Euro 2024: Jonathan Clauss, retour en terrain connu

Depuis le début, Jonathan Clauss voit ça comme un clin d’œil du destin. Un Euro en Allemagne, le pays où il s’est fait connaître et un camp de base à Bad Lippspringe, à 45 kilomètres de Bielefeld, le club qui l’a fait exploser. "Je suis content d’y retourner, c’est là que tout a commencé, souriait-il avant de s’envoler pour l’Euro. C'est l'un des clubs où j’ai repris beaucoup de plaisir à jouer au foot. Un coach m’a redonné ce second souffle, le goût d’être sur un terrain, d’être heureux. Le clin d’œil personnel est très beau. Retourner en Allemagne avec le coq sur le cœur, ça remue quelques souvenirs, et ça fait réfléchir, ça prend de la place. L’Allemagne est toujours un pays qui m’a énormément plus par la vie et le foot."

Car quand il signe à l’Arminia Bielefeld, en 2018, le moral du joueur est au plus bas. Son équipe de Quevilly-Rouen vient de descendre en National et Clauss n’a plus de contrat. Le moment est dur, d’autant que le Strabourgeois a déjà galéré pour en arriver là : pas conservé au centre de formation de Strasbourg, il est passé par Vauban (5e division), Linx (5e division allemande), Raon L’Etape (5e division) et Avranches (National)...

"Il filmait tout"

"Il était au chômage, il y avait quelques touches de clubs de Ligue 2. Il doit partir en partir en essai à l’étranger...", se souvient un proche. En Biélorussie, en l’occurrence. Au cas où, Clauss avait aussi en tête, pendant un temps, un plan B, celui de faire des petits boulots. Jusqu’au coup de fil de Samir Arabi, directeur sportif, à l’époque, du club de Bundesliga 2. "Je regardais beaucoup la Ligue 2 car il y a beaucoup de joueurs intéressants, rejoue le dirigeant. Je l’avais vu plusieurs fois et la première fois, j’ai vu qu’il avait quelque chose de spécial. Sa technique mais aussi sa vision du jeu. Il sentait très bien les positions sur le terrain." L’Alsacien, qui comprend et parle un peu l’allemand, signe. Et le destin fait le reste: le latéral droit du club se blesse et après trois entraînements, Jonathan Clauss commence comme titulaire à Hambourg. "Je me rappelle quand il est arrivé dans le stade de Hambourg, il filmait tout car jouer dans un tel stade un lundi soir c’était spécial", sourit Samir Arabi. "Là il se retrouve directement en Allemagne en Bundesliga 2 avec des stades de 50 ou 60.000 places remplis. Il passe de jouer un QRM-Sochaux à Bielefeld-Stuttgart à la Mercedes-Benz Arena", se souvient un membre de son entourage. D’abord latéral dans une défense à quatre, Clauss s’épanouit encore plus lors d’un changement de système, où il joue plutôt le rôle d’un ailier.

Discipline et bonne ambiance

"Il était déjà meilleur offensivement que défensivement", avoue Samir Arabi. Sa carrière décolle définitivement et les doutes, émis par certains en interne, s’évaporent très vite. Il joue 29 matchs lors de sa première saison. Et, alors qu’il pouvait parfois sortir du cadre par le passé, le latéral s’assagit. "La discipline allemande c’était quelque chose pour un mec comme lui qui n’avait pas eu de rigueur depuis le centre de formation. Il a payé des amendes parce qu’il arrivait en retard à l’entraînement", ajoute un proche. Sur le terrain, rien à dire. Dans le vestiaire, non plus. "Il s’est facilement adapté, c’est un bon gars. Il était complètement accepté par le groupe, se souvient Arabi. Il était très important pour l’équipe, il blaguait dans le vestiaire. Il était marrant, il mettait la bonne ambiance." Il mettait parfois la musique, aussi. L’aventure prend fin après deux ans, en 2020, quand l’Arminia Bielefeld monte en Bundesliga avec un équipe talentueuse (notamment Stefan Ortega, actuel gardien de Manchester City). Adoré des supporters, devenu un cadre de l’équipe (36 matchs, 5 buts, 10 passes décisives), Clauss choisit de rallier Lens. "On voulait le garder mais on n’a pas trouvé d’accord. Ça arrive", lâche Samir Arabi. Convaincu que le joueur peut viser les sommets, son entourage le rapatrie donc en France avec la réussite que l’on connait. Et cette participation à l’Euro. "Je serais un menteur si je vous disais que je m’y attendais, avoue Arabi. Je vous aurais dit qu’il pouvait jouer au plus haut niveau mais qu’il devienne international est incroyable." Et son passage à l’Arminia Bielefeld y est pour beaucoup.

Article original publié sur RMC Sport