Face aux AVC, cette intelligence artificielle accélère le diagnostic et réduit les séquelles

Un médecin examine les résultats d’un scanner d’une victime d’un AVC (Photo d’illustration).
WILL & DENI MCINTYRE Un médecin examine les résultats d’un scanner d’une victime d’un AVC (Photo d’illustration).

SANTÉ – Une intelligence artificielle pour aider à la prise en charge des AVC ? C’est l’expérience menée au Royaume-Uni. Selon une annonce du ministère britannique de la Santé ce mardi 27 décembre, le nombre de patients qui ne présentent pas ou peu de séquelles après un accident vasculaire cérébral a été multiplié par trois grâce à un système d’intelligence artificielle mis en place sur cinq réseaux hospitaliers outre-Manche.

Développé par une entreprise basée à Oxford, le logiciel Brainomix e-Stroke réduit ainsi de plus d’une heure le temps du diagnostic et permet de choisir rapidement le traitement le plus adapté.

Pallier des carences

« Pour orienter un AVC, il faut d’abord avoir un diagnostic », explique au HuffPost le professeur Norbert Nighoghossian, du service de neurologie vasculaire du CHU de Lyon. « Dans le système classique, le diagnostic nécessite l’interprétation de l’imagerie par un expert radiologue. » Selon le résultat du scanner, le neurologue précisera ensuite le type de prise en charge adaptée au patient.

Seulement voilà, « il y a des territoires où vous n’avez pas de radiologues en permanence au sein du service d’urgence, explique le professeur Norbert Nighoghossian. Donc vous n’avez pas d’expert capable d’interpréter les données d’imagerie. »

Grâce à l’intelligence artificielle, le logiciel permettrait donc de pallier ces carences, mais aussi d’aider à la prise de décision dans l’interprétation de scanners du cerveau, pour permettre au patient « d’avoir le bon traitement, au bon endroit, au bon moment », souligne le ministère de la Santé britannique. Le tout dans un domaine où tout gain de temps est crucial. « Chaque minute gagnée pendant l’évaluation initiale à l’hôpital des gens qui présentent des symptômes d’AVC permet d’améliorer spectaculairement les chances d’un patient de quitter l’hôpital en bonne santé », a affirmé dans un communiqué le Dr Thimothy Ferris, directeur de la transformation au sein du système public de santé britannique (NHS).

Selon le communiqué du ministère de la Santé du Royaume-Uni, l’utilisation de Brainomix e-Stroke dans 111 000 cas de suspicion d’AVC a ainsi augmenté de 16 % à 48 % le taux de patients qui ne souffrent ensuite d’aucun handicap ou d’un handicap léger.

Le ministère de la Santé cite aussi l’exemple de Carol Wilson, assistante pédagogique et grand-mère, qui, en juin 2021, a souffert de crampes intenses et a perdu rapidement la vue et l’usage de ses membres. Le logiciel a permis de diagnostiquer rapidement un caillot de sang au cerveau et d’opter pour une thrombectomie, une intervention médicale consistant à retirer un caillot qui bouche une artère cérébrale. « J’ai pu m’asseoir et envoyer des textos à la famille le jour-même, et rentrer chez moi et remarcher environ deux jours après avoir eu un AVC », témoigne-t-elle.

Et en France ?

« C’est une avancée technologique », reconnaît le professeur Norbert Nighoghossian, qui verrait aussi l’utilité d’un tel système en France. « En Auvergne-Rhônes Alpes, on a quatre centres efficaces pour faire de la thrombectomie pour un bassin de population de 11-12 millions de personnes et environ 15 000 AVC par an sur cette région. Toutes les structures d’urgence ne sont pas équipées de radiologues H24, mais elles ont des scanners ou des IRM. Si on remplace l’œil du radiologue par l’intelligence artificielle, on pourra probablement, selon l’expérience anglaise, mieux sélectionner les malades et du même coup en traiter davantage ou les adresser à des structures appropriées. »

Le professeur en neurologie vasculaire reste néanmoins prudent. « C’est un progrès indiscutable, mais il y a des incertitudes, estime-t-il. Ça ne résout pas le problème de fond : en France, le nombre de centres capables de faire une thrombectomie est limité. Mais si ça marche bien, c’est aussi un moyen de répondre à l’insuffisance de radiologues compétents dans les déserts médicaux ».

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