Les funérailles d’Elizabeth II, défi sécuritaire historique

Près d’un million de personnes sont attendues dans les rues de Londres ainsi que des centaines de dirigeants mondiaux. Du jamais vu ou presque.

ROYAUME-UNI - Une perspective « absolument terrifiante », un événement « sans précédent », un « défi colossal » et un « casse-tête terrible ». Ce lundi 19 septembre, en présence d’un grand nombre de dirigeants mondiaux, le Royaume-Uni fera ses adieux à la reine Elizabeth II, morte le 8 septembre dernier après plus de 70 ans passés sur le trône. Un moment historique, mais aussi unique tant le défi sécuritaire qui sera proposé aux autorités britanniques paraît délicat.

Selon les estimations du gouvernement, un million de personnes pourraient se rendre à Londres pour assister aux premières funérailles royales en plus de 60 ans, contre 200 000 par exemple pour les hommages à la reine mère Elizabeth en 2002.

Et il faudra également assurer la sécurité de très nombreuses personnalités. « 300 dirigeants mondiaux et leurs équipes vont arriver à Londres dans les jours qui viennent », a rappelé le maire de Londres Sadiq Khan, décrivant « une affluence jamais vue » dans la capitale britannique. « C’est un peu comme si vous aviez le marathon, le carnaval de Notting Hill, un mariage royal et les Jeux olympiques à gérer en même temps. »

Tireurs d’élite, soldats et renseignements

Résultat : les différentes autorités britanniques coordonnent leurs efforts pour appréhender au mieux les menaces possibles. Le ministère de l’Intérieur, la Met Police (les forces de l’ordre du Grand Londres) et les renseignements britanniques travaillent même depuis des lustres sur le dispositif, qui a commencé à être mis en branle depuis le décès de la reine.

Depuis le décès de la reine Elizabeth II, et en particulier depuis que son cercueil est à Londres, un très important dispositif policier est déployé dans la capitale britannique (photo prise le 14 septembre).
Daniel Leal / Pool / Getty Images Depuis le décès de la reine Elizabeth II, et en particulier depuis que son cercueil est à Londres, un très important dispositif policier est déployé dans la capitale britannique (photo prise le 14 septembre).

« Nous nous préparons depuis des années », a confirmé Sir Mark Rowley, le nouveau patron de la Met Police, premier policier à avoir prêté serment auprès du roi Charles III. « Nous allons déployer des milliers de policiers pour répondre à ce défi sécuritaire et parce qu’il y a des millions de personnes qui veulent pouvoir rendre hommage à la reine. »

Plus de 10 000 policiers sont ainsi mobilisés chaque jour à Londres depuis l’arrivée du cercueil de la reine, des tireurs d’élite ont pris place sur les toits de la capitale, 1 500 soldats ont été appelés en renfort en plus d’une armée britannique qui demeurera « sur le qui-vive » le jour J et les services de renseignement sont copieusement mis à contribution pour prévenir toute menace.

« Il faut bien se rendre compte que vous allez avoir des dizaines de chefs d’État qui vont arriver au même moment dans le même bâtiment, c’est pratiquement sans précédent », a mis en garde sur Sky News Edward Stringer, ancien de la Royal Air Force et spécialiste des questions de sécurité, évoquant les funérailles de Nelson Mandela en 2012 comme seul événement d’ampleur comparable. « Et c’est pourquoi l’opération sera intense : tous les services en charge de l’antiterrorisme seront à leur plus haut niveau d’alerte, si ce n’est déjà en action. »

Limousine blindée et bain de foule royal

Dans les colonnes du Guardian, l’ancien responsable policier Bob Broadhurst, qui a notamment été en charge de la sécurisation du mariage de Kate et William, explique en effet qu’une variété de menaces est prise au sérieux et anticipées, allant du terrorisme à des manifestations d’opposants à la couronne en passant par de la petite délinquance d’opportunité et des bousculades dans la foule.

Le tout avec la nécessité pour les forces de l’ordre de se mêler à la solennité de l’occasion. « Il faut réussir à agir en respectant la dignité du moment sans pour autant exposer qui que ce soit à un niveau de risque sortant de l’ordinaire », poursuit Bob Broadhurst.

Au total, 10.000 policiers sont mobilisés chaque jour dans la capitale, en plus de militaires et d’un important travail des services de renseignements (photo prise le 10 septembre, en marge de la proclamation du roi Charles III).
Carl Court / Getty Images Au total, 10.000 policiers sont mobilisés chaque jour dans la capitale, en plus de militaires et d’un important travail des services de renseignements (photo prise le 10 septembre, en marge de la proclamation du roi Charles III).

Un objectif compliqué par l’attachement de la famille royale à demeurer proche du peuple. « C’est absolument terrifiant » comme perspective pour ceux qui sont en charge de la sécurité. « Si l’on fonctionnait comme aux États-Unis, on mettrait simplement toutes les personnalités dans une bulle sécurisée dont personne ne peut s’approcher », détaille le policier, évoquant des véhicules blindés et un bâtiment inspecté et très protégé. « Mais là, la famille royale sera dans des carrosses ouverts, au milieu d’une foule d’on ne sait combien de personnes qu’il sera impossible de fouiller dans son ensemble. »

Pour faciliter l’action de la police, plusieurs mesures ont d’ores et déjà été prises. De nombreux événements, et notamment des rencontres sportives nécessitant une sécurisation, ont été reportés. Les patrouilles ont été multipliées dans les transports en commun et dans les rues, et un plan pour l’accueil d’Emmanuel Macron, Joe Biden, Justin Trudeau et le reste des dirigeants mondiaux a été ébauché.

Ainsi, il a été recommandé aux chefs d’État de voyager en équipe restreinte, d’éviter les jets privés pour ne pas encombrer les aéroports et de ne pas voyager en hélicoptère une fois arrivés à Londres. Et si Joe Biden devrait avoir le droit de circuler à bord de sa limousine blindée « The Beast » tout comme l’empereur du Japon Naruhito et le président israélien Isaac Herzog pourront emprunter un véhicule sécurisé, une bonne partie des autres invités de marque devront se contenter de bus collectifs. Le tout, évidemment, sous l’œil attentif des forces de sécurité.

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