La CPI s'ingère dans la réconciliation ivoirienne

“Charles Blé Goudé à La Haye ? Ce n’est que justice, serait-on tenté de répondre”, écrit le quotidien ivoirien Le Patriote. L’organe de presse, qui soutient le président Alassane Ouattara, ne cache pas son opposition à cette “âme damnée”, Charles Blé Goudé, ancien ministre sous l’ère Gbagbo et président des Jeunes Patriotes.

Le journal se souvient de ces “appels au meurtre”, de ces “escadrons de la mort” encouragés par “Blé la machette” (entre 2001 et 2004) : “Amnesty International rappelle que les tueries pendant la crise postélectorale se sont accentuées après le discours de Charles Blé Goudé. Son rôle nocif n’est plus à démontrer (…), les propos et les photos sont là pour en attester.”

Mais le cas est complexe et son extradition à La Haye est loin d’être évidente, rappelle le site d’information Koaci.com : “A l’image de Simone Gbagbo [épouse de l’ancien président, elle aussi sous mandat d’arrêt de la Cour pénale internationale (CPI) pour incitation à la violence et crime contre l’humanité], tout indique à cette heure que Blé Goudé subira le même traitement [que l’ex première dame] : une non-livraison à La Haye et un éventuel jugement en terre ivoirienne” et non à la CPI.

Le gouvernement d’Alassane Ouattara doit résoudre cette difficile équation : comment rendre justice pour les exactions qui se sont déroulées avant son arrivée au pouvoir, et réconcilier les Ivoiriens, toujours aussi divisés depuis l’ère Gbagbo ? Sachant que le clan Ouattara n’est pas non plus exempt de tout reproche et que certains de ces partisans sont également sous le joug de la justice internationale, comment justifier l’extradition des pro-Gbagbo seulement ?

D’autre part, Ouattara se doit de garder de bonnes relations diplomatiques sur la scène mondiale, et notamment avec la France, qui fût dans le viseur des critiques du clan Gbagbo et notamment de Charles Blé Goudé. En novembre 2004, après un discours virulent de l’ex-leader des Jeunes Patriotes, l’opération Dignité a fait 85 morts dont 9 soldats français et un civil américain. Et pourtant, dans L’Intelligent d’Abidjan, Zadi Djédjé, président de la Coalition de la jeunesse patriotique pour la paix et la réconciliation, appelle le gouvernement Ouattara à ne pas céder aux demandes de la CPI : “Envoyer Blé Goudé à La Haye va empirer les choses. On ne fait pas d’un vaincu un ennemi, mais plutôt un ami. Le président doit enlever son chapeau de président d’un seul parti et être celui de tous les Ivoiriens.”
Pour l’instant, le gouvernement ne s’est pas exprimé sur la demande d’extradition, déclarant qu’il se donnait le temps de la réflexion : “Nous sommes sur un terrain très mouvant”, s’est justifié son porte-parole.

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