Diplomatie, climat, indépendance... Pourquoi Emmanuel Macron se rend-il en Océanie?

Après le remaniement, direction l'Océanie. Emmanuel Macron est attendu lundi soir en Nouvelle-Calédonie pour une visite très attendue, plus d'un an après la victoire du "non" au référendum sur l'indépendance de l'archipel.

Boycotté par les indépendantistes, le scrutin de décembre 2021 n'avait pas apaisé les tensions. Le président entend aujourd'hui dépasser les "fractures", confie-t-on à l'Élysée, pour inventer avec les Calédoniens un nouveau statut pour le territoire. Il rencontrera à ce sujet les différentes forces politiques locales mardi, après une journée lundi consacrée aux problématiques d'érosion du littoral.

Emmanuel Macron poursuivra son voyage avec deux étapes qualifiées d'"historiques" au Vanuatu, jeudi, et en Papouasie-Nouvelle-Guinée, vendredi, où aucun président français ne s'est jamais rendu depuis l'indépendance des deux pays. Seul le général de Gaulle s'était offert un bain de foule au Vanuatu en 1966, mais le territoire était encore une colonie franco-britannique appelée Nouvelles-Hébrides.

L'Indopacifique, "priorité diplomatique"

Dans ces archipels situés au nord de l'Australie, Emmanuel Macron doit décliner sa stratégie pour la région indopacifique, qui consiste à "réengager la France" dans la zone. Le chef de l'État en a fait une "priorité diplomatique", comme le montre l'invitation récente du Premier ministre indien Narendra Modi au défilé du 14-Juillet.

Centre névralgique du commerce mondial, l'Indopacifique est le théâtre d'une intense bataille d'influence entre la Chine et les États-Unis. Ainsi, Pékin affiche de plus en plus fermement ses prétentions en mer de Chine méridionale, n'hésitant pas à entrer en conflit avec des pays comme le Vietnam ou les Philippines.

Le régime de Xi Jinping tisse aussi sa toile diplomatique dans la région avec des accords commerciaux et sécuritaires dans les îles Salomon, aux Fidji ou au Vanuatu. Washington, de son côté, contre-attaque en accroissant sa présence militaire dans la région et son soutien à Taïwan.

Face à Pékin et Washington, l'"alternative" française

Face à ce duel, "ce que nous proposons, c'est une alternative", explique à la presse un conseiller de l'Élysée en amont du voyage présidentiel. Une forme de troisième voie qui avait valu une volée de bois vert internationale à Emmanuel Macron, quand il appelait en avril les Européens à ne pas être "suivistes" de Washington.

Si la France est présente dans le bassin indopacifique grâce à ses outre-mers (Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna, Polynésie française, La Réunion...), "l'attention portée aux îles du Pacifique, États et territoires membres de la Communauté du Pacifique (CPS), a été jusqu'à présent assez modeste en dépit de leur importance stratégique", note l'Institut français des relations internationales (Ifri).

"L'éloignement géographique et la connaissance limitée de cette région en Europe ne favorisent en effet pas l'intérêt politique, économique et médiatique", souligne l'institut.

Engagement climatique

Humiliée par la conclusion d'une alliance Aukus entre l’Australie, les États-Unis et le Royaume-Uni, la privant d'un juteux contrat de sous-marins avec Canberra, la France cherche désormais à conclure des accords bilatéraux dans la région, comme avec l'Indonésie.

En 2022, la France a pu se targuer d'être le premier pays européen invité par l'Apec, le Forum de coopération économique Asie-Pacifique, qui réunit une vingtaine de pays dont la Chine, États-Unis, la Russie, le Japon, l’Australie... Ce succès diplomatique "valide la stratégie indopacifique lancée en 2018", s'était félicité l'Élysée à l'époque.

Un constat tempéré en début d'année 2023 par un rapport sénatorial, qui pointe des moyens financiers pas "à la hauteur des ambitions affichées", notamment en matière militaire.

Pour Emmanuel Macron, la stratégie française doit s'appuyer sur des leviers multiples: économiques, militaires, culturels mais aussi environnementaux. L'Élysée a ainsi promis des "annonces fortes" en vue d'un "rehaussement" de l'engagement français à l'égard des petites îles qui se trouvent en première ligne face au réchauffement climatique.

Article original publié sur BFMTV.com