"La culture du viol au sommet de l’État": une tribune dénonce le soutien de Macron à Depardieu
Une tribune, publiée à l'initiative de l'association MetooMedia, interpelle Emmanuel Macron après que le président a affirmé que Gérard Depardieu était "une fierté pour la France".
Un soutien qui ne passe pas. Plus d'une centaine de femmes et d'hommes dénoncent l'attitude d'Emmanuel Macron dans l'affaire Gérard Depardieu, dans une tribune publiée par Le Monde ce mercredi 27 décembre à l'initiative de l'association MetooMedia.
Dans cette lettre ouverte, les signataires interpellent directement le chef de l'État: "Monsieur le président de la République, vous avez souhaité faire de votre double quinquennat celui de la lutte contre les violences faites aux femmes. (...) Il s’agit d’une posture politique, rien de plus."
Invité de l'émission C à Vous, mercredi dernier, Emmanuel Macron affirmait notamment que Gérard Depardieu - mis en examen pour viols et visé par plusieurs plaintes - était "une fierté pour la France". "Je déteste les chasses à l'homme", commentait le chef de l'État, après la diffusion d'une enquête de France 2 sur le comédien. "Les procédures judiciaires vont faire leur chemin."
"Vos propos témoignent de votre désintérêt pour la cause et d’une totale ignorance du champ des violences sexistes et sexuelles", rétorquent les signataires de la tribune du Monde.
"Les victimes auraient mérité que leur courage soit salué"
Autre reproche fait à Emmanuel Macron: prendre parti pour "l'acteur populaire" plutôt que pour "la victime inconnue". "Pour vous justifier, vous invoquez la présomption d’innocence… comme si l’innocence primait sur la présomption", écrivent les signataires. "Un présumé innocent n’est pas nécessairement un innocent."
Outre les plaintes, l'acteur de 74 ans visé par les témoignages de 13 femmes qui l'accusent, dans Mediapart, d'avoir commis des violences sexuelles durant les tournages de films sortis entre 2004 et 2022. Gérard Depardieu nie fermement les accusations.
"Que faites-vous de la présomption d’innocence des plaignantes? Une victime a tout à perdre à porter plainte, surtout quand le mis en cause est connu et puissant. (...) Près de 98 % des victimes disent vrai, devons-nous le rappeler?", questionne la tribune.
Si les signataires affirment que Gérard Depardieu "n’a pas besoin d'un soutien présidentiel", "les victimes, en revanche, auraient mérité que leur courage soit salué". "Ce sont vos paroles de président qui dénient aux plaignantes et à toutes les femmes victimes de violence le droit à être entendues et crues. À tous les hommes aussi, car certains subissent des violences sexuelles, enfants ou adultes", est-il écrit.
"Vous avez validé la culture du viol"
Un parallèle est également fait entre la défense par Emmanuel Macron de Gérard Depardieu et celle de Nicolas Hulot en décembre 2021 - l'enquête visant ce dernier a été classée sans suite en raison de la prescription des faits rapportés. Ou encore avec Harvey Weinstein contre qui des démarches ont été engagées pour lui retirer la Légion d'honneur en 2017 alors qu'il n'était pas encore jugé. "Pourquoi protéger Depardieu? Par préférence nationale?".
"Vous auriez pu entrer dans l’histoire comme le président ayant fait durablement avancer la cause des victimes de violences conjugales et de violences sexistes et sexuelles. À contrario, vous avez – par vos mots – validé la culture du viol au plus haut sommet de l’État", conclu la tribune.
Emmanuelle Dancourt, présidente de MeTooMedia à l'origine de cette tribune, a justifié sur BFMTV cette tribune par "la violence des mots de Macron", "du côté des puissants".
"On sent que c'est quelqu'un qui ne connaît pas les violences sexistes et sexuelles. Il n'est pas sincère et n'a aucune idée de quoi il parle", ajoute-t-elle.
Une tribune de soutien de 59 artistes
Dans une autre tribune publiée dans Le Figaro, une soixantaine de personnalités ont soutenu l'acteur en dénonçant un "lynchage" du "dernier monstre sacré du cinéma", au cœur d'un scandale depuis la diffusion d'un documentaire de Complément d'enquête sur France 2 le 7 décembre dernier.
On compte parmi ces signataires Nathalie Bayle, Pierre Richard ou encore Carla Bruni. Ils dénoncent un "torrent de haine qui se déverse" sur Gérard Depardieu "sans nuance, dans l'amalgame le plus complet". Et, estiment-ils "au mépris d'une présomption d'innocence dont il aurait bénéficié, comme tout un chacun, s'il n'était pas le géant du cinéma qu'il est".
Sur les images de Complément d'enquête, Gérard Depardieu multiplie les propos misogynes et insultants en s'adressant à des femmes, n'épargnant pas une fillette avec des propos à caractère sexuel.
Article original publié sur BFMTV.com
VIDÉO - L'année où Depardieu est tombé de son piédestal