Coppens, le gai savoir - Chronique «L'air du temps»

Loin des savants austères, le découvreur de Lucy, disparu le 22 juin, nous a tous rendus paléontologues.

Certains scientifiques ont un don pour se rendre irrésistiblement sympathiques. Ils racontent leurs découvertes et on a l’impression d’entendre parler La Fontaine. Quand il décrivait le comportement des fourmis, l’entomologiste Jean-Henri Fabre pensait en savant, s’exprimait en humaniste et ouvrait les cœurs comme une fenêtre au grand soleil. Victor Hugo l’avait surnommé l’Homère des fourmis. Gamin, j’étais fasciné quand le biologiste Jean Rostand passait à la télévision. Il y avait de la saga dans l’air quand il partait dans ses aventures de grenouilles. Avec ça, se méfiant comme de la peste de « certaines sciences ayant fait de nous des dieux avant même qu’on mérite d’être des hommes ».

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C’est ce flot amical que soulevait Yves Coppens quand il décrivait nos bons vieux australopithèques. Car, avec lui, on remontait loin. Des millions d’années en arrière. Il aura sacrément retroussé les jupes de l’Histoire. En même temps, il touchait à la métaphysique. Entre ses doigts, des cailloux, de simples traces, des graines ou des bouts d’os devenaient le symbole de la naissance de l’homme. À la Renaissance, il aurait fini au bûcher. À la nôtre, il n’a même pas été reçu à l’Académie française, prise de panique à la perspective de voir en son sein un spécialiste des fossiles !

Dans la vie, le rêve, c’est d’avoir une passion. La sienne est née à Vannes, chez lui, au Château-Gaillard, le musée de paléontologie de la Société polymathique du Morbihan. C’est l’ancien parlement de Bretagne du temps des ducs Jean. On y trouve des haches, des urnes funéraires, des monnaies antiques, des bols, des bijoux néolithiques, des silex bifaces... Un vrai souk qu’enfant il observait(...)


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