Pour les enfants placés à l’ASE, une nouvelle aide annoncée mais qui fait l’unanimité contre elle

La Première ministre Elisabeth Borne et la Secrétaire d’Etat chargée de l’Enfance, ici le 20 novembre 2023.
ALAIN JOCARD / AFP La Première ministre Elisabeth Borne et la Secrétaire d’Etat chargée de l’Enfance, ici le 20 novembre 2023.

POLITIQUE - Avec sa « mesure absolument indigne », la secrétaire d’État chargée de l’Enfance Charlotte Caubel « fait les poches des enfants placés ». Voici l’affirmation du militant pour les droits de l’enfant Lyes Louffok, qui a exprimé sa colère mercredi 22 novembre sur X à propos de la nouvelle aide financière pour les jeunes placés à l’Aide sociale à l’enfance (ASE).

Deux jours plus tôt, la Première ministre Élisabeth Borne avait annoncé dans le cadre du troisième Comité interministériel à l’enfance (CIE) la mise en place d’un « coup de pouce » de 1 500 euros pour les jeunes de 18 ans sortants de l’ASE. Sur le papier, cette aide est la bienvenue pour ces enfants qui se retrouvent souvent démunis une fois majeurs.

Problème, cette allocation se substitue au « pécule » accordé à « tous les enfants placés dont les parents sont éligibles à l’allocation de rentrée de scolaire », explique Lyes Louffok, qui a lui-même connu cette situation. « Cette allocation de rentrée scolaire est mise sur un compte à la caisse des dépôts que le jeune peut récupérer à sa majorité », ajoute-t-il, citant la loi du 14 mars 2016.

Moins de la moitié des allocations sont récupérées

Le montant reçu par chacun est différent en fonction du temps passé à l’ASE, poursuit Lyes Louffok. D’après lui, un enfant placé de ses 6 à 18 ans reçoit en 2023 environ 4 588 euros, un enfant placé de ses 10 à 14 ans reçoit 1 658 euros, et un enfant placé de ses 12 à 18 ans reçoit 2 562 euros. Bien plus que l’aide unique envisagée par l’exécutif.

Ce système n’est pas parfait, reconnaît encore le militant : « Les enfants pupilles, les enfants dont les parents ont été déchus des droits parentaux, les MNA [mineurs non accompagnés, NDLR] ou les enfants dont les parents ont un revenu conséquent ne sont pas éligibles à l’ARS et donc de fait, pas éligible au pécule. »

De plus, de nombreux jeunes ne retirent pas leur dû par manque d’information ou par incompréhension. Dans La Croix, une responsable de la Caisse des dépôts expliquait cet été que « depuis la mise en place du dispositif, le taux de paiement est de 42,3 % pour un montant moyen de 885 € ».

« 1 500 au moins »

Dans ce contexte, l’idée du gouvernement de rendre automatique le versement des 1 500 euros paraît louable. Mais Lyes Louffok souligne qu’il ne rendra en rien la situation plus équitable puisqu’« un enfant placé de 17 ans à 18 ans aura le droit à la même somme qu’un enfant placé de 6 ans à 18 ans ». Dans Le Parisien, il en déduit que « tous les enfants qui auront été placés depuis plus de deux ans, soit la majorité des jeunes de l’ASE, seraient perdants ». Les enfants partis avant leurs 18 ans se retrouveraient de leur côté avec un montant de... 0 euro.

Face aux critiques, Charlotte Caubel a répondu dans un communiqué publié sur X. Elle précise que l’aide sera de « 1 500 euros au moins » pour tous les jeunes de 18 ans qui quittent l’ASE, et que le montant « sera adapté pour tenir compte de toutes les situations ». « Nous ne supprimons pas de droit, au contraire, nous en ouvrons pour ceux qui n’ont rien », affirme encore la secrétaire d’État. Au Figaro, son cabinet a par ailleurs affirmé que les cas de la « minorité » de jeunes qui perdraient de l’argent seraient « étudiés ».

Pas de quoi convaincre ni Lyes Louffok, ni les associations, ni certaines responsables politiques qui continuent de s’indigner. L’ex-ministre à l’origine de la loi de 2016 Laurence Rossignol s’est ainsi insurgée sur X : « Suppression du pécule au profit d’une allocation de 1 500 euros. Conséquence : un enfant accueilli pendant 10 ans à l’ASE a droit à (environ) 4 500 euros à sa majorité dans le système actuel. Perte sèche pour lui : au moins 3 000 euros ! Inacceptable. »

L’annonce du gouvernement est « un vol en bonne et due forme des enfants placés, puisque moindre que ce qu’ils touchent actuellement », juge la cheffe de file des insoumis à l’Assemblée nationale Mathilde Panot. Sa collègue écologiste Sandrine Rousseau dénonce encore : « Après les chômeurs, les bénéficiaires du RSA, les salariés aux métiers pénibles, le gouvernement se déshonore encore et encore. »

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