Fortes chaleurs tardives : les cultures menacées à l'approche de l'hiver

Les températures, exceptionnellement chaudes pour la saison, associées à un manque de pluie, menacent certaines cultures comme le colza.

Une culture de colza (crédit : getty image)
Une culture de colza (crédit : getty image)

Le mercure s’affole en ce début du mois d’octobre. Plus de 30°C enregistrés en à Toulouse, Biscarrosse ou Aix-en-Provence… des records de températures ont été battus partout dans l’Hexagone ce lundi. Si ces fortes chaleurs tardives font le bonheur de certains, elles ne sont pas sans conséquences sur la nature.

À l’automne, les arbres se débarrassent normalement peu à peu de leurs feuilles pour survivre à l’hiver. Ils vont arrêter d’irriguer les feuilles, qui deviennent jaunes et tombent. "L'arbre va fermer ses stomates pour arrêter de transpirer, afin d'essayer de maintenir le maximum d'eau", détaille Yann Vandebeulque, responsable territorial à l'ONF à BFMTV. Ces réserves d’eau sont alors distribuées au niveau du tronc et des branches. Mais ce rythme, calé à la luminosité et la température, peut se dérégler. Les arbres alors affaiblis sont notamment plus vulnérables face aux attaques de champignons et d’insectes.

Outre les arbres, les cultures aussi pâtissent des fortes températures. Le Giec estime que 8% des terres agricoles actuelles deviendront climatiquement inadaptées d’ici 2100. Certaines cultures telles que le maïs, le soja, le riz et le blé sont d’ailleurs déjà impactées. Il y a eu une perte de 9 à 10% de la production totale de céréales entre 1981 et 2010, selon les estimations.

Les vignes exposées

"Les fortes températures n’ont pas de grandes conséquences, à ce stade, sur les cultures actuelles comme le maïs, le soja ou sorgho, nous explique Philippe Debaeke, directeur de recherche dans l’unité AGIR (AGroécologie, Innovations, teRritoires) de l’INRAE. Elles sont même plutôt favorables car elles vont favoriser les conditions de récoltes et faire des économies sur le séchage." Dans ces cas précis, où le cycle est terminé, le rendement a été déterminé bien plus tôt.

Marc-André Selosse, botaniste et professeur au Muséum national d'Histoire naturelle, interrogé par BFMTV explique que les plantes qui font plus de photosynthèse et donc de réserve en sucre, comme les légumes et les fruits d’été, pourrait voir leur saison durer plus longtemps. En revanche, le raisin blanc pourrait quant à lui pâtir des fortes températures, à cause d’un risque d’oxydation.

“Le colza peut vraiment être menacé par les cycles d’été plus long”

Les cultures semées fin août-début septembre sont les plus vulnérables face aux fortes chaleurs. "Le colza peut vraiment être menacé par les cycles d’été plus long", souligne Philippe Debaeke. Le spécialiste poursuit : "Les hautes températures contribuent à accélérer le dessèchement des sols, surtout s’il n’y a pas de pluie. Cela perturbe la germination et la mise en place des cultures d’hiver. C’est le cas du blé ou de l’orge qui vont être semés en octobre par exemple. Ce n’est pas encore catastrophique mais il ne faudrait pas que ce régime hydrique et thermique se prolonge trop longtemps."

De plus, les graines qui ne germent pas et ne produisent pas de jeunes plantules sont beaucoup plus sensibles aux attaques de ravageurs, comme les oiseaux. Les hautes températures sont aussi "pénalisantes pour les cultures intermédiaires qui sont à vocation non productive, renchérit le directeur de recherche. Ces cultures sont installées au début de l’automne pour couvrir les sols et les protéger de l'érosion et de la pollution aux nitrates." Si elles n'arrivent pas correctement à s'implanter et à protéger les sols, il pourrait y avoir des conséquences sur les cultures plantées ensuite.

La principale crainte des experts est que la situation perdure. Les hivers plus doux sont associés à des avancées de cycles, des plantes qui ont "commencé à avancer des organes reproducteurs" et qui sont beaucoup plus sensibles au gel en fin d’hiver. "Il faut espérer une baisse des températures pour observer une latence de la végétation pendant l’hiver. Et des retours de pluies pour que les cultures puissent s’implanter normalement", conclut Philippe Debaeke.

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