Gaza: l'opération israélienne à Rafah a fait des dizaines de morts, selon le ministère de la Santé du Hamas

Dans la nuit de dimanche à lundi, les forces israéliennes ont mené à Rafah, dans la bande de Gaza, une opération terrestre, appuyée par des bombardements. Elle avait pour but, selon l'armée, de libérer Fernando Marman, 60 ans, et Luis Har, 70 ans, deux otages israélo-argentins enlevés dans le kibboutz Nir Yitzhak, dans le sud d'Israël, lors de l'attaque menée par le Hamas le 7 octobre contre Israël, qui a déclenché la guerre.

Le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a ordonné la semaine dernière à l'armée de préparer une offensive sur cette ville du sud de Gaza, où sont massés, selon l'ONU, 1,4 million de Palestiniens ayant fui la guerre qui fait rage depuis quatre mois entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas.

Benjamin Netanyahu a réaffirmé lundi sa détermination à vaincre le Hamas, alors que la perspective d'une offensive sur la ville surpeuplée suscite de vives inquiétudes à l'étranger. "Seule la poursuite de la pression militaire, jusqu'à la victoire complète, aboutira à la libération de tous nos otages", a-t-il déclaré.

"Il y a eu des tirs nourris"

Après une nuit sous les bombes qui ont creusé d'immenses cratères dans le sol à Rafah, des survivants fouillaient au matin les décombres, terrorisés à l'idée d'un assaut terrestre sur la ville où ils sont désormais piégés contre la frontière fermée avec l'Egypte.

"Vers minuit, nous avons entendu de fortes explosions, comme si l'enfer s'était ouvert sur les civils", a raconté à l'AFP Abou Souhhaib, un habitant du quartier d'al-Shaboura, à Rafah.

"Nous avons entendu le bruit des hélicoptères qui tiraient", a-t-il ajouté. "Il y a eu des tirs nourris, comme s'il s'agissait d'une très grande bataille".

"Ils ont tué des civils qui n'appartenaient à aucune organisation et n'avaient rien à voir avec quoi que ce soit", a encore déploré l'habitant de Rafah.

La crainte d'une offensive de grande ampleur

Rafah accueille de nombreux réfugiés palestiniens qui craignent une offensive israélienne de grande ampleur, dont Jalal, qui a perdu une jambe en 2008. "Comment je fais? Les autres peuvent courir. Moi je ne peux pas porter mes enfants, ni en courant, ni en marchant, c'est ça qui me fait peur", a-t-il déclaré.

"Hier soir, ils ont bombardé à côté. Ma fille s'est réveillée et n'arrivait pas à se rendormir. Elle a tremblé de peur toute la nuit", a aussi témoigné Asma, une autre déplacée palestinienne.

"L'offensive terrestre des Israéliens, c'est ce qui nous préoccupe le plus en ce moment", a-t-elle estimé.

Une centaine de morts, selon le Hamas

Les forces israéliennes ont fait irruption dans la nuit "avec des explosifs" au deuxième étage d'un bâtiment où étaient détenus les otages, "ont ouvert le feu sur des cibles aux alentours et ont libéré les otages", ont indiqué l'armée et le gouvernement.

"Des tirs ont alors éclaté depuis ce bâtiment et des bâtiments voisins suivis de longs combats, pendant lesquels des dizaines de cibles du Hamas ont été visées par des frappes aériennes afin de permettre aux soldats de quitter les lieux", a déclaré le bureau du Premier ministre.

Le ministère de la Santé du Hamas a fait état "d'environ 100 morts" dans les bombardements sur Rafah.

Une offensive "torpillerait" un accord

Israël estime à environ 130 le nombre d'otages toujours détenus à Gaza, dont 29 seraient morts, sur environ 250 personnes enlevées en Israël le 7 octobre. Une trêve d'une semaine en novembre avait permis la libération de 105 otages et de 240 Palestiniens détenus par Israël.

Le Hamas a prévenu dimanche qu'une offensive sur Rafah "torpillerait" tout accord pour une libération des otages. Mais Benjamin Netanyahu s'est dit déterminé à vaincre le Hamas retranché dans son "dernier bastion" de Rafah. "La victoire est à portée de main", a-t-il affirmé dimanche sur la chaîne américaine ABC News.

Israël assurera "un passage sécurisé à la population civile pour qu'elle puisse quitter" la ville, a-t-il ajouté, sans préciser où les civils pourraient se réfugier. Le président américain Joe Biden, dont le pays est le principal allié d'Israël, a exhorté Benjamin Netanyahu à "garantir" la sécurité de la population avant un assaut.

Le Royaume-Uni appelle Israël à "réfléchir sérieusement"

Le Royaume-Uni a appelé lundi Israël à "réfléchir sérieusement" avant toute offensive d'envergure à Rafah. La guerre a été déclenchée le 7 octobre par une attaque sans précédent de commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d'Israël, qui a entraîné la mort de plus de 1.160 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.

En représailles, Israël a juré de "détruire" le mouvement islamiste, au pouvoir à Gaza depuis 2007, qu'il considère comme une organisation terroriste de même que les Etats-Unis et l'Union européenne. L'offensive israélienne a fait 28.340 morts dans la bande de Gaza, en grande majorité des civils, selon le ministère de la Santé du Hamas, qui a dénombré lundi 164 morts en 24 heures.

Environ 1,7 million de personnes, d'après l'ONU, sur un total de 2,4 millions d'habitants, ont fui leur foyer depuis le 7 octobre dans le territoire palestinien dévasté, assiégé par Israël et plongé dans une crise humanitaire majeure. Beaucoup ont été déplacées plusieurs fois, fuyant toujours plus vers le sud à mesure que les combats s'étendaient.

Rafah, devenue un gigantesque campement, est le dernier centre urbain où l'armée israélienne n'a pas encore lancé d'assaut terrestre et le principal point d'entrée de l'aide humanitaire, insuffisante pour répondre aux besoins de la population menacée en plein hiver par la famine et les épidémies.

Article original publié sur BFMTV.com