, porte-parole de l'armée israélienne, a rapporté qu'"il y a eu, semble-t-il des tirs" sur lesquels l'armée va "enquêter".

Dans Le Monde ce samedi 2 mars, Stéphane Séjourné affirme que la situation humanitaire dans la bande de Gaza "crée des situations indéfendables et injustifiables dont les Israéliens sont comptables; il faut qu’Israël l’entende".

Israël "responsable" du blocage de l'aide humanitaire

Depuis des mois, les travailleurs humanitaires mettent en garde contre une situation de plus en plus désespérée pour les civils de Gaza, et lundi, un responsable du bureau humanitaire de l'ONU, OCHA, a déclaré qu'une famine généralisée était "presque inévitable". Les estimations de l'ONU montrent que 2,2 millions de personnes – la grande majorité de la population de la bande de Gaza – sont menacées de famine, en particulier dans les zones nord autour de la ville de Gaza.

Selon l'agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, l'Unrwa, un peu plus de 2.300 camions humanitaires sont entrés dans la bande de Gaza en février, soit une baisse d'environ 50% par rapport à janvier. Cela représente une moyenne bien inférieure à 100 camions par jour, contre environ 500 qui arrivaient quotidiennement avant la guerre.

Stéphane Séjourné a estimé samedi que les efforts de la France "auprès des autorités israéliennes pour augmenter le nombre de points de passage et de camions humanitaires n’ont pas été satisfaits" et que "les responsabilités sur le blocage de l’aide sont clairement israéliennes".

"Comme nous avons été très clairs après les attaques du 7 octobre pour rappeler le droit d’Israël à se défendre, on doit être clair sur les dérives dans Gaza", a-t-il ajouté.

Une opération sur Rafah serait "un désastre humanitaire"

La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sanglante menée par des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d'Israël, qui a causé la mort d'au moins 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.

Environ 250 personnes ont été enlevées et emmenées à Gaza durant l'attaque. Selon Israël, 130 otages y sont encore retenus, dont 31 seraient morts, après la libération de 105 otages et de 240 Palestiniens détenus par Israël, lors d'une trêve fin novembre. En représailles, Israël a juré d'anéantir le Hamas.

Son armée pilonne sans répit la bande de Gaza et a lancé le 27 octobre une offensive terrestre dans le nord du territoire, qui s'est progressivement étendue jusque dans le sud. Les bombardements et les opérations militaires israéliennes ont fait jusqu'à présent 30.320 morts à Gaza, selon le ministère de la Santé du Hamas.

Afin de vaincre le mouvement islamiste dans son "dernier bastion", le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu a annoncé une prochaine offensive terrestre sur Rafah, à l'extrême sud du territoire, le dernier centre urbain où les soldats n'ont pas encore pénétré. Il a affirmé qu'une éventuelle trêve ne ferait que "retarder" une telle offensive. Dans Le Monde, Stéphane Séjourné a alerté sur les conséquences qu'aurait cette opération. "Aujourd’hui, on est dans une impasse sur Rafah et une opération militaire telle que les Israéliens la conçoivent serait un nouveau désastre humanitaire; nous faisons tout pour l’éviter", a-t-il déclaré.

"Sur le volet génocide, je ne souhaite pas que ce mot soit utilisé politiquement"

Le ministre ne souhaite toutefois pas utiliser le terme de "génocide" pour qualifier les événements en cours dans la bande de Gaza, quand les leaders de La France insoumise notamment ont plusieurs fois évoqué le risque de génocide sur le territoire face aux opérations israéliennes.

Le 26 janvier, la Cour internationale de justice (CIJ) a déclaré qu'Israël doit tout faire pour "empêcher la commission de tous actes entrant dans le champ d'application" de la Convention sur le génocide. Israël doit prendre "toutes les mesures en son pouvoir pour prévenir et punir l'incitation directe et publique à commettre le génocide", a encore appelé la plus haute juridiction de l'ONU, qui siège à La Haye.

"La Cour internationale de justice et la Cour pénale internationale sont saisies. Sur le volet génocide, je ne souhaite pas que ce mot soit utilisé politiquement, notamment par les oppositions, parce qu’il y a une question d’intentionnalité qu’il revient à la justice internationale de trancher", a dit Stéphane Séjourné au Monde, réfutant toute accusation de "deux poids, deux mesures" de la part de la France.

Article original publié sur BFMTV.com

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